Une révélation, l’enthousiasme de la jeunesse, beaucoup de questions, après les trois amicaux de début juin, on fait le point sur la sélection tunisienne.

bandeaubielsa

Une agréablement surprenante découverte (Laïdouni), quelques certitudes renforcées, la fougue d’une jeunesse sans complexes, mais encore des doutes sur plusieurs postes et un jeu collectif encore loin du compte : un bref bilan des trois matchs amicaux de la sélection tunisienne.

Laïdouni grande satisfaction, Sliti valeur sûre

Il aura fallu peu de temps pour que l’évidence saute aux yeux : quelle que soit la configuration future du milieu de terrain, Laïdouni sera un nom coché rapidement dans la construction d’un possible onze-type. Le milieu de terrain de Ferencváros s’est rapidement imposé et a débuté cette séquence de matchs amicaux par une excellente prestation face à la RD Congo, en étant garant du liant avec le secteur offensif, avec rapidité et simplicité. Très gêné par le pressing très haut et étouffant de l’Algérie lors de la seconde rencontre, il n’a pu maintenir à flot un collectif qui prenait l’eau de toutes parts, mais a conclu face au Mali en rendant une copie sobre, pour un bilan globalement très satisfaisant qui en fait un candidat avéré à la titularisation, très probablement (que le milieu soit à deux ou à trois) aux côtés de Skhiri dans l’entrejeu, qui à l’instar de ces deux dernières années a fait le boulot proprement.

Un cran au-dessus de Skhiri sur le terrain et dans l’impression laissée, Naïm Sliti est le cadre offensif qui sort le plus conforté de ces matchs amicaux. La tendance à un peu trop porter le ballon est compensée sans trop de difficulté par un tonus toujours présent, une belle capacité d’élimination et une prise d’initiative une nouvelle fois décisive contre la RDC, et une générosité dans l’effort non émoussée par l’enchaînement des matchs. Dans le registre des bons points, on peut citer Talbi, la bonne réaction de Meriah contre le Mali, le bon bilan d’Hassen, et deux points détaillés dans les parties qui suivent : l’apport offensif des latéraux, et l’enthousiasme de la jeunesse.

Des latéraux à l’aise pour attaquer, quel choix pour un meilleur équilibre ?

Très offensifs de par leur qualités, Ali Abdi et Wejdi Kechrida ont montré de bonnes dispositions dans les débordements contre la RDC, Kechrida en prime contre le Mali et favorisé par un changement de système qui lui était favorable, mais malheureusement il n’a pas été possible de juger leur capacité à défendre contre les gros clients qu’étaient Mahrez et Belaïli, qui auraient constitué un bon révélateur pour eux. Probablement une volonté d’équilibrer un peu plus avec des latéraux moins portés sur les chevauchées lointaines, mais c’est donc Drager et Haddadi qui ont eu cette lourde tâche contre l’Algérie. Le choix pour dessiner un onze-type sera donc de déterminer quelle option adopter entre deux latéraux très offensifs dans une défense à cinq ou (plus périlleux) dans une défense à quatre, ne choisir d’avoir des montées que dans un seul couloir dans une défense à quatre (selon l’adversaire et sur qui il faut défendre), ou une formule bien plus prudente mais qui implique de n’aligner ni Abdi ni Kechrida. En espérant que chaque option ait pu être testée et fiabilisée avant les matchs qui comptent…

Une jeunesse enthousiaste dont il faut tirer le maximum

Les nouveaux venus (pour ce stage ou dont l’ancienneté est inférieure à un an) de cingt-deux ans et moins ont insufflé une énergie positive et intéressante dans leurs apparitions, à différents degrés. Frustrantes car une envie de bien faire malgré les difficultés (Ben Slimane contre l’Algérie, l’entrée en jeu de Rafiaa contre la RDC, Mejbri contre le Mali) mais avec des éclairs qui montrent l’évidence d’un talent et d’un potentiel, à l’instar du but victorieux de Ben Slimane contre le Mali, ou les premières prises de balles et premiers mouvements de Mejbri contre la RDC. Dans l’état d’esprit aussi, au travers par exemple de la sortie médiatique d’Omar Rekik, auteur d’un match plutôt neutre mais qu’il a jugé avec lucidité, il y a des prémices qui incitent à l’optimisme. Mais pour espérer bousculer la hiérarchie de façon durable, cet enthousiasme et cette énergie doivent être canalisés et inscrits dans un cadre tactique défini pour en tirer le maximum et optimiser l’efficacité. Et pour tous ces jeunes, il serait souhaitable d’avoir du temps de jeu en club pour se perfectionner et venir confronter les progrès acquis au contexte concurrentiel de la sélection…

Le jeu : la vitesse a pêché

Cette problématique n’est pas uniquement due aux prestations décevantes de Msakni et Sassi contre la RDC, ou la frustration de Khazri enfermé dans ce poste de faux 9 qui ne lui correspond pas, mais soulève une question plus globale : à la CAN et pour les qualifications au Mondial, il faudra accélérer tout en gardant de la justesse. Sur cet aspect, le bilan n’est pas fameux dans l’ensemble : des à-coups contre le Mali, un rythme de jeu extrêmement lent contre une RDC qui a laissé la Tunisie jouer dans un fauteuil, et une première période très compliquée contre l’Algérie, deux crans au-dessus dans l’intensité et le collectif et qui a étouffé la Tunisie dans le pressing et dans les vagues offensives en transition sans contestation possible. Est-ce une question de système ? D’état de forme des cadres, de quel temps de jeu et niveau d’intégration des jeunes, d’automatismes ? C’est probablement un mélange de tous ces aspects.

Pour autant, il est possible, quand en face de vous un adversaire accepte de s’installer dans un faux rythme que vous proposez, de mystifier ce dernier sans trop appuyer sur le champignon. Mais la rencontre contre l’Algérie est une preuve que certaines sélections n’ont absolument aucune intention de se complaire dans un registre de ce type, et imprimeront une très haute intensité que ce soit dans la construction de leur jeu ou pour contrarier le vôtre. Et pour éviter de revoir la première période contre l’Algérie, il serait souhaitable de trouver comment accélérer tout en gardant une justesse dans les transmissions…

Le 9

Encore et toujours un problème qui persiste. Jebali et Jaziri pas assez vus pour juger, la solution de facilité d’aligner Khazri en faux 9 ne convient toujours pas, la suspension de Khenissi pour un an (avant possible appel) écarte cette solution, Chaouat en crise de confiance à l’image de sa fin de saison compliquée, un réservoir local assez limité traduit par le recours très fréquent à des attaquants étrangers de la part de plusieurs clubs. En quelques mots, le résumé du problème récurrent de la Tunisie pour identifier et installer un attaquant de pointe pour les échéances à venir.

 

Crédits photo : imago images/ZUMA Wire

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee