Après plusieurs semaines de débat, le clásico s’est finalement joué au Campeón del Siglo sans supporter de Nacional et restera donc dans l’histoire comme le premier joué sans supporter d’une des deux équipes. Peñarol l’a emporté au terme d’un match maîtrisé et continue donc son chemin en tête du classement.

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Les négociations ont duré toute la semaine. Le ministère des sports voulait que le match se joue au Centenario à une autre date (il était pris ce week-end pour des concerts), mais les clubs ont refusé de la bouger. Peñarol a donc décidé de plein droit de le jouer au CDS et a offert quatre-cents places à son adversaire de toujours, qui a préféré dire qu’il ne laisserait pas entrer de supporter de Peñarol au retour. Au bout du compte, Peñarol a donc accueilli Nacional sans ses supporters, dans un stade plein à craquer (pas besoin de « poumon » entre les supporters). Le choix du Centenario écarté, il s’agissait sans doute de la meilleure option, pour que le stade puisse être une fête avec ses couleurs et des enfants en tribunes. Peñarol abordait le match dans la position étrange de l’équipe première au classement… mais ayant perdu son dernier match, alors que Nacional était derrière mais venait de gagner largement à domicile. Alfredo Arias pouvait compter sur une équipe « type », avec notamment Arezo en pointe de retour de la tournée de la Celeste en Asie ou encore Leo Coelho de retour de blessure en défense centrale. Sur les côtés en attaque, Méndez était à nouveau titulaire côté gauche tout comme Nacho Laquintana côté droit, lui qui est considéré comme « l’homme des clásicos ». En face, le Nacional de Gutiérrez reprenait la même recette que contre River avec une équipe sans pointe, laissant Gigliotti et Ramírez sur le banc. En attaque, l’équipe joue avec plusieurs milieux offensifs dont Pereiro, Fagúndez et Federico Martínez. L’équipe peut aussi compter sur le retour de Rochet de la tournée asiatique.

Rapidement, Peñarol va prendre le contrôle de la rencontre avec du bon dans le cœur du jeu, mais aussi de bons débordements sur les côtés. Les courses de Laquintana font mal et il offre quelques premières cartouches à Arezo qui frappe à côté. Nacional joue en contre mais n’arrive pas, en première mi-temps, à s’offrir des occasions. À l’inverse, le Bolso reçoit trois cartons jaunes pour avoir arrêté des attaques, pliant devant la vitesse des attaquants de Peñarol. Les Carboneros prennent de vitesse mais n’arrivent pas à concrétiser en occasions, 0-0 à la pause. Au retour des vestiaires, Nacional se procurer la plus belle occasion du match sur une très belle course de Pereiro qui casse la ligne du milieu. Il décale sur Fagúndez qui remet (mal) à gauche vers Martínez mais l’ex-Liverpool reçoit le ballon derrière et sa frappe molle meurt sur le poteau. C’est le moment où Nacional aurait pu plier le match, c’est aussi sans doute la seule action sur laquelle le Bolso a fait ce que son entraîneur avait en tête avec un jeu en triangle à base de passes rapides. Après cette action, la dernière demi-heure n’est que Peñarol, notamment quand Gutiérrez fait entrer Gigliotti et Trezza. Arezo monte en température et torture la défense. Peñarol arrive à combiner. Sur un ballon bien négocié par Cristoforo et sur une belle remise d’Arezo dos au but, Milans est trouvé dans la profondeur. Son centre en retrait depuis la ligne de but trouve Kevin Méndez qui n’a plus qu’à tromper Rochet de prés. Un but dans le jeu, face à une défense repliée. Peu avant la fin du match, Peñarol double la mise sur une passe de l’entrant Rodrigo Saravia, Arezo laisse passer à raison et Laquintana n’a plus qu’à tromper Rochet d’une belle frappe dans la surface face au gardien. Score final 2-0, belle et logique victoire de Peñarol. Les quelques échanges d’amabilités en fin de match entre les deux équipes restent anecdotiques.

Nacional se cherche encore et la première victoire de Gutiérrez était en trompe l’œil. L’équipe a perdu beaucoup de joueurs entre les départs et les blessures au milieu, surtout à la récupération, et cela se sent. Le retour de Ginella devrait faire du bien, mais il n’était pas encore remis. Les attaquants ont peu de ballon, Pereiro ou Martínez semblent ne pas savoir sur quel pied danser. La défense a souffert et aurait pu plier plus tôt si Peñarol avait été plus inspiré. Côté Peñarol, l’équipe a fait un bon match avec quelques joueurs qui s’imposent comme le jeune Milans côté droit en défense ou Homenchenko au milieu. Pour le reste, Arias et les dirigeants ont fait du bon boulot avec des joueurs très haut de gamme comme Coelho ou Arezo, qui sont un niveau au-dessus par rapport à leurs coéquipiers. Laquintana a marqué et fait un bon match, prouvant encore que Nacional n’aime pas sa vitesse. Il a été transféré le lendemain à un club de São Paulo, le championnat brésilien se transformant petit à petit en sorte de championnat anglais de l’Amérique du Sud, avec ses équipes ayant trop d’argent qui le dépensent n’importe comment en achetant n’importe qui à n’importe quel prix. On souhaite au Brésil le même succès qu’ont eu les sélections anglaises avec cette politique.

Pour le reste, Cerro Largo a battu Liverpool et le match de fin de semaine entre Cerro Largo et Peñarol semble déjà capital pour l’Apertura. Defensor et Wanderers ont aussi gagné et s’intercalent entre Peñarol et Nacional. Derrière, Torque bat Plaza dans un match pour la descente. Plaza s’enfonce dans la zone rouge alors que Torque en sort.

Résultats et classement

 

Photo une : DANTE FERNANDEZ/AFP via Getty Images

Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba