Peñarol s'envole très haut dans le ciel austral, s'offrant une nuit de rêve à Rio avant une nuit de fête à Montevideo, bien aidé par un gardien qui vous fait croire que le football peut-être cet autre chose. Nacional repart aussi de plus belle mais avec beaucoup de retard. Le tout derrière Fénix, et Juan Ramon Carrasco, toujours leader.

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Le joueur de football est un travailleur en plein rêve. Ce n'est pas moi qui le dit, mais Agustín Lucas, joueur de football, auteur et journaliste. Grâce à ce travailleur, les jours et les nuits de milliers de personnes peuvent, elles aussi, se transformer en rêve. Ce fut le cas mercredi dernier, au soir d'un simple match de poule de Copa Libertadores, durant lequel Peñarol domina Flamengo un à zéro. Un simple match de poule. Un simple match. En vérité, un match pas si simple, succédant à quelques dizaines d'autres faits de déception, de frustration, d'attaques inoffensives, de textes sans E. Qui a dit cette bêtise, que l'important était le titre, que l'on ne se souvenait que des vainqueurs ? C'est faux. L'important, ce sont les émotions, les rêves qui s'ensuivent. Peñarol a battu Flamengo au Maracanã. C'est la victoire de tout un groupe, depuis l'entraîneur qui a fait merveilles avec son milieu à cinq et a osé faire entrer un attaquant en fin de match, jusqu'au gardien qui a réussi encore de magnifiques arrêts. Ce gardien, les connaisseurs du football uruguayen peuvent le suivre depuis quelques temps, quelle chance ! tweetIl faisait partie de ce Plaza Colonia vainqueur du Clausura en 2016, déjà au Campéon del Siglo, avant de venir six mois plus tard au Club Atlético Peñarol. Il a mis six mois pour s'y imposer, avant d'être un joueur clef des deux derniers titres carboneros, s'imposant comme un gardien sûr, propre, ayant des réflexes de gardien de handball, efficace à souhait. À tel point qu'évidemment, les sirènes sont apparues, son nom a été annoncé en Europe, notamment du côté du FC Séville. Un jeune espagnol de 20 ans, ayant lu que son club était sur l'Aurinegro Kevin Dawson, posa donc une question simple et belle à la fois : « Quelqu'un connaît Aurinegro Kevin Dawson ? ».

Parfois, un tweet en Espagne peut générer une tempête en Uruguay. Voyant le danger venir, les supporters de Peñarol ont envoyé des centaines de réponses incluant : une vidéo reprenant les erreurs de Dawson durant sa carrière, des supporters qui l'appellent « le pire gardien du monde », des photomontages de Dawson en supporter du Betis, des photos d'autres gardiens locaux... Une déclaration d'amour. Le gardien a de son côté confirmé son talent par trois matchs de haute volée en une semaine. Il a tout d'abord conservé son but vierge et arrêté un penalty contre Boston River samedi dernier (victoire quatre à zéro de Peñarol, logique même si les buts ont été inscrits en deuxième période), il a ensuite conservé son but vierge face à Flamengo, étant intraitable notamment face à Gabriel Barbosa, avant de conserver son but vierge face à Danubio samedi, devant s'employer pendant les quarante-cinq minutes de la seconde mi-temps, l'équipe ayant eu tendance à prendre l'eau avec la fatigue. Il a notamment réalisé un arrêt sur une tête à bout portant de Federico Rodríguez, avant de réaliser un triple arrêt devant José Luis Pumita Rodríguez, puis Carlos Grossmüller. Peñarol s'impose un à zéro d'un magnifique but sur coup-franc de Cristian Lema, mais Peñarol a souffert, avec un effectif remanié et fatigué à la fois.

Côté Peñarol, quelques satisfactions malgré tout avec les bons matchs des jeunes Ezequiel Busquets, que l'on connaît déjà, mais aussi Enzo Martínez qui monte en puissance en tant remplaçant de luxe en charnière pour faire souffler l'un des deux titulaires, ici Fabricio Formiliano. Côté Danubio, le jeune Tomàs Chacón a crevé l'écran, apportant beaucoup en créateur, sur son côté gauche, derrière un Federico Rodríguez qui a eu du mal à s'imposer. Grossmüller, en pleine forme depuis le début de la saison, a bien été muselé, au moins en première période.

Les Carboneros ne sont plus leader depuis leur défaite contre Wanderers il y a de cela deux semaines. Depuis, c'est l'invaincu Fénix qui continue sa formidable première partie de saison. L'équipe de Carrasco est allée prendre un point à Colonia face à Plaza le week-end dernier, avant de s'imposer face à Cerro dans un match ou Léo Fernández a encore été très bon en dix, avec un but de sa part des suites d'un corner, avant que Alex Silva ne double la mise sur une passe de Maxi Cantera. Cerro a pourtant contrôlé Fénix avec trois milieux défensifs mais cela n'a pas suffi. Fénix continue avec un point d'avance en tête du classement. Ils n'ont pas encore affronté les deux grands, ils joueront River Plate lors de la prochaine journée et Nacional lors de la suivante.

Nacional justement, qui vient aligne les victoires depuis le retour de Gutiérrez sur le banc. Après avoir battu Plaza trois à zéro, Cerro deux à zéro, le Bolso vient de fesser River six à zéro ce week-end. L'entraîneur a trouvé rapidement une équipe avec le retour de Guzman Corujo en charnière, Rafael García au milieu et surtout, une attaque formée par Bergessio en pointe, et trois joueurs derrière,  livreurs de caviar avec Rodrigo Amaral de retour en forme, Santiago Rodríguez le futur du club, et Gonzalo Chory Castro. L'équipe dispose ainsi de ce qu'il faut pour gagner en championnat uruguayen, une attaque et une défense efficace. En face, River a vraiment fait de la peine, avec une défense laissant passer tout le monde. Le score était de quatre à zéro à la demi-heure de jeu, cela aurait pu faire encore plus mal. Cela fait surtout plaisir de revoir Amaral en pleine forme, dans un poste de dix depuis lequel il ne doit pas fournir trop d'efforts. Il a marqué un but de vingt-cinq mètres avec une trajectoire de balle dont lui seul a le secret.

Pour le reste

Les équipes uruguayennes sont bizarrement en forme au niveau continental puisque Nacional et Peñarol ont deux victoires en trois matchs, en ayant surtout déjà joué deux matchs à l'extérieur. Le même soir que Peñarol, Cerro a été arraché un match nul à Cajamarca, se facilitant beaucoup la vie pour le retour à Montevideo. River Plate et Liverpool sont déjà qualifiés pour le tour suivant, il ne restera plus qu'à Wanderers de suivre les autres pour faire le plein.

Résultats

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Classement

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Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba