Première session de la triple fecha des éliminatoires. Si l’Argentine contrôle et affirme son renouveau sur le continent, le Brésil souffre mais poursuit son sans-faute, et l’Équateur reprend sa marche en avant. Un trio qui est le grand gagnant de la soirée alors qu’ailleurs, la tension monte.
La Colombie perd deux points
Par Pierre Gerbeaud
La Colombie pensait avoir fait le plus difficile en ouvrant le score mais elle a fini par laisser échapper deux points précieux dans les dix dernières minutes. Si ce nul est logique au vu du match, il laisse néanmoins un goût amer aux joueurs de Reinaldo Rueda. Avec ce match nul, la Bolivie est toujours dans la course. Si César Farías avait aligné un onze sans surprise au vu des absences, avec notamment un milieu renforcé, Reinaldo Rueda avait lui réservé quelques surprises. On attendait Miguel Borja en pointe, on a finalement eu Roger Martínez, on attendait un milieu là aussi renforcé avec notamment la présence d’Alex Mejía, c’est finalement Juan Fernando Quintero qui a été aligné. Mais entre erreurs techniques, mauvais choix et pelouse compliquée avec un ballon en mode montagne russe, la première période a été pauvre en bien des aspects. Une frappe de loin de Cuadrado contre une frappe de loin de Saavedra. Une frappe au-dessus de Roger Martínez contre une passe en retrait de cinquante mètres de Davinson Sánchez à deux doigts de tromper son propre gardien comme très légers frissons du premier acte. Comme pressenti JuanFer n’avait pas un match entier dans les jambes et n’a pas fait son retour en deuxième période. Pour sa première cape Andrés Andrade a apporté beaucoup plus d’activité et s’est offert la première grosse occasion de ce match mais n’a pas cadré devant le portier bolivien. Plus en jambes, la sélection cafetera a donc pensé faire le plus difficile peu après à vingt minutes de la fin. Sur une action individuelle, Roger Martínez, certainement le meilleur colombien sur le terrain avec Barrios, a trompé Lampe d’un pointu à l’arrache. Avec l’entrée de Gustavo Cuéllar, Rueda a donc délibérément choisi de subir. La fin de match a été un long calvaire avec une équipe bolivienne qui a poussé et a littéralement étouffé son adversaire. C’est donc logiquement que la Verde a égalisé grâce à un but exceptionnel, certainement le but de cette journée. Pas attaqué Fernando Saucedo a ouvert son compteur en sélection d’une frappe exceptionnelle dans la lucarne d’un David Ospina scotché. Profitant d’un Davinson Sánchez fébrile, la Bolivie aurait même plus l’emporter en fin de match sur une action où Carmelo Algarañaz s’est empalé contre le portier cafetero. Le joueur bolivien a reçu son premier avertissement sur cette action avant de mettre un coup de coude sur un ballon aérien presque dans la foulée et donc être expulsé.
L’Équateur sur le fil
Se remettre en marche demande souvent du temps lorsque l’on espère sortir du tunnel. Après sept matchs sans victoire, l’Équateur savait qu’il jouait gros en accueillant le Paraguay à la Casa Blanca de Quito. Un Paraguay qui avait prévenu, il serait là pour priver l’adversaire d’espaces. Et le moins que l’on puisse dire est que le premier acte en a apporté une brillante démonstration. Avec son bloc bas et ne cherchant qu’à exploiter quelques contres, l’Albirroja que l’on avait vu capable d’être si entreprenante lors de la Copa América, a cette fois décidé d’un retour aux sources, voire aux clichés. Face à elle, la bande à Alfaro n’a jamais véritablement trouvé comment s’exprimer, abusant souvent de longs ballons et manquant d’idées, même si le duo Ángel Mena – Byron Castillo se montrait hyperactif. S’il peut évidemment arriver à se tromper dans ses choix et son organisation, un bon entraîneur se voit à la capacité qu’il a à réagir. Et Gustavo Alfaro est un bon entraîneur. Voyant que son système ne fonctionnait pas, l’Argentin a d’abord lancé Gonzalo Plata, la machine à dynamiter les défenses repliées, puis le duo Michael Estrada, pour apporter puissance et vitesse devant, Junior Sornoza, pour créer. Si l’on peut évidemment regretter que les deux derniers ne soient entrés bien trop tard eu égard aux dégâts qu’ils ont causés, l’important et que leur entrée a eu des conséquences. Car l’Équateur a totalement dominé le deuxième acte et n’a cessé d’user une défense guaraníe qui essuyait les vagues des montées des latéraux dans les couloirs et les percussions d’un Plata dans tous les bons coups. Et la délivrance est venu au bout du chronomètre. D’abord sur dédoublement parfait de Pervis Estupiñán, lancé par Sornoza, et qui a déposé le ballon sur la tête de Félix Torres, ensuite sur une merveille de déboulé de Michael Estrada venu rappeler l’immensité de son talent. La Casa Blanca était libérée, l’Équateur reprend sa marche en avant et surtout s’assure de conserver sa troisième place.
L’Argentine déroule
Une troisième place à trois points du champion d’Amérique du Sud. À Caracas, on s’attendait à un attaque-défense entre une Argentine libérée par le titre de juillet dernier et un Venezuela en chantier permanent. Le moins que l’on puisse dire est que le champion a franchi un cap, il gère désormais totalement ses rencontres, sait patienter, varier, contrôler. Il y avait quelques légères différences (trois) dans le choix des hommes qui composaient le onze de départ en comparaison de la finale du Maracanã (entre les suspensions et les choix de Scaloni), mais le système est toujours le même, parfaitement huilé avec deux meneurs Messi-Lo Celso, un double pivot complémentaire De Paul-Guido Rodríguez, une pointe, Lautaro, et un dynamiteur, Di María. Le tout posé dans un 4-4-2 assez flexible, Messi repiquant souvent dans l’axe. Le premier acte a ainsi vu l’Argentine largement dominer, se créant pas moins de cinq occasions franches mais devant attendre une passe géniale de Lo Celso pour Lautaro en toute fin de période pour prendre enfin les devants. Entre temps, le Venezuela a défendu comme il pouvait, souvent à la limite, une limite notamment qu’Adrián Martínez, sur le terrain depuis à peine une dizaine de minutes, passait à un rien de briser la jambe de Leo Messi. L’Albiceleste pouvait alors gérer – n’oublions pas qu’il y a trois matchs à disputer en moins d’une semaine – mais risquait à tout moment l’accident, Yefferson Soteldo venant le rappeler. Alors, Lionel Scaloni envoyait ses Correa, Joaquín et Ángel pliaient l’affaire et permettaient ainsi à l’Argentine de s’imposer sans trembler, préparant au mieux le choc de dimanche face au Brésil.
Le Brésil a eu chaud
Un Brésil qui est loin d’avoir montré un visage d’ogre que son bilan comptable pourrait laisser penser. Au Monumental de Santiago, les hommes de Tite ont fait dans le réalisme et le pragmatisme, laissant de côté toute idée de montrer du jeu. Il faut dire que sous pression sur le plan comptable, le Chili de Lasarte a mis une grande intensité et cherché à étouffer la Seleção, porté notamment par un trio Pulgar-Aranguíz-Vidal totalement maître du milieu. Mais malgré cela, les occasions chiliennes n’ont pas été si nombreuses. Isla et Mena avaient beau ne cesser de débouler dans leur couloir, l’accès aux buts de Weverton était souvent totalement bouché par une défense totalement hermétique. Et lorsque celle-ci était dépassée, le portier de Palmeiras rappelait pourquoi les verts d’Abel Ferreira sont aussi durs à faire tomber notamment lors de l’immense double parade sur le missile de Vidal repoussé sur la tête de Vargas à bout pourtant, elle aussi sortie. Au final, on a vu les mêmes maux que lors de la Copa América côté chilien : dominateur, ayant le ballon, mettant l’intensité, mais se montrant totalement incapable de convertir tout cela en but. La Roja fait tout bien, jusqu’au dernier geste et les changements de Martín Lasarte n’y font rien. La vieille garde, la génération Vidal, tient toujours autant la barraque, est toujours aussi essentielle pour ce Chili, mais les ressources semblent plus que limités, les choix offerts au sélectionneur réduits, comme l’illustre sa volonté d’aller chercher des attaquants aux liens minimes avec le pays. Il est bien là le problème de ce Chili qui ne gagne pas mais qui en plus ne sait pas prendre les points. Car sur un contre, une frappe de Ney repoussée par Bravo, Everton Ribeiro a offert la victoire du sept sur sept au Brésil, la victoire de la septième place pour le Chili qui se retrouve désormais devant deux déplacements périlleux : en Colombie puis au Pérou. Deux déplacements qui pourraient déjà causer bien des dégâts en cas de nouvelle contre-performance.
