Une journée étrange ce week-end en Uruguay, ou on a beaucoup parlé du week-end suivant, du clasico. Peñarol gagne facilement contre Villa Teresa, alors que le Nacional perd deux points contre un très bon Racing. Derrière, le Cerro continue sa remontée fantastique alors que les bohemios du Wanderers et le River de Carrasco calent. Voici le compte rendu du championnat le plus divertissant parmi les pays ayant gagnés une coupe du monde (d’après Sergio Gorzy, commentateur local).
Peñarol 4 – 1 Villa Teresa
Que dire ? Peñarol a gagné le match qu’il devait gagner contre l’équipe face à laquelle il n’avait pas le droit de perdre. Les carboneros étaient premier ex aequo, à égalité avec le Nacional, avant cette journée. Mais le Nacional avait perdu deux points précieux samedi soir, et Peñarol connaissait ce résultat avant de jouer. L’occasion était donc belle de prendre la main avant le Clasico. En face, pas grand-chose. Villa Teresa est une charmante équipe de quartier, du « barrio » de Nuevo Paris pour être précis. Mais plutôt tendance Paris saison 2007 que Paris version Qatari. L’équipe passe sa première saison parmi l’élite, doit jouer ses matchs dans le stade Nasazzi qu’elle loue. Et forcement, ils se trainent à la dernière place du classement, non seulement dernier, mais avec déjà six points de retard sur l’avant dernier. Bref, ils doivent profiter de chaque match parmi l’élite, car ils n’y resteront pas. A noter malgré tout que l’entraineur de Villa Teresa, Vito Beato, vient d’enchaîner 8 saisons avec le club du quartier dans lequel il est né. Il est entraineur depuis près de 240 matchs. Et cela mérite le respect, malgré cette saison forcément très compliquée. Sa tristesse est terrible sur le banc.
Le match commence malgré tout sur un rythme équilibré, avec une équipe de Peñarol qui joue à nouveau en 4-3-3, comme en début de saison, avec Ifran en pointe. Les carboneros se procurent les premières occasions, avec deux beaux arrêts dans les vingt premières minutes de Betancur, le gardien de Villa Teresa. Mais à la 27ème, sur un corner tiré par Forlàn côté droit, Valdez reprend le ballon de la tête et à ras du sol. La balle termine entre les jambes du joueur qui gardait le premier poteau, pour l’ouverture du score. Les lacunes défensives sont assez criantes, Valdez s’allongeant presque au six mètres pour reprendre le ballon. Il a beaucoup d’espace, beaucoup trop. Par la suite, Villa Teresa va avoir trois occasions claires d’égaliser, notamment par Martiñones, le meilleur joueur de l’équipe. Mais le ballon est par deux fois arrêté par Gurruceaga, très bon sur sa ligne. L’équipe de Vito Beato manque de chance car, entre la trentième et la mi-temps, Villa Teresa domine, et mériterait mieux. Mais Peñarol rentre au vestiaire avec l’avantage au score conservé. Au retour des vestiaires, les carboneros reprennent leur marche en avant. A la 49ème, Forlàn centre, le ballon est légèrement dévié par Zalayeta et finit dans les pieds d’Ifran qui reprend de volée pour le 2 à 0. Le match est définitivement plié dans la foulée, puisque 3 minutes plus tard, le même Forlàn est à la réception d’un magnifique centre d’Aguiar pour le 3-0. Il reprend bien le ballon de volée pour l’envoyer dans le petit filet. Un très joli but. Par la suite, les joueurs de Nuevo Paris réduiront bien la marque sur une frappe très lointaine d’Arguiñarena, sur laquelle Gurruceaga se fait surprendre. Mais Palacios clôt la marque à la 80ème sur un nouveau corner de… Forlàn. Ce dernier fait encore un match complet avec un but, deux passes décisives. Il est impliqué sur les quatre buts.
Il ne faut pas voir dans ce match beaucoup d’enseignements. Le plus important pour Peñarol était de ne pas se faire peur, de ne pas avoir de suspendu, et de prendre les trois points. Mission accompli. Le milieu a encore été très bon. Nandez et Pirìz travaillent très bien ensemble, et stabilisent grandement l’équipe. Forlàn a encore été sensationnel, Zalayeta a été plus transparent. Côté Villa Teresa, le gardien Betancur a fait de bons arrêts et a évité le pire. Martiñones est très actif mais aussi très maladroit, comme beaucoup de ses coéquipiers qui veulent bien faire, mais ne peuvent pas.
Homme du match : Le duo Aguiar – Forlàn, qui a régalé pendant tout le match. Deux joueurs magnifiques.
Diego Forlàn faisant le P de Paz Cardoso, sa compagne.
Racing 2 – 2 Nacional
Le Racing fait partie des équipes en forme en ce moment, invaincue sur les cinq derniers matchs. Une équipe rugueuse, avec un très bon milieu de terrain (évoluant en 4-5-1), mais souvent maladroite devant le but. Malgré tout, une équipe à la portée du Nacional. Surtout qu’il était important pour les bolsos de se rassurer suite à la défaite surprise mais logique contre Sud America. Pas d’absence notable hormis Fucile côté Nacional, qui évolue encore en 4-4-2 avec Fernandez et Alonso en pointe.
