Début des quarts de finale de la Liga Bet Play ce samedi. Si tous les gros ou presque sont là, seul le Deportivo Independiente Medellín est resté à la porte, tout le monde n’arrive pas avec les mêmes certitudes.

bandeaubielsa

Honneur au classique de ces quarts avec un Millonarios/América qui sent bon Willington Ortiz et les années quatre-vingts. Si aucune des deux équipes ne fait office de favori pour le titre c’est surtout l’América qui inquiète. Le double champion est passé par la petite porte. Huitième, le club escarlata a montré ses limites. Avec seulement trois victoires à domicile et sans Adrián Ramos, il a eu toutes les peines du monde à trouver le chemin du but. Duván Vergara est très loin de son niveau de la saison dernière, mais surtout un homme est dans la tourmente : l’entraîneur Juan Cruz Real. S’il n’a jamais fait l’unanimité, même après le titre remporté en décembre dernier, les critiques se font de plus en plus pressantes. La première est d’ordre tactique, puisqu’en l’absence de son capitaine, Juan Cruz a souvent fait le choix de mettre un faux numéro neuf, Santiago Moreno, Duván Vergara, voire Luis Sánchez. Sans réussite même s’il n’a pas été aidé par le niveau des doublures prévues à ce poste, Aldair Rodríguez et Diber Cambindo. La deuxième porte sur le choix des hommes. Remplacé à gauche de la défense et s’il fait le travail défensif, l’habituel central Pablo Ortiz n’apporte pas grand-chose sur le plan offensif. Difficile de lui en vouloir pour ça et ça se ressent clairement dans le jeu. Le départ d’Edwin Velasco à Junior a donc fait énormément de mal et il ne serait pas surprenant de voir un véritable spécialiste du poste arriver dans les prochaines semaines. Enfin, c’est une équipe de l’América fatiguée qui se présentera sur la pelouse avec la défaite du milieu de semaine en Libertadores.

En face si Millonarios n’a pas été brillant non plus pendant ce semestre, la qualification pourrait lui apporter un bol d’air. Sa fin de saison dantesque, les deux clubs de Cali, Santa Fe et Tolima sur les quatre derniers matches, a été parfaitement gérée avec notamment une victoire incroyable sur son voisin. Mené à l’entrée du temps additionnel, un penalty de Ricardo Márquez et un but au bout du temps additionnel de Jader Valencia ont offert la victoire au club embajador. L’ancien du Racing Club de Lens a des allures de super-sub en cette fin de saison puisqu’il avait déjà offert la victoire en toute fin de match contre Bucaramanga. Sans argent, avec une équipe très largement composée de jeunes du club et sans compétition continentale Millos a tout d’un outsider et pourrait réussir à se hisser en demi-finale, ce qui serait une sacrée performance quand on sait que le club n’avait pas réussi à se qualifier lors de la dernière saison.

S’il y en a deux qui ne se quittent bien c’est Junior et Santa Fe. Adversaires en Libertadores, les deux vont se retrouver en quarts de finale. Pour le premier, comme à l’América, l’homme sur le banc est largement critiqué. Malgré certainement le meilleur effectif du championnat, Junior aurait même pu se faire éliminer lors de la dernière journée si le DIM avait fait le travail. Solide défensivement, avec un Viera excellent notamment, le club tiburón a des problèmes offensifs. Fabián Sambueza n’est que l’ombre du joueur qu’il était à Santa Fe, Miguel Borja a été blessé et a manqué une partie de la saison. Collectivement, l’équipe d’Amaranto Perea a toutes les peines du monde à convaincre encore et l’ancien joueur de l’Atlético de Madrid est sur un siège éjectable permanent. Si la qualification en Libertadores lui a accordé un sursis, il joue une partie de son avenir avec cette confrontation. Et ce sera à priori sans Germán Mera, sorti sur blessure en milieu de semaine et sans Teófilo Gutiérrez qui a dû déclarer forfait en Libertadores et qui ne devrait pas être remis, au moins pour ce match aller.

