Tout le monde fait du sur-place en Uruguay avec des matchs nuls pour les cinq leaders sauf pour Nacional, qui revient tout proche de la tête au Clausura et est de plus en plus archi-favori pour le titre. Du côté de la descente, sauf énorme surprise, le sort est scellé : Cerro, Danubio et Boston River seront relégués. Avant de passer les dernières journées à parler du titre, voici l'histoire de comment deux clubs historiques sont tombés.

bandeaubielsa

Dans l'ordre du classement, celui qui a encore théoriquement le plus de chances de se maintenir est Boston River avec « seulement » neuf points de retard sur Defensor et un écart encore plus faible avec le Deportivo Maldonado si ces derniers perdent de nombreux matchs sur leur fin de saison. Sauf que Boston River est le dernier du classement annuel, qu'il n'y arrive plus depuis ses trois victoires de rang au début du Clausura et que neuf points en cinq matchs en fin de classement... c'est beaucoup. Il y a donc fort à parier que le Sastre retrouve la deuxième division l'année prochaine. Ce ne sera pas un choc incroyable, car Boston River n'est pas un club habitué aux sommets, avec seulement cinq saisons jouées dans l'élite, les cinq dernières. Le club avait surpris au début, avec deux participations consécutives à la Sudamericana en 2017 et 2018 (élimination au deuxième tour à chaque fois), mais est depuis rentré dans le rang avec une politique d'embauche de joueurs en fin de carrière qui a fini par montrer ses limites (l'embauche d'Abreu comme entraîneur-joueur a été un échec total) et une politique de jeunes menée par Juan Ahuntchaín d'abord en tant que directeur du centre de formation puis entraîneur principal qui n'a pas eu le temps de porter ses fruits. Lors de cette dixième journée, Boston River jouait l'une de ses dernières cartes contre Fénix au Capurro. La victoire de Fénix s'est dessinée en première mi-temps avec un festival des cinq joueurs offensifs qu'avait alignés Carrasco au coup d'envoi. L'attaque de Fénix, dans l'une des folies de Carrasco, était organisée comme les cinq d'attaque des années trente avec trois pointes et deux milieux très offensifs dont un Agustín Canobbio qui a marqué les deux buts de son équipe dans les premières vingt minutes, avant de vendanger une occasion où Fénix arrive à trois contre un dans la surface de Falcón, le gardien de Boston. Côté Boston, le vide, entre un Alejandro Martinuccio qui n'est plus qu'une ombre et Rubén Bentancourt qui a loupé tout ce qu'il a tenté. En défense, Carlos Valdéz, bientôt trente-huit ans, montre aussi des limites physiques trop importantes pour la première division. Comme souvent avec les équipes de Carrasco, la débauche physique va faire que l'équipe lève le pied en deuxième période et Boston River aurait pu, miraculeusement, faire comme de nombreuses équipes affrontant Fénix et revenir à 2-2. Mais un seul but est marqué, un magnifique coup franc par l’entrant José Alberti. Fénix a encore offert un match magnifique, on reparle d'ailleurs de Canobbio côté Peñarol. Côté Boston, les carottes sont presque cuites, car au-delà des moyennes et des classements, on ne voit pas cette équipe capable de rivaliser et de gagner de nombreux matchs d'ici la fin de saison.

Derrière Boston River, on retrouve Danubio qui est à douze points du premier non-relégable, Defensor. Et parmi les trois qui vont descendre, c'est sans doute la plus grande surprise car Danubio est un grand en Uruguay, un club champion à de multiples reprises dont deux fois durant les dernières années, en 2007 et 2014. Le club a participé à de nombreuses reprises que ce soit à la Copa Libertadores ou la Copa Sudamericana. Leur meilleur participation est une demi-finale de Libertadores en 1989 et leur dernière participation à la Libertadores remonte à 2019 suite à une troisième place au classement en 2018 ! Et pourtant. Et pourtant depuis l'équipe qui a formé quelques joueurs connus comme Edinson Cavani ou Joséma Giménez n'arrive pas à sortir de la nasse. Après un bon Apertura 2019, l'équipe entre en crise avec un conflit assez violent entre des dirigeants et les supporters. Il faut dire que la gestion laisse pour le moins à désirer avec le départ de nombreux joueurs pour des sommes conséquentes (on pense notamment récemment à Marcelo Saracchi, Thomás Chacón ou à Joaquín Ardaiz), des départs laissant très peu d'argent dans les caisses pour des raisons de contrat et de représentant, raisons que les supporters n'ont pas acceptées, allant jusqu'à menacer de mort le président du club. De nouvelles élections sont donc organisées, Arturo Del Campo, président historique de l'époque des titres, est revenu, tout comme Léo Ramos... Mais tout cela n'a pas suffi. L'effectif ayant encore été amoindri avec les départs fin 2020 de joueurs comme Piñeiro, Danubio n'avait presque plus aucune chance dans un championnat qui ne laisse plus trop de marge de manœuvre avec les nouveaux riches comme Torque ou le Deportivo Maldonado. La frange va donc évoluer une saison en deuxième division, pour la première fois en cinquante ans. La semaine dernière, une victoire contre Cerro avait pu laisser entrevoir une lueur d'autant plus que Danubio affrontait le premier non-relégable et donc son adversaire direct le Defensor ce week-end. Le match a été comme tous les matchs récents de Danubio : très tendu, joué le couteau entre les dents mais dans le mauvais sens du terme. Certains joueurs de Danubio sont quand même très en difficulté, des joueurs comme Matías Fritzler au milieu n'apportent pas grand-chose ni défensivement ni offensivement alors que c'est lui qui a la clef au milieu depuis quelques temps au côté de Pablo Siles. Après quatre-vingt-cinq minutes d'ennui, Danubio a pu croire au miracle avec l'ouverture du score de Medeiros suite à une frappe repoussée du pumita José Luis Rodríguez. Medeiros prend un jaune dans la foulée pour avoir enlevé son maillot et manquera donc le prochain match contre Nacional pour accumulation, ce qui est à mon sens une faute professionnelle. Dans la foulée, Defensor prend un rouge (Renzo Rabino) et l'on commence à se dire, pourquoi pas ? Et bien à cette question, Facundo Milán, ex-futur-pépite du Defensor, va se charger d’y répondre très rapidement avec un coup de tête rageur qui trompe Salvador Ichazo et remet douze points entre les deux équipes, à cinq journées de la fin. Danubio jouera donc en deuxième division l'année prochaine et l'on espère qu'il n'y restera pas trop longtemps au vu de son apport à la sélection et à la beauté de son stade.

Le dernier au classement est le Club Atlético Cerro et pour le coup ce ne sera pas une surprise même si le club est aussi l'un des plus importants du championnat. Il semblerait que statistiquement ce ne soit pas encore fait, malgré les vingt-trois points d'écart avec le Defensor et un écart aussi très conséquent pour ce qui est des moyennes avec le Deportivo Maldonado. Le club a encore très bien joué samedi soir contre Nacional et aurait mérité beaucoup mieux avec quelques jeunes comme Dylan Nandín très actif au milieu ou Bryan Bentaberry en défense, mais le bolso, sans jouer ou presque, a réussi à tromper son adversaire sur corner avec un but du renard Gonzalo Bergessio, dans un match à oublier. Le club de la villa del Cerro va donc rejoindre en deuxième division son adversaire de toujours, Rampla Juniors, et on est presque plus inquiet pour lui que pour les deux précédents car le club a une dette conséquente. Même si il a été repris par une entreprise gestionnaire il y a peu, le mix dette plus descente ne fait jamais bon ménage.

Pour le reste, Peñarol et Liverpool ont fait match nul un partout dans un match que Peñarol a dominé face à une équipe fatiguée, mais sans générer de danger devant. Peñarol avait ouvert la marque par l'incontournable Facundo Torres (qui n'ira pas à l'OL), Liverpool a égalisé par le goleador Ramírez sur un penalty logique mais chanceux. Côté Peñarol, l'attaque fait vraiment peine à voir, surtout les deux points que sont Britos et Nahuelpán. Il ne faut jamais vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué (ce que je viens de faire tout au long de cet article), mais Peñarol ne devrait pas jouer le titre ayant cinq points de retard et trois équipes devant à cinq journées de la fin. Il faudra désormais se concentrer sur 2021. Côté Liverpool, la Copa Libertadores les attend, ainsi qu'une finale contre Nacional lors de la treizième journée pour sans doute définir le Clausura. Il sera curieux de voir si l'entraîneur Méndez joue à fond la Libertadores ou s'il ne met pas une petite piécette sur le championnat.

Résultats

Liverpool 1 – 1 Peñarol

River Plate 1 – 1 Wanderers

Cerro 0 – 1 Nacional

Fénix 2 – 1 Boston River

Defensor Sporting 1 – 1 Danubio

Montevideo City Torque 0 – 0 Cerro Largo

Plaza Colonia 5 – 0 Rentistas

Progreso 1 – 1 Deportivo Maldonado

Classement

Position

Équipe

 

Points

 

Diff.

 

1

Liverpool

 

22

 

+13

 

2

Nacional

 

20

 

+7

 

3

Montevideo City Torque

 

19

 

+12

 

4

Peñarol

 

17

 

+3

 

5

Plaza Colonia

 

16

 

+10

 

6

River Plate

 

15

 

-1

 

7

Wanderers

 

13

 

+2

 

8

Fénix

 

12

 

-3

 

9

Defensor Sporting

 

12

 

-3

 

10

Progreso

 

12

 

-5

 

11

Deportivo Maldonado

 

11

 

-5

 

12

Cerro

 

10

 

-2

 

13

Boston River

 

10

 

-4

 

14

Danubio

 

8

 

-9

 

15

Cerro Largo

 

6

 

-5

 

16

Rentistas

 

6

 

-10

 


 

Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba