Ce soir, à 0h45, Flamengo et Independiente s’affrontent au Maracanã pour la finale retour de la Copa Sudamericana après la victoire 2x1 des Argentins au match aller. Les deux équipes se sont déjà affrontées en finale, lors de la Supercopa Libertadores 1995.
Afin d’avoir une seconde compétition continentale après la Copa Libertadores, un nouveau tournoi est créé en 1988 : la Supercopa Libertadores. Pour donner du prestige à la compétition, seuls les anciens vainqueurs de la Copa Libertadores participent au tournoi. Le Racing remporte la première édition, en battant en finale Cruzeiro. En 1995, le nombre de participants est passé de 13 à 17 et la Supercopa Libertadores, également appelée Supercopa João Havelange, débute par des huitièmes de finale, avec un tournoi triangulaire entre São Paulo, Boca Juniors et Olimpia. Le São Paulo FC sort vainqueur et retrouve en quart de finale Cruzeiro. Le calendrier étant surchargé et les deux clubs brésiliens s’affrontant également en finale de la Copa Ouro, il est décidé que cette confrontation comptera pour les deux compétitions et ce match permettra de montrer une nouvelle fois la malice d’Ênio Andrade (lire Cruzeiro – São Paulo 1995, le coup aussi génial que vicieux d'Ênio Andrade).
L’année du centenaire du Flamengo
Flamengo hérite pour sa part en huitième de finale du nouvel entrant dans la compétition, le Vélez Sarsfield de José Luis Chilavert, vainqueur de la Copa Libertadores 1994. En 1995, Flamengo fête son centenaire et la direction veut absolument un titre pour fêter dignement l’anniversaire. Le club recrute des stars comme Válber, Branco ou Mazinho, mais surtout Romário, champion du monde six mois plus tôt, et qui revient à Rio de Janeiro après 167 buts en 209 matchs européens. Les buts pleuvent lors du championnat carioca, Flamengo atteint la finale en grand favori contre Fluminense (la dernière entre les deux clubs avant l’édition de 2017), Flamengo se retrouve mené 2x0, revient à 2x2 avant de voir le ventre de Renato Gaúcho ruiner les espoirs de titre (lire Carioca 1995 : le Fla-Flu dans tous ses états)
Les espoirs du Flamengo se dirigent alors vers le Brasileirão alors que l’entraîneur Vanderlei Luxemburgo est remercié. Le championnat national compte 24 équipes, réparties en deux groupes de douze. Lors de la première phase, chaque club affronte les équipes de son groupe, puis celles de l’autre groupe lors la deuxième phase. Les champions de chaque groupe sont qualifiés pour les demi-finales. Malgré le recrutement d’Edmundo, permettant au Flamengo d’avoir « la meilleure attaque du monde » avec Romário et l’espoir du club Sávio, le Mengão est à la peine dans ce Brasileirão et termine la première phase à la dernière place. La seconde phase est guère mieux et Flamengo est rapidement éliminé de la compétition, avec un bilan final peu flatteur de cinq victoires en 23 matchs.
Reste alors la Supercopa Libertadores pour permettre au Flamengo de ne pas repartir bredouille l’année de son centenaire. Pour donner un nouveau souffle à l’équipe, le fantasque président du Flamengo, Kleber Leite, offre le poste à Washington Rodrigues qui n’a aucune expérience en tant qu’entraîneur. Fan du Flamengo, Washington Rodrigues est en effet journaliste, mais il n’a pas pu résister à l’offre de Kleber Leite. « Je ne suis pas entraîneur, et je ne l’ai jamais été, mais Flamengo ne m’a pas invité, Flamengo m’a convoqué. Et à chaque qu’il me convoque, j’y vais. Pour Flamengo, je ferais n’importe quoi. Si le gardien se blesse et qu’ils ont besoin de moi dans les buts, j’y vais et je joue » expliquait Washington Rodrigues.
