
Une fois installée sur des bases saines, une ligue en développement a souvent besoin, pour franchir un palier supplémentaire, d’attirer les projecteurs médiatiques. Et souvent, la seule solution est d’attirer des joueurs de renommée internationale. Comme la MLS, la A-league s’y essaie. Mais est-ce vraiment la solution ?
Il semble y avoir une demande croissante de recrutement de marquee player (NDLR : en Australie, comme en MLS, les clubs peuvent recruter un joueur qui sort du salary cap, il est appelé marquee player), des joueurs de renoms dans notre championnat d’A-League. La panacée à tous les maux qui touchent le football aujourd’hui. A croire que ces recrutements de joueurs étrangers bien connus - au crépuscule de leurs carrières - pour une à deux saisons seraient nécessaire à notre championnat.
Je dois admettre que je suis un peu sceptique quant à cet argument. Que reste-t-il de toute l’attention que des joueurs tels que Dwight Yorke, Robbie Fowler et Alessandro Del Piero ont apporté avec eux ? La vision de centaines de personnes arborant des maillots de Liverpool ou de la Juventus venues observer leurs stars en championnat et qui ont fait augmenter les affluences. Mais combien vont toujours au stade d’aujourd’hui ? Combien sont restés après que leur icônes sont parties ? Je dirais très peu à en juger les chiffres de fréquentation des stades avant, pendant et après leur passage.
Il y a quelque chose de malsain dans le fait de voir ces vieux footballeurs venir chercher leur pension et utiliser la ligue comme une étape de leur randonnée touristique en Asie. Si ces joueurs étaient encore dans la force de l'âge, ils pourraient rester dans les compétitions européennes, mais ils n’y avaient plus de demande pour eux là-bas. Ainsi, ils finissent ici, dans une ligue prête à tout pour être prise au sérieux, prête à tout pour être remarquée, prête à tout pour être quelque chose.
Tout comme le vieux chanteur qui n’arrive plus à vendre de nouveaux titres cherche un casino à Las Vegas pour trouver une dernière résidence et un salaire décent, ils viennent ici pour jouer quelques-uns de leurs plus grands succès, même si à un niveau inférieur sauf quant à l’adulation des masses, avant de bouger vers une autre destination pour faire de même.
Quand j’étais enfant, j’ai vu la sélection anglaise victorieuse en Coupe du Monde jouer un match en hommage à Martin Peters face à Norwich City. C’était un grand spectacle que celui d'avoir la chance de voir des légendes jouer. Ils étaient loin de leur niveau d’antan mais toujours capables de jouer un match correct. Ils ne pouvaient pas jouer à un niveau compétitif et ont été battus 4-2. Vous ne pourriez pas imaginer ces joueurs tenir une saison mais il semble que désormais c’est ce que les gens attendent des grands noms que nous signons. Ce serait certainement une meilleure idée que de prendre du recul et analyser ce dont la ligue a réellement besoin comme marquee player.
Ce dont la A-League a vraiment besoin n’est pas de projets à courts termes, d’une piqûre temporaire, mais bien d’une stratégie à long terme mûrement réfléchie. Un moyen de convertir les nombreuses personnes qui pratiquent le foot en spectateurs réguliers, d'exploiter l’engagement de ces personnes en convertissant cela en présence physique durant les matchs de championnat.
Dans un championnat où de nombreux clubs – encore aujourd’hui – ont des difficultés financières à payer dans les temps leurs joueurs et leurs personnels, est-il raisonnable de miser beaucoup d’argent sur un marquee player qui n’apportera rien à la qualité du jeu sur le terrain ? Avoir un joueur star peut évidemment attirer les médias, mais cela aidera-t-il le club à hausser ses standards sur le long terme ?
Il semble plus logique de rechercher un joueur bien moins connu et disposé à s’engager dans un projet à long terme, un joueur qui correspond à la structure du club et à ses ambitions pour l’aider à se développer. Ils ne feront pas les gros titres et n’attireront pas les médias (habituellement) désintéressés mais ils contribueront à consolider la qualité du football dans la ligue et la qualité des joueurs.

Thomas Broich à Brisbane Roar est le parfait exemple du joueur que la ligue doit rechercher. Lors de son arrivée au club, il y a eu une certaine quantité de « Thomas qui ? » et pourtant il a prouvé aux yeux de tout le monde que ce fut une des meilleures signatures d’outre-mer que le championnat n’a jamais eue. Il a fourni un jeu de très haut niveau sur une base cohérente d’un projet à long terme. Il a contribué à encourager et développer footballistiquement ses coéquipiers, restant, par exemple, après les entraînements pour améliorer son jeu et celui des autres membres de l’équipe. Un professionnel humble venu ici pour jouer au football et aider son équipe à évoluer et grandir.
L’argent « investi » dans un grand nom, serait probablement mieux dépensé en misant sur de jeunes joueurs plein d’avenir. En explorant comment engager véritablement les fans. En cherchant des moyens d’attirer les gens de manière régulière dans les stades, que ce soit en offrant des tickets à tarif réduit ou des pack familles ou en offrant des billets aux clubs locaux. Vous pourriez même dire que les clubs feraient mieux de dépenser leur argent dans des avocats afin de voir plus en détail les contrats les liants aux propriétaires des stades et ainsi voir s’il n’y a pas moyen de les réviser pour éviter de surpayer les services.
Les grands noms du football peuvent attirer de nouveaux spectateurs sur un match ou deux de A-league mais, comme les stars de cinéma, si le produit final n’est pas à un niveau élevé, les gens ne reviendront pas de manière régulière.
Article original signé Phil Withall pour le blog Ultimate A-League. Traduit après accord avec l’auteur par Antoine Blanchet-Quérin.