Le début du match est d’ailleurs en faveur des joueurs du Nacional. Amaral a un premier un contre un face au gardien au quart d’heure de jeu, mais le ballon passe très légèrement à droite du but gardé par Contreras. Dans la foulée, sur un ballon rapidement joué vers l’avant par Polenta, Ivan Alonso remet le ballon en retrait sur Fernandez, mais sa frappe du droit s’écrase contre le poteau. Le Nacional a donc les meilleures occasions, mais le jeu est très peu construit des deux côtés. Les deux formations jouent en contre, rapidement vers l’avant, et Ramiz côté Racing a aussi plusieurs ballons chauds. Le Nacional ne semble pas contrôlé le match, comme ils pouvaient le faire il y a de cela quelques journées. A la 36ème, Santiago Romero récupère un bon ballon au 40 mètres du but adverse. Il le passe à Ivan Alonso qui lui remet parfaitement dans la course pour le but du 1 à 0. Les joueurs ont l’air presque soulagé de marquer ce but. Romero, très bon récupérateur de métier, a eu le mérite de continuer son action jusqu’au bout. Juste avant la mi-temps, Alonso manque une tête au six mètres qui aurait pu donner un avantage plus grand au Nacional avant la pause. Finalement, à la 50ème, c’est Sébastian Fernandez qui se retrouve en 1 contre 1 sur un contre rondement mené par Espino. Il trompe le gardien d’un ballon à ras du sol, et l’on pense alors que le Nacional a fait le plus dure. Mais dès la 57ème, sur un corner cafouillé, Franco Romero trompe Conde d’une frappe au 6 mètres imparable. Romero, latéral droit, marque ainsi son premier but en première division. Ostolaza effectue alors plusieurs changements pour le Racing, passant d’un 4-5-1 conservateur à un 4-3-3 offensif, avec notamment l’entrée de Liber Quiñones, meilleur buteur de l’histoire du club. En face, Munùa ne fait rien, ne change pas ses plans, malgré les nombreuses occasions adverses. Amaral a bien l’occasion de creuser de nouveau l’avantage, mais, seul à 10 mètres du but, il tape à côté du ballon… Malgré cela, les milieux du Racing, notamment Dudok, commencent à récupérer les ballons de plus en plus haut. A la 78ème, Ramis tape le montant sur une belle frappe à l’entrée de la surface. Et finalement, à la 81ème, Liber Quiñones frappe des 16 mètres et le ballon vient se loger dans le petit filet opposé pour l’égalisation. Le Nacional ne pourra pas réagir, avec, en plus, un Abreu clairement énervé de ne pas avoir pu rentrer à la fin du match, Munùa n’effectuant pas son troisième changement.
Côté Racing, Ramis, seul en pointe a couru tout le match sans grand succès. Les buts sont venus d’un très bon milieu de terrain, avec notamment Dudok très actif au milieu récupérant de très nombreux ballons. Les rentrants ont été très bons et ont apporté beaucoup en fin de match, que ce soit Quiñones ou Ezquerra. C’est tout l’inverse côté Nacional. L’équipe a mieux débuté mais n’a pas su changer de vitesse. Amaral a loupé des actions simples, Ivan Alonso a semblé plus effacé (c’est souvent le cas depuis qu’il partage la pointe avec Fernandez). La défense a encore été en retard à de nombreuses reprises, surtout Espino. Deux éléments sont particulièrement dérangeants: le manque de réaction de Munùa et le fait que l’adversaire puisse facilement faire déjouer le Nacional. Avec cinq points perdus en deux journées, ils viennent de passer de favori à outsider.
Portrait du joueur de la semaine : Ernesto Dudok, joueur de football
Il joue depuis toujours au Racing, malgré ses 28 ans, et il y passe son temps à protéger sa défense. Au vu des images, on pourrait croire qu’il a 40 ans, comme un ouvrier de chantier vieillit par sa tâche. Il ne joue pas pour marquer (1 but en 120 matchs), il ne joue pas à protéger son but, non, il joue pour les autres, pour aider ses défenseurs, et pour passer de bons ballons. J’ai cherché pendant plusieurs dizaines de minute une interview, je n’en ai pas trouvé. Ernesto Dudok, ne doit beaucoup aimer parler. Sans tatouage, probablement marié à son amour de jeunesse, vivant dans la maison à côté de celle de ses parents. Et il continuera pendant des années, dans l’ombre, à aider les autres.
River Plate 2 – 3 Rentistas
Mais quelle mouche a donc piqué JR Carrasco ? Son équipe gagnait tout, jouait de façon formidable, collective, tout en passe. Ils ont été jusqu’à battre 4-0 Peñarol au Centenario. Et cela n’est pas commun ! Et depuis deux journées, Carrasco a décidé que c’était donc trop facile, qu’il fallait s’ajouter un handicap. Et il a donc décidé de se passer de Michael Santos et également de passer à une défense à 3… De son côté, Rentistas avait le plus grand mal à gagner un match. Comme nous l’avions vu contre le Peñarol, ils ont de bons joueurs, mais parfois un léger manque de chance. Au classement de la descente, ils sont avant derniers, devant Villa Teresa. Si Liverpool et Colonia se décident à gagner quelques matchs, cela va rapidement être très compliqué pour eux. Leur entraîneur, Villazan, était donc logiquement en danger, l’équipe n’ayant plus gagné depuis le 2 septembre.
River Plate domine d’ailleurs le début du match, avec un très bon Alaniz qui apporte beaucoup de vitesse en attaque sur son côté gauche. Santiago Martinez réveille malgré tous les bichos d’une magnifique frappe qui oblige le gardien darseneros à une magnifique parade. Le score reste vierge jusqu’à la 45ème minute, durant laquelle Alaniz obtient un penalty généreux, le défenseur ayant bien taclé le ballon, avant d’embarquer l’attaquant dans son tacle. Santiago Garcia, meilleur buteur du championnat, convertit le penalty en deux temps suite à un bon arrêt du gardien. River Plate a donc l’avantage à la mi-temps, mais les bichos égalisent dès la reprise par Erick Cabaco sur corner. Il reprend bien un ballon à l’entrée de la surface repoussé suite à un corner. Ce défenseur, dont je vous ai déjà parlé et vraiment très bon, très présent aussi sur coups de pied arrêtés. Cela ne l’empêchera pas dans la foulée de faire une énorme bêtise, puisqu’il ne se replie pas assez vite sur le coup d’envoi et Alaniz redonne l’avantage immédiatement à River, sur un centre venue de la droite mal géré par la défense. Le match se complique encore pour les bichos colorados puisque Sebastian Ramirez se fait exclure à l’heure de jeu sur un coup de coude d’énervement très stupide. Par chance pour lui, le fait de jouer à 10 ne semble pas déranger Rentistas et ce sont toujours eux qui se procurent les meilleures occasions. A la 65ème, Coccaro, qui vient de rentrer, reprend du plat du pied un centre venu de la gauche pour l’égalisation. Tous les ballons dangereux sont venus de la gauche, couloir de Gonzalez, Terrans et Soria côté Rentistas, et de …personne côté River Plate. Les trois défenseurs centraux ont joué beaucoup trop regroupé et ont laissé beaucoup d’espace dans les deux couloirs. A la surprise générale mais dans le sens du jeu, Mastriani marque même le but de l’avantage à la 81ème. La défense, notamment Ale, est encore absente, désarticulé.
Victoire extrêmement importante pour Rentistas qui se relance. Le côté gauche a été très bon, mais l’attaque a aussi été très remuante, notamment Mastriani. Cabaco, en infériorité numérique, à « tenu la baraque ». Il faut espérer que ce joueur précieux reste dans le championnat après janvier. Côté River Plate, JR Carrasco n’aime pas les stars et les individualités dans ses équipes, et il passe donc son temps à les mettre sur le banc, au second plan. Qu’il aille entrainer Alto Peru en troisième division, il n’aura plus de problème de star. Alaniz a surnagé en attaque, le milieu a systématiquement été sauté par la défense qui était sous pression et qui ne pouvait relancer proprement. Ale et Ronaldo en défense ont été mauvais. Ou peut-être, pour être plus juste particulièrement perdus.
Homme du match : David Terrans, milieu gauche, tous les ballons sont passés par lui.
Ailleurs
Fenix 0 - 0 Plaza Colonia : seul match sans but de la journée, l’attaque du Fenix a souffert de la suspension de Cavallini et de la blessure de Liguera.
Sud America 1 – 0 Wanderers : Deuxième victoire d’affilée pour la IASA, qui bat le troisième après avoir battu le leader. Les Wanderers continuent à jouer en courant alternatif.
Defensor 4 – 1 Juventud de Las Piedras : Eliminé cette semaine de Copa Sudamerica, le Defensor se réveille avec 4 buts lors de cette victoire à domicile. Gros match ponctué par un magnifique but de Felipe Rodriguez.
Danubio 4 – 0 Liverpool : L’équipe qui avait le plus déçu en ce début de saison semble finalement se réveiller, avec cette large victoire contre Liverpool. Deux très jolis de Barreto, notamment le deuxième.
El Tanque Sisley 2 – 3 Cerro : L’équipe de la Villa continue son parcours fantastique, désormais troisième au classement.
L’affiche de la prochaine journée
Plaza Colonia contre Sud America? Ou le magnifique Cerro – Defensor de samedi, importantissime pour la troisième place?
Et non, week-end de clasico, week-end de folie. Dimanche 20h, heure française, le Gran Parque Central sera en feu pour le match qui décidera sans doute du vainqueur de l’Apertura. Rendez-vous dans le courant de la semaine pour un article spécial avec les forces en présence et les statistiques.
Pour le reste
L’assemblée des socios du Nacional a voté l’agrandissement du Gran Parque Central. Pendant longtemps, le Nacional a eu le meilleur stade de club en Uruguay, ce ne sera plus le cas avec l’Estadio Peñarol dès janvier.
Les buts
Résultats
Classement