
Après une victoire 2-0 à l’aller, León se préparait à une descente dans l’enfer de l’Azteca pour résister à ce qui se fait de mieux au Mexique : les Águilas du bouillant Miguel Herrera.
Imaginez la situation : d’un côté le champion sortant América, vainqueur sans forcé de la phase régulière tout en se permettant le luxe de prêter son entraîneur pendant 4 journées à la sélection nationale pour envoyer celle-ci à la Coupe du Monde. Un entraîneur, Miguel Herrera dont c’était la dernière sur le banc des hôtes de l’Azteca. Un Azteca plein comme un œuf, plus de 100 000 personnes, un bruit assourdissant (les « puuuuuuto » sur les dégagements de William Yarbrough, gardien de León auront animé la nuit). Un champion América qui se voyait au pied d’une montagne : remonter deux buts de retard pour décrocher un 12e titre et ainsi devenir seul meilleure équipe de l’histoire de la Liga MX (actuellement, les Águilas partagent la première place avec Chivas). Contexte posé.
Face à eux, León avait tout de la victime. Promu surprise il y a deux tournois, el León termine cet Apertura à la troisième place et réalise une énorme Liguilla (nous allons y revenir). Suffisant pour résister à une telle pression ? Avec un groupe composé en grande partie de joueurs venant de seconde division on pouvait en douter.
Dès le coup d’envoi, portés par une foule en transe, les Águilas poussaient, imposaient leur pression pensant que celle-ci suffirait à faire vaciller León. Sambueza trouvait le poteau dès la 9e minute avant que Yarbrough débute son festival. Deux minutes plus tard, Mina, seul aux six mètres, n’appuyait pas suffisamment sa tête pour inquiéter le portier des verts et blancs. Mais les esmeraldas ne craquaient pas. Mieux, sur le dégagement, Boselli, remarquablement lancé éteignait l’Azteca d’une belle frappe croisée. 12 minutes de jeu, 1-0 León. Assommés les Águilas ? Pas vraiment. Ces derniers repartaient de plus belle mais se heurtaient à un Yarbrough des grands soirs tandis que chez eux, Narciso Mina manquait absolument tout ce qu’il tentait. Face à cela, León dégage alors une incroyable impression de maîtrise, de sérénité. América continuait à presser et allait trouver juste récompense peu avant la pause lorsque González détournait une frappe de Sambueza dans son but. 1-1 à la mi-temps, le scénario parfait pour un second acte de folie. Car América allait emballer le match, c'était évident.

C’était sans compter sur les esmeraldas. D’entrée de seconde période, González se rattrapait et éteignait de nouveau l’Azteca d’une tête sur corner. Dans la foulée, le coup de grâce. Un penalty oublié pour les Águilas, un contre qui file à 200 à l’heure et Britos filait seul au but avant d’être fauché par Rodríguez. Rouge direct, América à 10 contre onze devait marquer trois fois. Les nerfs lâchaient. León déroulait, se payait le luxe d’en claquer un troisième sur un superbe mouvement collectif et faisait alors péter une durite à Miguel Herrera. Le coach de la sélection sortait de ses gonds et se voyait expulsé, sa dernière à l’Azteca. Comme un goût amer. León remporte son sixième titre, le premier depuis 1992, sans pour autant que ce soit finalement une grande surprise.
Herrera aura beau clamer que son América était supérieur et s’en prendre aux arbitres, le titre des verts et blancs ne doit pourtant rien à personne.

Arrivé en seconde division, Gustavo Matosas a su bâtir une équipe au football plus qu'intéressant, ajoutant à son collectif, les joueurs d’expérience nécessaires aux plus grands résultats. Symbole, l’arrivée de Rafa Marquez. L’ancien monégasque et barcelonais, que beaucoup avaient enterré, aura stabilisé et donné la sérénité nécessaire à une défense devenue la deuxième du pays et en profite pour le coup pour décrocher son premier titre au pays (il n’avait jusqu’ici été titré qu’en Europe). Autre symbole, le buteur Mauro Boselli. Héros de la campagne victorieuse d’Estudiantes en Libertadores 2009, El Chapa claque 11 buts en phase régulière, six en Liguilla, menant la meilleure attaque de cette Liguilla vers le titre. Deux expérimentés encadrant une pluie de talents. Il y a bien entendu William Yarbrough, le gardien blond aux origines texanes, héros de la finale, d’une lucidité et d’une intelligence sur et en dehors du terrain assez incroyable pour son âge. Il y a aussi le duo Luis Montes - Matías Britos dont la montée en puissance et l’importance dans le collectif n’a jamais cessé de croître. Il y a enfin le jeune Carlos « el Gullit » Peña, l’une des révélations, auteur d’une Liguilla de toute beauté. Et sur le terrain, c’est tout un football samba qui se développe. Matosas s’était déclaré Santanista, référence au géant Télé Santana dont il a appris les fondements tactiques lors de son passage à São Paulo au milieu des années 90, mais semble pourtant plus s’inspirer du carré magique sauce Luxemburgo époque Palmeiras et Real Madrid, que les français ont semble-t-il découvert sous le nom de 4-4-2 losange lorsque Laurent Blanc était aux Girondins. Boselli – Britos devant et derrière Loboa - Montes – Peña formant un triangle devant une sentinelle Juan José Vázquez. Outre gratter des ballons et éteindre autant qu’il le pouvait Sambueza, Vázquez aura servi en finale de premier relanceur d'une impressionnante machine offensive du León. Le Mexique a enfin découvert un nouveau diamant d’entraîneur. Si, ajouté à cela, le club propriété du richissime Carlos Slim parvient à garder ses stars, une nouvelle ère verte pourrait bien se lever. On se régale déjà de le voir se frotter à Emelec et autres Flamengo lors de la prochaine Libertadores.
En attendant, les buts de cette extraordinaire finale :


