C’est l’histoire d’un enfant doué qui a toujours rêvé d’une seule chose, devenir professionnel. Doté d’un talent inouï, le petit Sergio Diaz est devenu mieux que cela, il est un accélérateur de temps. Portrait de la nouvelle pépite du Real Madrid.

Cinq matchs pour trouver sa place

Né à Itauguá, c’est à l’âge de huit ans que le petit Sergio demande à son papa de l’inscrire dans un club de foot. Ils choisissent alors Tacuary, Francisco Martínez son premier entraîneur va alors mettre cinq matchs pour lui trouver sa véritable position sur le terrain : « Je l’ai mis défenseur central mais comme il marquait beaucoup de buts, je l’ai fait passer en huit. Là encore, comme il maîtrisait le ballon, je l’ai alors positionné en 10. La première année où il fut avec nous, nous avons terminé champions. » L’histoire du niño maravilla sauce paraguayenne ne fait que débuter, elle s’écrira grâce à une aide providentielle, celle de Denis Flores. Miguela Velázquez, sa maman raconte : « nous étions très humbles et Denis Flores nous a été d’une aide importante lorsque nous étions à Tacuary. Un jour, il nous dit qu’il s’occuperait de tout ce que désirera mon fils. Le jour même, il lui a acheté une paire de crampons et des protèges tibia. Mon fils était tellement ému qu’il a dormi avec. Monsieur Flores nous a aidés sans aucune arrière-pensée. Puis, par chance, le Cerro Porteño est entré dans nos vies. » Car deux ans après avoir commencé à taper dans un ballon dans un club, la légende veut qu’une altercation l’oblige à aller tenter sa chance ailleurs, il va alors tenter sa chance à Barrio Obrero.

 

Record de précocité

Le temps s’accélère alors. Il n’a que 12 ans lorsque Gustavo Florentín, entraîneur des u14, l’appelle avec les grands, sa formation démarre alors véritablement. C’est avec les u15 qu’il se fait un nom. En six mois, Sergio Díaz inscrit 40 buts, 38 avec les jeunes de sa catégorie, brillant notamment lors du Mundialito Tahuichi, compétition internationale organisée en Bolivie par l’académie du même nom (et qu’il termine meilleur buteur), et fait déjà quelques apparitions avec les u20 avec qui il ajoute deux buts. Le niño maravilla est devenu le Kun, surnom de son idole Sergio Agüero comme il l’affirme lorsqu’il reçoit le prix du meilleur joueur du championnat u15 par un grand quotidien local. Alors il commence à frapper à la porte de la réserve et, du haut de ses 15 ans, va même s’entraîner avec les pros : « C’était le 13 septembre 2013. Le jour où le professeur Francisco Arce m’a appelé pour venir m’entraîner avec les pros. Luis Cardozo m’avait prêté ses chaussures. » Sa chance arrive quelques mois plus tard, lors du dernier match de l’Apertura 2014 quand, à 6 minutes de la fin, le gamin de 16 ans remplace Guillermo Beltrán. Avec les frères Romero et l’autre diamant Miguel Almirón, il fait partie de ces jeunes pépites formées au club qui commencent à s’installer chez les pros. Au lendemain de ses débuts, son père décide alors de tout dédier à son fils : « j’ai acheté une voiture et j’ai arrêté mon travail pour devenir son chauffeur, il fallait le protéger. Une fois, il était arrivé très tard, je ne voulais pas que cela se reproduise. » Trois mois après ses premières foulées sur un terrain professionnel, il fait trembler pour la première fois les filets, nous sommes alors le 28 septembre 2014, veille de l’anniversaire de sa maman, « son premier cadeau » dira-t-elle.

Alors le Kun paraguayen s’installe dans le 11, prend de plus en plus de place, partage avec le Sergio argentin des records de précocité. Le 3 mai 2015, du haut de ses 17 ans, 1 mois et 28 jours, il devient le plus jeune joueur à inscrire un but lors d’un Clásico reléguant aux oubliettes le record d’un certain Roque Santa Cruz.

Sergio enchaîne les matchs, dispute des rencontres de Libertadores, de Sudamericana avec le Ciclón, marquant notamment face au Corinthians, débute avec la sélection u20. Pour ses débuts avec elle, lors du Sudamericano 2015, il s’offre son premier but, devenant le plus jeune joueur à inscrire un but lors de ce tournoi (il n’a alors que 16 ans et 10 mois). Il s’en va alors briller avec les u17 lors du Sudamericano et de la Coupe du Monde de la catégorie avant de revenir en u20 début 2016 pour disputer notamment le Tournoi de Toulon duquel, avec ses deux buts en quatre apparitions, il termine joueur révélation, prenant place dans le onze idéal.

Quelques semaines plus tard, alors que les négociations avaient débuté avant même le tournoi en France, Sergio Diaz quitte le Cerro Porteño pour l’Europe, il rejoint le Real Madrid. Comme Roque Santa Cruz, il quitte rapidement le pays pour un géant européen.

Un créateur d’espace

Lorsqu’on s’appelle Sergio et qu’on est surnommé Kun, qu’on débute en pro à 15 ans et qu’on file vers Madrid à tout juste 18 ans, la comparaison avec Agüero est inévitable, même si le club d’accueil est différent. Comme son idole argentine, Sergio Diaz n’est pas grand, comme son idole argentine, il est un danger permanent. Toujours en mouvement, aimant participer au jeu, souvenir d’une jeunesse passée en position de meneur (il jouait encore 10 avec la réserve du Cerro), Sergio Diaz aime dribbler, sait se servir de son centre de gravité si bas pour se retourner avec une vitesse qui déstabilise tout défenseur, pour changer de rythme si soudainement.

Alors Sergio el Kun Diaz est un danger permanent. Tout aussi doué pour se démarquer et déstabiliser par ses appels dans le dos des défenses, il sait aussi se muer en renard des surface, en véritable neuf. Pour résumer Diaz, il est un buteur avec un corps et un cerveau de meneur de jeu. Seul ne lui manque qu’un véritable physique qui lui permettra de gagner en puissance et donc en vitesse. Mais si le diamant reste à polir et à façonner, il est déjà d’une pureté rare.

Lorsqu’il signait son premier contrat pro au Cerro l’an passé, Sergio Diaz ne devait pas quitter le club dans les deux ans. Mais depuis, ses dribbles et son talent lui a encore permis d’accélérer le temps. Arrivé pour d’abord évoluer avec la Castilla, afin de s’adapter petit à petit à ce qu’est le Real Madrid, il se pourrait que le joyau paraguayen ne tarde pas trop. Comme le rappelle Gustavo Florentin, l’homme qui l’a encadré avec les u14 du Cerro, « Sergio veut jouer tous les matchs, lorsqu’on le remplaçait en équipe de jeune, il était blessé et pleurait. » C’est cette soif de jeu qui le fait gravir les étapes avec une telle vitesse. La même que celle avec laquelle il enchaîne les dribbles sur le terrain. La même qui en fait aujourd’hui le plus beau joyau du football paraguayen.

Photo une : Harry Trump/Getty Images

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.