Certains les avaient enterrés, d’autres attendaient énormément d’eux. L’année 2015 aura débuté dans les hésitations et le chaos et se termine dans l’espoir et la confirmation, celle que l’Uruguay comme toute grande nation du continent ne meurt jamais. Bilan de l’année.

Sélection : le retour au premier plan

Si un jour vous rencontrez des supporters de la Celeste uruguayenne, vous serez frappés par leur impressionnante lucidité lorsqu’il s’agit d’évoquer la sélection. Rencontrés dans les stades chiliens lors d’après-midis de Copa América (lire Troisième jour : un champion poussif et La porte de l'ennui), ceux-ci rappelaient à qui le voulait à quel point il faudrait se montrer patient avec une sélection privée de sa star Luis Suárez et désormais en pleine phase de reconstruction. Malgré un quart de finale perdu sur le fil face au futur vainqueur (lire A un doigt du désastre), la presse locale allait aussi appeler à la patience après une défaite en amical face au Costa Rica. Cette impressionnante lucidité paye. Car en laissant le Maestro Tabárez travailler dans les meilleures conditions possibles, l’Uruguay a récolté les fruits de ce travail. Victoire en Bolivie pour ouvrir la campagne de qualification (lire Coupe du Monde 2018 – Zone CONMEBOL : Argentine et Brésil au tapis), deux leçons données à la Colombie (lire Coupe du Monde 2018 : la folie Chili, l’Equateur et l’Uruguay confirment) et surtout face au Chili (lire Coupe du Monde 2018 : l’Argentine se relance, l’Uruguay prend sa revanche), il n’y aura guère que l’Equateur pour profiter d’un match que la Celeste a perdu toute seule pour priver la bande à Tabárez du sans-faute. Le tout donc sans la star Suárez dont le retour laisse espérer des lendemains encore plus bleus. 2015 aura ainsi débuté sur la pointe des pieds mais une fois encore, l’Uruguay a signé son retour.

Compétitions continentales : occasions manquées

S’il est un point où le bât blesse, c’est bien les compétitions de clubs. Après la demi-finale de Libertadores l’an passé (lire Defensor Sporting 1 - 0 Nacional), le Defensor a bien failli refaire le même coup en Sudamericana cette année, tombant cette fois-ci en quarts pour un petit but face au futur finaliste Huracán (lire Copa Sudamericana 2015 : River sur le fil, Santa Fe en patron). Et une fois encore, la Violeta aura été l’auteur du meilleur parcours. Car entre l’élimination dès le tour préliminaire du Nacional en Libertadores, la dernière place de Danubio dans son groupe (certes le plus relevé de l’édition 2015) et malgré l’élimination sur le fil en huitième des Wanderers, le bilan uruguayen est encore une fois bien maigre. En Sudamericana, le Defensor s’est en effet retrouvé seul dès les huitièmes, le Nacional tombant face à Santa Fe après un match aller totalement raté, Juventud s’inclinant sans perdre en Equateur face à Emelec alors que Danubio n’avait pas franchi l’obstacle Católica au premier tour. Une chose ne change donc pas en 2015, l’Uruguay continue de souffrir sur le plan continental.

Championnat : le retour des géants

On se souvient de la formidable saison 2013/2014 conclue par l’exceptionnel Danubio – Wanderers (lire Uruguay : Danubio au bout de la folie), 2015 aura été l’année du retour à la normalité avec Nacional et Peñarol occupant les premiers rôles. Le Bolso s’est adjugé l’Apertura 2014 avant de voir son meilleur ennemi s’offrir une finale pour le titre lors du Clausura 2015 (lire Uruguay – Clausura 2015 : Vers un mois de Juin de feu), finale qui aura tourné au chaos total, la rencontre n’allant même pas au bout de la prolongation et laissant ainsi le Nacional célébrer un titre dans une atmosphère assez pourrie (lire Uruguay - Clausura 2015 : le Nacional champion dans le chaos).

Au départ de la saison 2015/2016, on aura ainsi pris les même et recommencé. Nacional et Peñarol se sont offert un joli duel au sommet de l’Apertura 2015 même si la sensation Cerro, qui luttait encore pour le maintien il n’y a pas si longtemps, aura offert une belle résistance. Finalement, la deuxième moitié de 2015 aura rétabli la logique des choses au pays, les Danubio, Defensor et autres Wanderers, aux moyens plus limités, ne parvenant pas à conserver leurs meilleurs éléments plus d’une saison et devant se contraindre à remettre le bleu de chauffe.

Les joueurs

Comment ne pas évoquer deux légendes uruguayennes au moment de dresser le bilan de l’année 2015. Au moment où celle du Bolso, Álvaro Recoba, devenu joker de luxe, tirait sa révérence, celle de Peñarol, Diego Forlán faisait son retour au pays et exauçait le rêve de son père en revêtant le maillot de Peñarol (lire Diego Forlán, une histoire de famille pour faire revivre Peñarol). Conséquence directe, les Carboneros ont retrouvé un titre, non sans mal, Cachavacha se muant en meneur de jeu avec toute la classe qui le caractérise. A ses côtés, si Zalayeta a longtemps trainé sa peine, plusieurs carboneros ont convaincu et seront dans notre onze. Côté Nacional, Santiago Romero a souvent joué le rôle de l’homme clé, Iván Alonso est éternel. Mais comme souvent, les belles surprises sont ailleurs. Parmi ceux qui n’entreront pas dans notre onze type, citons Michael Santos, la belle surprise de River qui est depuis devenu international et a connu un Apertura bien particulier, se retrouvant parfois puni par la spéciale JR Carrasco (comprendre « si tu fais plus parler que moi, tu ne joues plus ») Fernando Arismendi, excellent dans le couloir droit de Sud América, le pendant côté gauche de Fenix Maximiliano Pérez ou encore Kevin Ramírez, efficace avec les Wanderers alors que chez les jeunes pépites, on aura particulièrement aimé Brian Lozano, magnifique maître à jouer du Defensor malheureusement déjà parti céder aux sirènes mexicaines (il a rejoint América).

Reste donc l’exercice (périlleux) du onze idéal. Dans les buts, la révélation du tournoi et probable futur gardien de la sélection, Gastón Guruceaga impressionnant du haut de ses 20 printemps. Devant lui, la belle révélation Agustín Sant'Anna et son coéquipier Nicolás Correa, l’un des tauliers et homme clé dans le beau tournoi du Cerro, associé à Diego Polenta du Nacional alors que l’aile gauche est confiée à un autre joueur du Cerro, Lucas Hernández. Au milieu, l’un des futurs grands de la sélection, Nahitan Nández s’occupera de la récupération pendant que la belle découverte de Plaza Colonia, Nicolás Dibble prendra le couloir droit, Luis Aguiar le gauche et Gonzalo Ramos du Cerro épaulera l’inévitable Diego Forlán à la baguette. Devant, un seul homme, Santiago Garcia, buteur de River qui devrait s’envoler pour l’Argentine d’ici quelques jours. Pour encadrer tout cela, le choix était délicat : entre Bengoechea constamment sous pression, JR Carrasco qui, aussi borné et ingérable soit-il, continue de faire un vrai travail à River et Eduardo Acevedo qui a conduit la sensation Cerro au podium. On choisira la facilité et le titré en offrant ce onze à Pablo Bengoechea.

2016, l’année de l’Uruguay ?

De la construction de l’Estadio Peñarol qui touche au but, le peuple Carbonero se préparant à entrer dans sa nouvelle maison dans le courant du premier trimestre à la Copa América Centenario, l’année 2016 est celle de tous les espoirs en Uruguay. Espoirs de parcours digne de sa légende en Libertadores pour l’ambitieux Peñarol, espoirs de revanche aux Etats-Unis pour l’Uruguay qui aura en plus l’occasion de pouvoir enfin compter sur Luis Suárez pour terroriser davantage le continent pendant la campagne de qualification. Les signes ne trompent pas, 2016 pourrait bien être une nouvelle année Celeste.

2016, l’année de l’Uruguay ?

 
Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.