Pérou et Uruguay se neutralisent
Par Jérôme Lecigne
Match décevant entre les deux équipes avec un Pérou qui jouait déjà la peur au ventre et un Uruguay qui n’a jamais su construire son match. La première mi-temps a été équilibré avec un Uruguay qui a bien débuté, solide, dans le camp de l’adversaire, avant que sur corner Renato Tapia n’ouvre la marque sur un retourné acrobatique détourné dans son propre but par Josema Giménez. Nous sommes alors à la 24e minute et l’on se dit que l’Uruguay va souffrir. Heureusement, dans la foulée, Giorgian De Arrascaeta égalise du gauche dans le petit filet de Gallese sur l’une des rares actions construites du match, sur le côté droit, suite à une bonne récupération de Vecino. Ensuite ? Plus grand-chose. Le Pérou domine le match sans se créer de franches occasions. Les co-équipiers de Guerrero sont pourtant les plus impliqués, à l’image de leur attaquant historique qui prend l’arbitre par l’épaule à deux reprises montrant une certaine tension, mais la peur de bien faire et l’absence d’apport d’une ligne défensive empêche le Pérou de créer du surnombre, et donc de se créer des occasions (les hommes de couloir sont restés bas, on pense à Advincula). C’est le Pérou qui domine malgré tout au milieu de terrain se créant de rares occasions dont une frappe de Yotún facilement arrêtée par Muslera ou une reprise dans la course de Carillo qui a terminé dans le ciel liméen. Dans l’absolu, après son but, le Pérou ne s’est pas non plus procuré de grandes occasions. Pendant ce temps-là, du côté de l’Uruguay, l’effectif est très solide défensivement, avec des bons matchs de Viña, Giménez, et un milieu de terrain Bentancur-Valverde-Vecino intraitable défensivement. Là où le bât blesse est que ce schéma n’a jamais réussi à trouver la profondeur en attaque. Maxi Gómez a touché moins de vingt ballons (Piquerez a fait mieux en moins de quinze minutes…), dont aucun dans une position confortable pour ce joueur dont la conduite de balle n’est pas le point fort. On a vu un peu plus De Arrascaeta (surtout pour son but) et Brian Rodríguez, et encore… Le vide pendant une heure. L’effectif fatiguant, les deux coachs ont fait des changements qui se sont avérés un peu plus payant du côté de l’Uruguay qui se procurer les deux plus grosses occasions du match dans les deux dernières minutes, passant pas très loin du match parfait. Nández voit sa frappe contrée par le dos d’un défenseur au niveau du point de penalty, après une magnifique course alors que le joueur était repositionné au milieu de terrain à la suite de l’entrée de González. Sur le corner, Piquerez est au rebond dans l’axe et envoie une mine sur le poteau gauche d’un Gallese qui n’a pas bougé. Malheureusement pour l’Uruguay, le ballon sort et le match s’arrête sur cette occasion. Le Pérou a joué avec sa peur de dernier du classement et va désormais devoir rattraper le retard lors de la deuxième phase notamment lors des matchs à l’extérieur. L’équipe a pourtant montré des qualités avec un bon match en défense et un Guerrero toujours aussi intenable. Côté Uruguay, c’est mathématiquement un bon point au vu des résultats de la journée et de l’adversaire : l’Uruguay avait par exemple perdu au Pérou lors des derniers éliminatoires. Mais le match laisse malgré tout plus de questions que de réponses, avec les mêmes maux depuis un an et le début de la campagne des éliminatoires : une défense solide, la troisième des éliminatoires, avec une vraie assise et des nouveaux joueurs qui s’imposent comme Viña, mais une attaque inoffensive, quel que soit le joueur en pointe. Il y a un vrai problème d’animation et de transition offensive que n’ont pas réussi à résoudre hier ni De Arrascaeta, ni Valverde, ni Rodríguez. Et venu s’ajouter à cela hier un manque dans le combat au milieu, pour tenter de presser plus haut et plus efficacement : le Pérou a récupéré un nombre incalculable de ballon en deuxième mi-temps notamment. Dans ce stade (même si le stade a été reconstruit depuis) qui a vu naître la légende de la Garra Charrúa en 1935 de la plume de Diego Lucero, l’Uruguay a semblé subir, subir, subir. L’avantage pour l’Uruguay est que l’attendent désormais deux matchs à domicile : Bolivie et Équateur. Ce sera le moment clé de la campagne : l’Uruguay avait bâti sa qualification en 2018 sur les victoires à domicile. Deux victoires, et le point au Pérou sera un magnifique point, de ces points à l’extérieur qui assure la qualification. Tout autre résultat condamnera l’Uruguay à devoir continuer à se battre jusqu’au bout, sachant que la journée de qualification d’octobre inclura deux déplacements : en Argentine et au Brésil.
Classement




