Nacional s’est incliné contre Cerrito avec quelques remplaçants et une polémique bien uruguayenne : ne jamais, jamais, sous-estimer son adversaire au pays du Maracanazo. Peñarol s’est imposé avec une équipe bis à quelques jours de son quart et Plaza a gagné un point qui aurait pu paraître insuffisant, mais qui est finalement essentiel dans la course au titre. Il ne reste que deux journées en Uruguay avant la fin de l’Apertura.

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Tout a commencé le week-end dernier quand Gonzalo Bergessio et Guzmán Corujo ont pris des cartons jaunes contre le Deportivo Maldonado. Bergessio a pris le sien dans le jeu alors que Corujo a reçu son avertissement sur une action « volontaire », histoire de recevoir son cinquième jaune et d’être suspendu automatiquement contre Cerrito pour être « lavé » comme l’on dit et ne plus être sous le coup d’une suspension. Il l’a fait car il se savait un peu blessé et que le synthétique de la pelouse du Charrúa ne lui disait trop rien… Nacional se présentait donc avec une équipe alternative, sans son meilleur attaquant ni son pilier en défense et avec une grosse faiblesse, exploitée immédiatement par l’entraîneur adverse Roland Mercenaro : « ils nous ont pris de haut, se sont lavés leurs cartons jaunes sur notre dos, ont vu le match gagné avant l’heure. Ils vont voir ce qu’ils vont voir ». Quoi de mieux en effet pour motiver une équipe ? Et ce qu’il devait arriver arriva. Cerrito a joué en équipe, fière, répondant coup pour coup face à une équipe qui semblait être désorganisée. Laborda commettait la première faute en mettant un coup de coude sévère sur Juan Manuel Ortiz : penalty. Maxi Silvera n’en demandait pas tant et marquait l’ouverture du score en trompant Rochet côté droit. Nacional semblait désorganisé avec un Candido ne sachant trop se situé, un Ocampo deuxième attaquant derrière un Fernández pas armé pour ça et au milieu de tout cela un pauvre D’Alessandro qui n’a jamais su se situer, jouant parfois derrière les défenseurs centraux, parfois devant l’attaquant. Un électron libre est quand même souvent un électron faible. Au retour des vestiaires, Nacional pousse cinq minutes et se fait prendre en contre avec un deuxième but de Silvera, ce coup-ci dans le jeu. Perujo joue dans le dos de Candido et arrive à centrer vers Flavio Scarone qui remet vers Silvera qui trompe Rochet de prés. Avec son équipe bis, Nacional ne s’en remet jamais vraiment et perd sans doute le tournoi sur cette nouvelle défaite.

Plaza Colonia, l’adversaire au championnat, en a profité pour ironiser sur les réseaux sociaux envers ce grand qui s’est cru trop grand avec ces histoires de suspension… avant de supprimer ledit commentaire devant le tollé et sans doute l’absence de nécessité du championnat de s’immiscer dans la défaite de son adversaire. Côté Nacional, la défaite était quand même prévisible quand on sait à quel point l’équipe est dépendante depuis trois ans de Bergessio. En l’absence du capitaine, l’animation offensive a explosé comme un grain de maïs dans un micro-onde, avec des joueurs un peu partout et un peu nul-part, un Ocampo un peu plus dans l’axe dont les courses semblent inutiles et un Fernández qui ne sera donc pas l’autre argentin qui réussit. En défense, Laborda est à l’origine du premier but et Candido du deuxième, les erreurs ont coûté cher. La défense a semblé dans tous les cas fébriles, ne sachant comment se positionner, si chercher l’attaque par les côtés ou la sécurité. Après quatre-vingt-dix minutes, je ne sais toujours pas si Nacional jouait à trois ou quatre derrière. Au contraire, côté Cerrito, l’équipe a été un éloge de la stabilité avec un schéma de jeu en 4-4-2 simple mais respecté. Les milieux, Perea, Scarone, Rodríguez ont bien annihilé le jeu adverse, et avec un attaquant complet comme Silvera devant, le score aurait presque pu être plus lourd.

Le lendemain, Colonia recevait le Sastre pour pouvoir prendre six points d’avance à deux matchs de la fin… et donc poser neuf doigts sur la coupe de l’Apertura. Au final, il n’en sera rien avec un Prandi qui a rendu le match très compliqué, avec ses plaques de boue sur les côtés, ses ballons rebondissant n’importe comment, son incapacité à laisser le jeu se développer. Pire, pris par la frustration suite à une action contestable, Diogo posait sa semelle sur celle d’un adversaire et écopé d’un carton rouge logique à la demi-heure de jeu. Dans ce contexte, Colonia a géré et a obtenu son objectif : un point de plus d’avance après la journée qu’avant et la possibilité de deux finales. Boston River a essayé timidement, mais l’équipe de Nacho Ithurralde manque cruellement d’attaquant malgré le jeune Larrosa remuant. Le départ acté la semaine dernière de Bentancourt devrait compliquer encore plus l’objectif maintien pour l’équipe rouge et verte.

Dans la série des équipes bis, Peñarol se présentait à Melo avec les trois quarts de son équipe titulaire sur le banc ou resté à Montevideo, mais l’équipe tournesol était excusée quelques jours avant un déplacement essentiel à Lima dans le cadre de la Copa Sudamericana. Dans des conditions de terrain également effroyables, Peñarol s’en est sorti pendant une heure avant de faire rentrer ses cracks et que le match se débloque sur une belle frappe enveloppée de Pablo Ceppelini. Peñarol s’impose grâce à ce but et semble avoir trouvé une nouvelle paix, une rotation efficace, avec des petits jeunes qui ont fait leur entrée comme le jeune Maxi Alonso ou le jeune Agustín Da Silveira, qui ont pu cumuler du temps de jeu et les trois points… De quoi voir l’avenir plus sereinement, et de pouvoir effectuer le déplacement à Lima en étant dans les meilleures conditions. Cerro Largo a été décevant, ne trouvant jamais le rythme du match, manquant un peu comme Boston d’un attaquant capable de jouer sur un terrain compliqué.

Pour le reste…

Les autres équipes de tête ont été décevantes avec Liverpool et River faisant match nul respectivement contre Villa Española et Torque. Progreso et Rentistas se sont également séparés sur un nul, la seule autre victoire de la journée étant celle de Sud América sur Wanderers grâce à un but de Tomás Andrade qui a trompé De Arruabarrena sur coup-franc, profitant de la mauvaise visibilité globale du match.

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Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba