L’expansion de la MLS se poursuit. Alors que la saison 2018 est sur le point de débuter, une nouvelle franchise prépare son arrivée. Le Los Angeles FC vient concurrencer un monstre local et choisit, pour ce faire, une stratégie des plus audacieuses.

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Une place à prendre

Vu du vieux continent, l’on pourrait penser que le LA Galaxy est un club ultra populaire ; il attire les plus grandes stars internationales comme Dos Santos, Alessandrini ou Ashley Cole et est l’une des franchises de MLS les plus médiatisées en Europe. Seulement, c’est loin d’être le cas du côté des Etats-Unis, où, en plus d’être peu apprécié des fans adverses, lui reprochant ses liens étroits avec la ligue, il est aussi peu soutenu dans sa région. Par exemple, le stade StubHub a perdu 11% d’affluence entre 2016 et 2017, une des rares pertes dans une ligue où la fréquentation des stades est constamment en hausse.

 « On suit le Galaxy, mais on ne le porte pas dans notre cœur »

Cadre du LAFC, Los Angeles Football Club Story

Le LA Galaxy apparait pour beaucoup comme un produit commercial, sans réelle histoire, artificiel. Le nombre affluent de stars internationales a tué la production de joueurs locaux et l’équipe ne possède pas de joueur emblématique venant de LA, contrairement à d’autres clubs. Le seul exemple récent est Gyasi Zardes, qui a malheureusement été loin d’une réussite pour le club, et qui, malgré sa popularité en dehors des terrains, a été tradé à Colombus ces dernières semaines. Il est aussi un club dont le lien avec la ville est plutôt distant. Excepté le noyau dur, les fans du Galaxy doivent subir une trentaine de minutes de voiture pour se rendre au stade – quand il n’y a pas d’embouteillages, et La La Land nous a prouvés que c’était un évènement rare. Alors, le LAFC, la nouvelle franchise qui entrera en MLS cette saison, a décidé de se placer au cœur de la ville, son nouveau stade est intramuros, accessible en métro. L’objectif est clairement affiché : devenir LE club de Los Angeles.

Il faut dire que la ville de Los Angeles ne s’est pas remise de l’arrêt prématuré des Chivas USA, en 2014. Cette franchise, membre de la Major League Soccer pendant une dizaine d’année, a dû cesser son activité, ses propriétaires (le club mexicain de Chivas Guadalajara) ne la trouvant pas assez rentable. Le club était assez populaire à ses débuts, avec des foules de presque 20 000 supporters par match en 2006, inédit dans une ville à deux franchises MLS. Mais les mauvais résultats plombèrent la franchise et ses supporters, qui n’étaient qu’en moyenne 7 000 lors de leur dernière saison. Alors, à l’exception d’un noyau dur, les angelins (le nom des habitants de LA) se tournèrent vers le Galaxy, sans grande conviction, faute de mieux. C’est aussi cette partie de la population que les dirigeants du LAFC veulent attirer. Car Chivas USA possédait une réelle identité qui était propre à Los Angeles ; une identité de melting-pot, à l’image de la ville, due à son affiliation au club mexicain. Et dans une ville qui compte 48% de latinos, c’est important.

À l’image de la ville

Cette identité, le LAFC veut se la réincorporer. De nombreux fans de Chivas regardent déjà vers cette nouvelle équipe, avec son stade qui sera flambant neuf. Le LAFC sera à l’image de sa ville, plein de mixité et leur premier Joueur Désigné et international mexicain, Carlos Vela, ne fait que renforcer ce sentiment ; une stratégie que le Galaxy avait tentée, mais ratée, avec les frères Dos Santos l’année dernière, qui n’ont ni attiré les foules ni les victoires. Vela n’est pas la seule recrue alléchante de la franchise, puisque l’autre joueur désigné est le jeune Diego Rossi (19 ans), un espoir uruguayen de Peñarol. La mixité est poussée à sous paroxysme : la star belge Laurent Ciman, qui a toujours été un joueur exemplaire à Montréal, l’Iranien Steven Beitashour, une valeur sure de la MLS qui jouait à Toronto, l’Egyptien Omar Gaber, en prêt du FC Bâle, et le Costaricain Marco Ureña complètent le casting des stars internationales. Pour encadrer le tout, le LAFC a visé en attirant sur le banc le très expérimenté Bob Bradley, un des rares américains à avoir entrainé à l’étranger, et surtout le seul coach vainqueur de la MLS Cup avec une franchise d’expansion (nouvelle à la ligue) avec le Chicago Fire, un exploit qu’il espère reproduire à LA.

Preuve d’une stratégie réussie, certains collectifs de supporters de Chivas ont ressuscité, comme les District 9 Ultra (anciennement Unit Ultra) et la Black Army 1850 qui ont rejoint les rangs du LAFC. Ils rejoindront entre autres le collectif Expo Originals qui fait connaitre l’équipe dans toute la ville lors de grandes sorties collectives où les fans se joignent pour festoyer et chanter dans la rue. Ils se retrouvent plus dans l’identité hispanique du club, qui a d’ailleurs lancé un podcast mêlant tous les groupes de supporters, « somos LAFC », exclusivement en espagnol, ce qui s’accorde bien avec ce qui était leur slogan de demande d’expansion : « Unite the world city to the world game ».

Prix cassés et célébrités

Autre arme de séduction, le stade. Pour cela, le club mise sur deux aspects : son emplacement et une politique tarifaire agressive, certains billets ne seront vendus qu’à 20 USD. Le season ticket démarre à 255 USD, un abonnement dans la section supporter coûte 340 USD, soit 60 de moins qu’au Galaxy, 38 de moins que le prix moyen pratique sur la MLS (seules cinq équipes sont moins chères, Colorado, Salt Lake, Houston, Montréal et Chicago). Une décision importante au vu de la concurrence à Los Angeles. Aux Etats-Unis pour que le soccer s’impose, il doit d’abord se battre contre les autres sports en place. En plus des Galaxy donc, les rivaux de LAFC seront les Lakers et les Clippers (basketball), les Dodgers en baseball, les Kings en hockey, les Rams et les Chargers en football américain ainsi que les très populaires équipes sportives des universités de UCLA et USC. Ce sont aussi toutes ces franchises qui ont causé la mort de Chivas en 2014, mais aussi des Sols, le club féminin de soccer arrêté en 2010. Toutes proposent un season ticket plus cher que LAFC.

Aux prix cassés, le LAFC a aussi appuyé sa campagne de séduction par de nombreuses personnalités qui ont permis de faire monter la popularité du club : Will Ferrell, Magic Johnson, Mia Hamm… Ce n’est pas un hasard si 34% des casquettes vendues par la MLS viennent de cette franchise qui n’a, on le rappelle, n’a toujours pas joué un seul match, mais qui a plus de 80 000 followers sur Instagram. Le recrutement -possible et attendu- de Zlatan Ibrahimovic par le Galaxy est d’ailleurs vu comme un coup médiatique par beaucoup aux Etats-Unis, une sorte d’arme de persuasion massive pour que la population de la ville ne rejoigne pas en masse le jeune LAFC. Plus que des résultats sur le terrain, dont ils ont pourtant bien besoin, Zlatan ferait vendre des maillots, qui seraient vu partout en ville, comme Beckham l’avait fait avant lui. Une arrivée qui tomberait à pic pour un club qui a besoin de revenir sous les projecteurs.

Car doté d’un nouveau stade ultra accessible, d’une identité locale et d’une fan base déjà bien établie, le LAFC pourrait détrôner le LA Galaxy en termes de popularité. Et on le sait ; aux États-Unis les choses vont vite, et dans un pays où le soccer est au stade de l’adolescence, il se pourrait que beaucoup de fans de Galaxy aillent voir si l’herbe est plus verte au LAFC.

Antoine Latran
Antoine Latran
Rédacteur Etats-Unis pour @LucarneOpposee et @MLShocker, à suivre sur @AntoineLatran et @FrenchSounders