Santa Fe a lui aussi des problèmes d’effectif, de buteur pour être plus précis. Le club cardinal avait recruté Michael Rangel, l’ancien de Junior, mais il est parti au Mexique après moins de cinq matches. Troisième meilleure défense du championnat et pas bien loin de l’América, la meilleure défense, c’est bien offensivement que le bât-blesse. S’il y a toujours le force des coups de pied arrêtés, collectivement l’ensemble reste poussif, même si la deuxième place n’a pas été usurpée. Une deuxième place qui lui permet de partir avec un petit avantage, aussi parce que lors des deux matches qui ont opposé ces deux équipes cette saison, les deux à Barranquilla et qui se sont terminés sur le même score (1-1), Santa Fe a maitrisé son adversaire et n’a que peu souffert. Seul bémol, cette fois le match ne sera pas programmé en soirée mais bien en milieu d’après-midi où la chaleur et l’humidité seront plus fortes et pourraient affecter le club de la capitale.

L’affrontement le plus équilibré est celui qui va opposer les deux favoris. En tout cas les deux équipes qui nous ont laissé la meilleure impression tout au long de ce semestre, l’Atlético Nacional et La Equidad. Largement meilleure attaque, l’Atlético Nacional semble avoir trouvé son rythme de croisière et Guimarães avoir pris pleinement la mesure de cet effectif. L’ancien entraineur de l’América a montré la capacité à s’adapter et à brouiller les cartes. À trois ou à quatre derrière, les joueurs semblent à l’aise. Cette équipe est aussi, de loin, celle qui a la meilleure dynamique, avec notamment un 7-1 passé à Patriotas lors de la dernière journée. Certains joueurs ont pris une nouvelle dimension comme Baldomero Perlaza ou Andrés Andrade. La machine semble lancée et le club verdolaga est le favori de ce championnat, même avec la Libertadores. L’effectif semble assez fourni pour briller dans les deux compétitions, avec notamment deux buteurs de haut niveau, dont un Jonathan Álvez qui pèse de plus en plus au sein de l’attaque puisqu’il a poussé Jefferson Duque, le capitaine, sur le banc.

En face, c’est aussi le coach qui a fait la différence. Alexis García est l’homme qui a fait la différence et La Equidad est loin d’avoir usurpé sa place. Si Diego Novoa et Matías Mier sont partis, ils ont été parfaitement remplacés. Diego Herazo est le meilleur buteur du club et Daniel Mantilla est le meilleur passeur du club. Sans bruit, le troisième club de Bogotá, quart de finaliste de la Copa Sudamericana, s’impose dans le paysage et en devient même donc un candidat plus que sérieux au titre. Il a notamment réussi à s’imposer à Cali contre l’América trois jours après avoir perdu contre le Deportivo Cali et à se qualifier en Sudamericana cette année après avoir perdu à l’aller à la maison contre Pasto. Deux bémols. Joueur historique de l’Atlético Nacional, Alexis García a toujours eu du mal à affronter cette équipe et avec un voyage au Brésil pour jouer la Sudamericana, La Equidad pourrait accuser le coup avec son effectif largement inférieur à celui de son adversaire.

Le dernier match pourrait être qualifié de match entre deux malades. Ni le Deportivo Cali, ni le Deportes Tolima ne sont dans une bonne dynamique. Le Deportivo Cali a eu une saison plus que mouvementée. Il a certainement été le club le plus touché par la violence des « supporters » ce semestre. Entre l’invasion de l’hôtel à Bucaramanga lors de la mise au vert avant le match avec demande express de parler au coach pour lui indiquer les joueurs à sortir, celle du centre d’entrainement où le ton est monté et enfin le siège attaqué à coup de pierres, difficile de ne pas avoir envie de partir voir ailleurs. Parti très fort, le club a capitalisé sur ce début de saison pour arracher la qualification. Le départ de Palavecino a fait très mal et offensivement et ça se ressent. Plus faible attaque des qualifiés avec l’América, les deux pointes semblent perdues. Ángelo Rodríguez est en grande difficulté et Marco Pérez, s’il a un peu plus marqué n’est pas beaucoup plus en réussite. Question réussite, le Deportes Tolima ne va pas arriver dans les meilleures dispositions. Sur les huit derniers matches, le club en a passé six sans trouver le chemin du but. S’il y a eu la traditionnelle victoire contre l’Atlético Nacional, cette donnée est inquiétante. Jaminton Campaz est quasiment le seul danger de son équipe. Hernán Torres commence de plus en plus à être contesté. Il s’est permis de mettre Álvaro Montero sur le banc. Le portier international colombien en conflit avec son club devrait partir cet été. Si cet affrontement est loin d’être le plus alléchant, il apparait comme le plus indécis et c’est l’équipe la moins malade qui ira dans le dernier carré.

Pierre Gerbeaud
Pierre Gerbeaud
Rédacteur Colombie pour Lucarne Opposée