Il n’y a finalement pas eu grand suspense. Pendant que les deux géants confirmaient leur domination sur le continent, le Pérou assurait son statut et conserve sa place de barragiste. Comme il y a quatre ans.

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Bis repetita

Par Romain Lambert

Ricardo Gareca l’a fait. Le Pérou ira au Qatar. Pour une deuxième campagne de qualification d'affilée, l'entraîneur argentin du Pérou a emmené la sélection bicolore aux barrages d’un Mondial. Il faut dire que le Pérou était ultra-favori pour cette dernière journée, confortablement installé à la cinquième place du classement avant le coup d’envoi contre un Paraguay déjà éliminé et sans des joueurs majeurs. Un dernier match qui se jouait à Lima dans un stade Nacional bondé et survolté qui n’a pas arrêté de chanter pour sa sélection depuis la veille et un banderazo déployé devant l’hôtel des joueurs péruviens. Le technicien argentin a fait confiance à son habituel onze et un seul changement avec Edison Flores à la place d’André Carillo blessé. Conscient de l’enjeu énorme devant un public extraordinaire, la Blanquirroja a débuté sur les chapeaux de roue à l’image d’un Advincula qui a retrouvé ses jambes de vingt ans pour rendre son couloir droit en véritable piste de formule 1. Puis c’est Christian Cueva qui faisait parler de sa magie en délivrant une passe magnifique à Gianluca Lapadula pour vite tuer le suspense de la soirée en plantant un but dès la cinquième minute. On vous laisse imaginer l’ambiance à Lima et au Pérou devant ce début de match au scénario parfait. L’intensité mise par les hommes de Gareca a porté ses fruits mais a aussi laissé des séquelles physiques tant les Péruviens semblent lever le pied beaucoup trop facilement après l’ouverture du score et permet au Paraguay de se remettre dans le jeu. Même si Lapadula puis Alex Callens étaient proches de doubler la mise, l’action qui suivait donnait des sueurs froides aux spectateurs avec ce dernier qui a failli marquer contre son camp en lobant Pedro Gallese. Finalement, Yoshimar Yotún libérait le Pérou peu avant la mi-temps d’un sublime but en ciseau après un énorme travail de Cueva qui surnageait clairement cette première période. En deuxième période, le Pérou n’a pas réussi à mettre autant d’intensité et le Paraguay a pris le jeu à son compte mais sans se procurer de situations vraiment dangereuses. Le collectif péruvien a su rester solide dans les moments plus délicats et aurait pu marquer ce troisième but mais qu’importe, la sélection nationale à fait le boulot sans se préoccuper des résultats du Chili et de la Colombie. Le Pérou ira donc au Qatar, pas encore pour le Mondial mais au moins pour disputer la dernière place contre les Émirats Arabes Unis ou l’Australie. Une dernière marche avant de valider son ticket et participer à une deuxième Coupe du Monde d’affilée, la sixième de son histoire.

Les adieux chiliens

Par Jérôme Lecigne

Drôle de match dans le charmant stade San Carlos d’Apoquindo où l’Uruguay a célébré sa qualification alors que le Chili, d’une certaine façon, a dit au revoir à sa génération dorée. Avec deux effectifs largement remaniés et quelques surprises, on a pourtant assisté à une très bonne première mi-temps avec des occasions de chaque côté, que ce soit des frappes des milieux uruguayens très en verve Fede Valverde et Rodrigo Bentancur ou d’Arturo Vidal et Alexis Sánchez côté chilien. Seul bémol, la sortie du matador Cavani sur une blessure au mollet au milieu de la première période. Las, à la mi-temps, tout le monde connaît le score de Pérou – Paraguay et les dernières illusions s’envolent pour l’équipe de Lasarte. L’Uruguay en profite et marque deux buts. Le premier, un magnifique retourné suite à un corner, permet au Pistolero de devenir meilleur buteur de l’histoire des éliminatoires CONMEBOL devant un certain Leo Messi. Les deux ont suggéré ces derniers temps que ces éliminatoires étaient leur dernier. Le deuxième but en toute fin de match est l’œuvre du Faucon Valverde, son sélectionneur lui ayant trouvé un nouveau surnom (après petit oiseau) pour matérialiser son changement de dimension. Victoire logique de la Celeste face à un Chili qui n’y était plus.

Côté uruguayen, ce match a servi à voir Torreira en récupérateur et Rossi dans un duo d’attaquant, sachant que le joueur se repliait au milieu en phase défensive. Bref, le match a servi à faire des essais. Au milieu, Bentancur et Valverde ont été magistraux, dominant le milieu adversaire, montrant encore une fois qu’ils savent être extraordinaire, mais souvent quand il n’y a pas ou peu d’enjeu. La prochaine compétition en fin d’année devrait aider à les définir, soit comme grands joueurs, soit comme milieu trop moderne. Le sélectionneur Alonso en est déjà à quatre victoires en quatre matchs. Côté chilien, rapidement une frustration triste a pris le pas. Se rebeller n’aurait servi à rien. Difficile donc de juger, même si on a vu encore des qualités à Brereton ou évidemment à Sánchez. L’attaque a été bonne mais a eu trop peu de ballon, ce système dépeuplant un milieu de terrain que l’Uruguay avait au contraire bien peuplé.

Alors que les Uruguayens savourent leur troisième place et se préparent, le Chili a commencé à tourner la page. Lasarte est logiquement sur la sellette, même si Vidal a affirmé qu’il souhaite que l’entraîneur continue. Vidal a aussi déclaré « nous aurions dû avoir d’autres résultats, le calendrier fut super dur. On a dû jouer deux équipes relâchées, qualifiées. On n’avait jamais vu l’Uruguay aussi détendu qu’aujourd’hui et cela aurait peut-être était différent si l’on avait tous les deux dû se battre. Il faut essayer de s’améliorer, réfléchir à ce qui a été fait de bien, de mal, pour pouvoir retourner à un Mondial ». Le temps des conclusions viendra pour les Chiliens. Pour le moment, la tristesse l’a emportée.

Pendant ce temps

Pendant ce temps donc, la Colombie a fait le travail au Venezuela, une terre qui ne lui réussit pas forcément beaucoup (aucun but sur les quatre derniers duels, vingt-six ans sans victoire en terres vénézuéliennes). La décision s’est faite sur un penalty tiré puis retiré par James après pourtant une phase qui a vu les Cafeteros frôler à plusieurs reprises la catastrophe, notamment face à Rondón, avant finalement de contrôler un match dont l’intérêt a été totalement ruiné avec l’annonce du 2-0 en faveur du Pérou à Lima. Le deuxième acte était donc finalement anecdotique même si la fin de partie fut plus compliquée pour les hommes de Rueda qui pourront se dire qu’ils ont rempli leur part du contrat sur les deux dernières journées, mais ne devront pas oublier qu’ils n’ont finalement jamais été dans l’espoir d’un improbable miracle.

Pendant ce temps, l’Argentine a maintenu son invincibilité pour la porter à trente-et-un matchs. Rien n’a été facile à Guayaquil mais la Scaloneta sait souffrir, sait résister puis contrôler un adversaire. Julián Álvarez a ouvert son compteur but en albiceleste, il a finalement fallu un penalty quelque peu polémique en fin de partie pour que la Tri équatorienne ne s’incline pas chez elle. Tout ce petit monde se situe bien loin du bilan brésilien. Après le 4-0 passé au Paraguay, le 4-0 passé au Chili, la Seleção a encore tout explosé pour enchaîner un troisième 4-0 consécutif… en Bolivie ! Un exploit qui vient briser une vérité devenue paradigme : le Brésil ne réussit pas en altitude. Pour s’en sortir, la stratégie fut claire : jeu de passes courtes pour faire courir l’adversaire, une possession moins verticale et deux hommes clés, Lucas Paquetá et Bruno Guimarães. Les deux anciens coéquipiers ont porté la Seleção pour lui offrir son troisième succès de l’histoire à La Paz après celles de 1981 et 1997 et surtout, malgré un match de retard, lui offrir le record de points en campagne d’éliminatoires sud-américains depuis l’instauration du groupe unique.

Classement (presque) final

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Crédit photo : Leonardo Fernandez/Getty Images

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.