La vingt-septième édition de la J.League débute ce week-end. L’occasion pour Kawasaki Frontale de remettre son double titre en jeu, pour quelques favoris et outsiders d’essayer de l’en empêcher. Guide de la saison.
Après la folle remontée du Kawasaki Frontale l’an passé, la J.League est de retour pour son épisode 27. Un épisode qui sera entrecoupé d’une participation de la sélection à la Copa América et qui verra surtout une rude bataille pour le titre et les accessits. Car derrière les trois grands favoris désignés, les outsiders ne manquent pas.
Trio de feu
Accusant dix points de retard à mi-parcours, on ne donnait pas de grandes chances à Kawasaki de conserver son titre. C’était sans compter sur une série du champion sortant et futur double champion en titre, et un effondrement total d’un Sanfrecce Hiroshima sur la deuxième partie de saison. Alors donc, le champion a conservé sa couronne et la grande question est de savoir désormais s’il aura bien plus de certitudes et de régularité pour enchainer un troisième titre sans avoir à croire en une folle remontada. Sur le papier, le Frontale reste très sérieux. La bande à Toru Oniki s’offre un gros transfert, l’arrivée de l’ancien futur avant-centre de la Seleção Leandro Damião qui sort d’une saison en forme de rebond avec l’Inter et d’un top 10 au classement des buteurs du Brasileirão. Damião a tout du renfort de poids pour aider à briller également sur le continent, il sera en tout cas toujours bien entouré puisque le club a en grande partie conservé son groupe double champion et notamment le trio offensif Ienaga – Nakamura – Kobayashi placé juste derrière lui dans le 4-2-3-1 d’Oniki. Un quatuor et un schéma qui se sont déjà mis en valeur puisque le Frontale s’est offert Urawa en Super Coupe.
Des Reds qui font partie du club des outsiders en 2019. Cela fait certes plus d’une décennie qu’Urawa attend un nouveau titre mais avec le retour en J.League d’Oswaldo de Oliveira, auteur du triplé lorsqu’il dirigeait les Antlers, les espoirs sont revenus, bien alimentés par une bonne fin de saison sous les ordres du technicien brésilien après un départ poussif (arrivée à la 10e journée, il lui faudra huit journées pour entrer dans le top 10 avant un dernier tiers plus intéressant qui amènera les Reds à la cinquième place et décrocher une Coupe de l’Empereur). Les espoirs nourrissent les débuts de saison des supporters, ils doivent cependant se matérialiser sur le terrain. Pour cela, Urawa a recruté intelligent à l’image de Ryosuke Yamanaka, grand espoir au poste d’arrière gauche, et su, lui aussi, conserver un groupe qui possède l’un des secteurs offensifs les plus dense de J.League. À leur côté, on trouvera évidemment un favori habituel, les Kashima Antlers. Gen Shoji parti à Toulouse, Daigo Nishi à Kobe, le tenant du titre en ACL se retrouve à devoir recomposer sa défense, désormais amputée de moitié. Ce sera probablement la seule interrogation du côté du club le plus titré du pays car pour le reste, certains hommes clés sont toujours présents à l’image des Brésiliens Léo Silva et Serginho est toujours présent. L’association aperçue en ACL entre ce dernier et Sho Ito s’est déjà montré plus qu’intéressante du point de vue statistique, Kashima y adjoint Hiroki Abe comme futur patron et génère bien des impatiences.
Carré de prétendants
Aux côtés de ces deux grands outsiders désignés, quelques équipes pourraient tirer leur épingle du jeu. À commencer par Sapporo. Le Consadole a été la surprise de l’année 2018, manquant d’un rien une place en ACL, mais a surtout convaincu par son jeu offensif prôné par un homme qui connait bien le paysage japonais Mihailo Petrović. La surprise passée, Consadole va devoir donc confirmer et va plus que jamais compter sur son MVP 2018, Chanathip Songkrasin, un effectif privé du meilleur buteur du club Ken Tokura mais qui dans l’ensemble de bouge pas trop, espèrera relancer un Anderson Lopes déjà passé au pays mais sortant d’une saison assez quelconque en K League à Seoul. Autre candidat au rôle d’outsider, Shimizu. La deuxième meilleure attaque de 2018 a porté le S-Pulse vers une belle huitième place au lendemain d’une saison des plus compliquée (sauvetage dans l’élite à la dernière journée). Comment viser plus haut désormais ? Pour Jan Jönsson la clé se trouve dans l’équilibre et dans une meilleure stabilité défensive. Le club réussit un gros coup en attirant le meilleur latéral droit du championnat Elsinho, et muscle son axe avec Wanderson, vainqueur de la Sudamericana avec l’Atlético Paranaense même si l’essentiel de ses apparitions en 2018 s’est fait en Brasileirão (13 titularisations). Du côté de Gamba, on va surtout chercher à poursuivre sur la fin de saison exceptionnelle du club pour nourrir bien d’autres ambitions. Dix-septième et donc avant-dernier à dix journées de la fin, Gamba a signé neuf victoires consécutives après l’arrivée de Tsuneyasu Miyamoto pour finir dans le top dix. Le club conserve l’excellent Hwang Ui-jo qui a confirmé son talent avec les Guerriers Taeguk, et cherche à se muscler derrière avec son compatriote Kim Young-gwon.
Reste enfin et bien évidemment le médiatique Vissel Kobe. Le Rakuten FC d’Hiroshi Mikitani pouvait déjà s’enorgueillir de pouvoir associer le magique Andrés Iniesta à Lukas Podolski. Il frappe encore fort durant l’intersaison en s’offrant David Villa. Certes el Guaje n’est plus de prime jeunesse, mais il reste plus qu’une valeur sûre, ses performances en MLS plaidant en cela (80 buts en 124 matchs, rien que ça). Offensivement, le Vissel s’annonce ainsi redoutable, d’autant qu’Iniesta, déjà magnifique la saison passée, aura eu tout le temps d’une bonne préparation pour continuer de briller. Défensivement, le club de Kobe s’est aussi montré des plus solides avec notamment les arrivées de Daigo Nishi en provenance de Kashima ou de Dankler, qui n’a probablement pas laissé le plus grand des souvenirs aux supporters du RC Lens, mais qui devrait renforcer l’axe. Reste que l’essentiel des interrogations concernant le Vissel Kobe se concentre sur le banc de touche puisque Juanma Lillo, le chantre de la possession, aura enfin eu le temps de mettre en place son système et imprégner sa philosophie, lui qui était arrivé en octobre dernier pour le sprint final.
Quelle place pour les autres ?
À Osaka, le Cerezo était connu pour sa défense, la cinquième plus solide du pays l’an passé, celle-ci conservée, il faudra désormais faire trembler davantage les filets pour espérer mieux. Alors, le club d’Osaka a réussi à attirer Ken Tokura où il y remplacera Sugimoto et où son duo avec Kakitani s’annonce comme l’une des armes principales pour Miguel Ángel Lotina, nouveau coach du club d’Osaka. Pour s’accrocher au bon wagon, le Cerezo s’offre l’ancien de Vélez Leandro Desabato pour équilibrer son milieu, se la joue triangulation en allant chercher le Brésilien Bruno Mendes qui passe régulièrement par la case Maldonado en Uruguay pour mieux rebondir aux quatre coins du globe. À voir si cela sera suffisant pour jouer un accessit car la course au titre s’annonce plus compliquée. À Tokyo, la dynamique de fin de saison, deux victoires sur les quatorze derniers matchs, n’incite pas à un grand optimisme d’autant que le club n’a pas non plus fait preuve de grande imagination sur le marché et ne sait pas véritablement comment gérer le cas Takefusa Kubo, revenu au pays après être passé par La Masia et qui retournera à Barcelone l’été prochain, une fois majeur. Reste qu’offensivement, ce Tokyo-là est intéressant puisqu’à Diego Oliveira, treize buts la saison dernière, Tokyo ajoute un autre Brésilien, l’excellent Jael qui arrive de Grêmio avec qui il avait joué un vrai rôle dans la conquête de la Libertadores 2017.
Puisque l’on évoque les dynamiques négatives, impossible de ne pas s’arrêter un instant sur le cas du Sanfrecce. Leader sans partage une bonne moitié de saison, le club d’Hiroshima a totalement sombré après la Coupe du Monde, conclu par deux petits points pris sur vingt-sept possibles dans le dernier tiers du championnat. Un plantage digne d’un Girondins de Bordeaux sauce Laurent Blanc. La grande question est donc de savoir comment le club peut rebondir. Surtout que l’effectif n’a pas véritablement bougé et la première sortie en ACL n’a en rien auguré du bon. Ne lui reste donc plus qu’à espérer ne pas se rater d’entrée car l’histoire pourrait rapidement devenir moins amusante.
L’amusement, Nagoya ne l’a pas vraiment trouvé la saison dernière. Sauvé de justesse malgré les vingt-quatre buts de Jô, le Grampus espérait mieux et a donc cherché à muscler son groupe pour la nouvelle saison. Jô devrait être parfaitement entouré devant, alors Nagoya s’est concentré sur le milieu en attirant notamment João Schmidt, auteur de deux passages intéressant au Portugal (Setubal et Rio Ave), et sur la défense en jouant la carte de l’expérience de Yutaka Yoshida et ses plus de deux-cent matchs de J1. Si un mot doit résumer l’intersaison de Nagoya, c’est équilibre. Un équilibre recherché qui s’il est trouvé devrait déjà assurer une saison plus calme et pourquoi pas permettre de nourrir quelques ambitions.
L’équilibre est clairement un mot inconnu du dictionnaire des Marinos version Postecoglou. On connait l’ancien sélectionneur des ‘Roos pour sa philosophie offensive, son principal souci lors de sa saison à Yokohama est que le prix payé par la défense a été des plus forts : avec 56 buts encaissés les Marinos ont été la troisième pire défense de l’élite. En termes de résultat pur, cela a été compensé par la deuxième meilleure attaque. Une deuxième attaque à reconstruire après le départ de son meilleur buteur, Hugo Vieira (treize buts) et de Sho Ito (huit buts) et qui va donc reposer sur un nouveau duo formé par Tadanari Lee, habitué de la J1 mais dont les stats ne sont pas de ce niveau, et Edigar Junio qui s’était hissé dans le top 5 des buteurs de Serie A brésilienne en 2017. Pour le reste, il semble que le club se soit juste contenté de remplacer les partants mais n’a pas pointé (à moins qu’il ne s’en soucie pas) ses lacunes défensives. Cela parait donc bien délicat pour espérer se hisser vers les sommets, surtout au vu de la concurrence.
Six pour la survie
Derrière, le maintien devrait se jouer entre six équipes (aux mauvaises surprises près). Sur le papier, cela ne devrait pas être trop compliqué pour Vegalta, qui sort d’une saison assez paisible au final malgré quelques espoirs suscités en début de saison en championnat et après un parcours en Coupe de l’Empereur qui l’a conduit en finale (perdue face à Urawa), même si quelques départs laissent de jolis vides. On voit mal le Sagan Tosu de Fernando Torres viser plus haut qu’un maintien plus rapidement assuré qu’en 2018 (le club était relégable à cinq journées de la fin l’an passé). Avec un entraîneur Lluis Carreras sans activité depuis septembre 2017, une défense, force numéro un de l’équipe l’an passé (la deuxième du pays derrière le champion !) fortement amoindrie, jusqu’au poste de gardien après le départ de Shūichi Gonda à Portimonense, les interrogations sont bien nombreuses et il est évident qu’el Niño ne pourra pas en être la seule solution. Au point que cette mission du maintien rapidement assuré serait probablement un succès en cas de réussite. Les interrogations sont moins nombreuses du côté du Shonan Bellmare. Le club a décroché la J.League Cup la saison dernière, histoire de clore une belle année qui a permis au promu d’alors de se maintenir. La mission est encore à portée cette année avec un effectif en grande partie conservé quant à son onze type et quelques ajouts offensifs destinés à pallier l’une des carences l’an passé (antépénultième attaque du championnat).
Du côté du Júbilo Iwata, le temps des titres de 1997, 1999 et 2002 est bien loin et la saison passée n’a été sauvée qu’au prix d’une victoire en barrage pour la relégation/promotion face au Tokyo Verdy. On imagine mal un autre scénario cette saison tant le club ne parvient pas à renouveler un effectif vieillissant. Restent enfin les deux promus. Champion de J2, Matsumoto Yamaga va disputer la deuxième saison de son histoire en J1. Qu’espérer donc ? Conserver sa solidité défensive marque de fabrique à l’échelon inférieur l’an passé (la meilleure et de loin) et s’appuyer sur le soutien inconditionnel des supporters parmi les plus fervents du pays pour réussir une mission qui n’avait pas été accomplie lors du dernier et seul passage dans l’élite (seizième place). De son côté, l’autre promu, Oita Trinita, qui a déjà connu l’élite à de multiples reprises mais revient de l’enfer d’une J3 en 2016, a fait le pari inverse pour se hisser en J1 : celui de l’attaque, la meilleure du championnat (76 buts). Le souci, c’est que pour éviter une nouvelle cuillère de bois comme ce fut le cas lors du dernier passage en J1 (deux petites victoires en trente-quatre sorties), il va falloir surtout se muscler défensivement, encore plus quand le club n’était que la quatorzième défense de J2 l’an passé. Ajoutez à celui une intersaison animée par les départs et les arrivées, sans pour autant renforcer les points faibles, la mission s’annonce des plus délicates pour Trinita. Espérons que le représentant de l’île de Kyūshū en 2019 ne vivra pas le même calvaire que celui qu’il remplace à ce niveau.