Il aura fallu attendre 27 ans. 27 ans à rester dans l’ombre du football sud-américain, 27 ans de drames, de joies éphémères et de désillusions. Mais l’attente n’aura pas été vaine, pour la deuxième fois de son histoire l’Atlético Nacional remporte la Copa Libertadores. Une première au pays.

27 ans

Pour la septième fois de son histoire, la Copa Libertadores se jouait sans argentin ni brésilien. Après avoir décroché son premier titre un soir de mai 1989 au Campín de Bogotá, l’Atlético Nacional retrouvait son Atanasio Girardot pour tenter de réécrire l’histoire face à la sensation Independiente del Valle. Sur la feuille de match, aucune surprise de part et d’autre, si ce n’est le retour de Guerra au milieu côté Verdolaga. Pour les Negriazules, José Angulo était présent, le duel des 4-2-3-1 pouvait débuter.

D’entrée de match les Verdolagas de Rueda se montraient dangereux. Sur le coup d’envoi, Miguel Borja était lancé en profondeur et se présentait seul face à Azcona. Malheureusement pour le peuple vert et blanc, leur pointe n’avait pas encore réglé la mire et envoyait son ballon dans le ciel de Medellín. Ce n’était que partie remise. Daniel Bocanegra inquiétait aussi l’arrière garde équatorienne et quelques minutes plus tard, la pression était trop forte, Macnelly Torres envoyait un coup franc longue distance sur le poteau, Borja prenait le rebond, l’Atanasio Girardot pouvait exploser. Les Negriazules étaient sans réaction, ne parvenaient à imposer quelque pressing et laissaient le ballon aux Colombiens qui passaient alors en mode gestion même s’il se faisait aussi parfois peur comme lorsque le magnifique José Angulo avait l’opportunité d’éteindre l’Atanasio Girardot mais manquait le cadre alors qu’il était seul face à Armani après un amour de service de Sornoza.

Il fallait attendre le début du second acte pour voir enfin les joueurs de Repetto aller tenter de changer le cours de l’histoire. Malheureusement pour eux, le piège s’était refermé, la machine à contre Verdolaga fonctionnait parfaitement et Berrío puis Borja passaient près de tuer définitivement le match. Toujours aussi intelligent tactiquement et fluide collectivement, l’Atlético Nacional gardait le contrôle des meilleures occasions à l’image de cette énorme occasion suite à une ouverture de Torres pour Moreno qui voyait sa tête fuir le cadre ou encore des autres tentatives de la menace permanente Borja qu’Azcona parvenait à repousser. Le score n’évoluait alors plus, l’Atlético Nacional décroche sa deuxième Libertadores 27 ans après la première, il devient aussi le premier club colombien double vainqueur de l’épreuve. L’Atanasio Girardot pouvait alors basculer dans la folie heureuse.

Photo : RAUL ARBOLEDA/AFP/Getty Images

Le triomphe de la méthode Rueda

A l’heure de la présentation d’avant tournoi, l’Atlético Nacional faisait partie de nos favoris. C’est dire si le succès des Verdolagas n’est finalement pas une surprise en soi. Il faut dire que depuis le départ de Juan Carlos Osorio, l’homme qui a bâti ce nouvel Atlético Nacional, lui donnant une expérience et une crédibilité continentale notamment lors d’une campagne de Sudamericana perdue au Monumental (lire Sudamericana : River écrase la finale), le club de Medellín a installé sur son banc l’homme de la situation : Reinaldo Rueda. Car le parcours du coach colombien résume sa principale qualité, celle d’un bâtisseur. Que ce soit avec les u20 colombiens, avec parmi eux un certain Macnelly Torres, devenu chef d’orchestre de cet Atlético Nacional ou avec le Honduras puis surtout l’Equateur, qu’il a replacé sur la carte et remis dans le droit chemin, la règle a toujours été la même, un savant mélange de chance donnée aux jeunes, un groupe quasi inchangé et surtout une grande discipline tactique. Dans une équipe déjà en confiance, les résultats ne se sont pas fait attendre. On a ainsi vu émerger les jeunes, à l’image de l’astre Marlos Moreno ou des excellents Davinson Sánchez et Sebastián Pérez, on a aussi vu une équipe invariable dans les grands rendez-vous, à la stratégie immuable, son 4-2-3-1 mélangeant rigueur défensive et explosivité offensive, qu’importe les modifications liées au marché des transferts, toujours parfaitement gérés par du poste pour poste, qualités pour qualités. Avec Rueda, l’Atlético Nacional se caractérise par son intelligence, sa capacité à dicter le tempo d’un match, sait quand il faut accélérer, grâce notamment à ses flèches offensives au profil choisi sur la vitesse et la capacité de perforation, sait quand il faut marquer une pause, grâce à un milieu de terrain intelligent, capable de conserver un ballon et lui permettre de ralentir. La pression haute à outrance n’est pas pour les Verdolagas, ils lui préfèrent la gestion des temps, la maîtrise et la sérénité collective qu’un groupe qui se connait parfaitement peut offrir. Et ça paye.

Après un parcours sans faute et sans buts concédés au premier tour, l’Atlético Nacional a alors poursuivi sa longue marche en avant, le rouleau compresseur écrasant tout sur son passage dans son Atanasio Girardo. Jusqu’au triomphe de la nuit dernière, celui qui vient boucler un cycle parfait initié par le coach colombien aujourd’hui annoncé sur le départ. La victoire de l’Atlético Nacional de Rueda marque le retour du football colombien au premier plan, il est aussi et surtout le sacre de l’intelligence au service du football.

Feuille de match

 
Atlético Nacional 1 – 0 Independiente del Valle

Copa Libertadores 2016 – Finale retour

Estadio Atanasio Girardot

But : Miguel Borja (8)

Arbitre : Néstor Pitana

Avertissements : Mario Rizotto, Alejandro Guerra, Junior Sornoza, Miguel Borja

Formations :

Atlético Nacional : Franco Armani; Daniel Bocanegra, Dávinson Sánchez, Alexis Henríquez, Farid Díaz; Alexander Mejía, Alejandro Guerra (m.88, Diego Arias), Orlando Berrío, Macnelly Torres; Marlos Moreno (m.76, Andrés Ibarguen), Miguel Borja (m.79, Ezequiel Rescaldani). Entraîneur : Reinaldo Rueda.

Independiente del Valle : Librado Azcona; Cristian Núñez, Arturo Mina, Luis Caicedo, Emiliano Tellechea (m.88, Jéfferson Orejuela), Mario Rizotto, Julio Angulo (m.71, Miller Castillo) Jonathan González, Junior Sornoza (m.46: Jonny Uchuari), Bryan Cabezas; José Angulo. Entraîneur : Pablo Repetto.

Photo une : LUIS ACOSTA/AFP/Getty Images

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.