Washington Rodrigues débute donc sa carrière d’entraîneur lors du huitième de finale aller de la Supercopa Libertadores 1995, contre Vélez Sarsfield. À Buenos Aires, Edmundo et Sávio font trembler les filets et Flamengo s’impose 3x2. Le match retour est une formalité, dès la 5e minute, Sávio provoque le csc de Maurico Pellegrino. En seconde période, Edmundo sollicite le une-deux avec Romário avant de glisser le ballon entre les jambes de Chilavert. Quelques minutes plus tard, Rodrigo enrhume Flavio Zandoná – le nom a son importance – côté gauche, et sert en retrait Romário, qui marque le troisième et dernier but de la partie. Mais si le match va rester dans les annales, c’est pour une bagarre qui actera la fin du match. Edmundo tente un dribble sur Zandoná, qui lui envoie son bras au visage. Les deux joueurs s’expliquent alors que le jeu continue, et en observant qu’il a l’arcade ouverte, Edmundo donne une claque saignante à Zandoná, qui réplique immédiatement. Zandoná n’en a pas fini, et avec une gauche à faire pâlir Rafael Nadal, il couche Edmundo, qui lui tournait le dos. Romário s’offre un high kick sur Zandoná et la bagarre devient générale, le jeune Aloísio blessant même involontairement son coéquipier Cláudio. Après l’intervention de la police, l’entraîneur du Flamengo Washington Rodrigues ne se montre pas des plus pacifiques, dans un nouvel exemple de la rivalité Brésil – Argentine. « Dans le jeu, ils n’ont pas gagné, et à la bagarre, ils n’ont pas gagné. S’ils veulent jouer encore, on peut. S’ils veulent mettre des coups, on va se battre jusqu’à demain matin. »
Si personne n’est expulsé après le match, la CONMEBOL suspend Edmundo et Romário pour les quarts de finale de la Supercopa Libertadores. Avec notamment un but sur penalty de Sávio, Flamengo bat deux fois le Nacional sur le score de 1x0 et se qualifie donc pour les demi-finales. Flamengo retrouve Cruzeiro, qui a donc éliminé le São Paulo de Telê Santana après 135 minutes de jeu. La demi-finale aller a lieu le 15 novembre 1995, jour du centenaire du club. Si le Flamengo a en réalité été fondé le 17 novembre 1895 (d’abord comme club d’aviron, le football arrivera en 1912), la date anniversaire du club est fixée au 15 novembre, afin de coïncider avec la proclamation de la République du Brésil, qui a eu lieu six ans plus tôt. Flamengo fête dignement son anniversaire avec une victoire 1x0 au Mineirão sur un but de Ronaldão, vainqueur de deux Copa Libertadores avec São Paulo et champion du monde 1994 avec la Seleção. Au retour, malgré un but de Belletti pour Cruzeiro, Flamengo s’impose 3x1 avec notamment un but d’Aloísio Chulapa, et obtient une sixième victoire en six matchs dans la compétition.
Finale et retrouvailles
L’autre demi-finale est un également un choc entre deux équipes d’un même pays et non des moindres : l’Argentine. L’Independiente du champion du monde Jorge Burruchaga, de retour de suspension après l’affaire VA-OM, fait face au grand River Plate de Francescoli, Ortega, Gallardo ou encore Crespo. À l’aller, le doublé de Javier Mazzoni répond à celui d’Enzo Francescoli. Après un nouveau match nul, le billet en finale se joue aux tirs au but. Ortega et Amato ratent pour River Plate et l’Independiente s’impose 4x1 aux tirs au but. Tenant du titre après sa victoire en 1994 contre Boca Juniors, l’Independiente va donc pouvoir tenter de conserver son trophée face à un Flamengo qui n’a plus que cette compétition pour tenter de sauver la saison.
Comme pour la Copa Sudamericana 2017, le vainqueur de la Supercopa Libertadores 1995 est qualifié pour la Recopa Sudamericana, face au vainqueur de la Copa Libertadores. Comme en 1996, le vainqueur de la Copa Sudamericana affrontera donc le Grêmio, vainqueur de la Copa Libertadores 1995 et 2017. Au match aller, l’ambiance à Avellaneda est exceptionnelle et Flamengo se fait surprendre dès la 40e seconde de jeu, avec l’ouverture du score de Mazzoni. Independiente double logiquement la mise en seconde période grâce à un but de Mazzoni après une talonnade de Domizzi, et prend un bel avantage avant le match retour au Maracanã. La semaine du Flamengo est perturbée par un fait divers. Edmundo, blessé et forfait pour la finale, sort de boîte et percute violemment une autre voiture avec sa Jeep. Dans l’accident, trois personnes trouvent la mort et Edmundo, qui roulait trop vite, sera condamné à quatre ans de prison en 2011. Le 6 décembre 1995, 105 000 personnes se rendent au Maracanã pour la finale retour. La première mi-temps du Mengão est plutôt terne et l’entrée en jeu d’Aloísio permet de mettre plus de pression sur les buts d’Independiente. Romário ouvre le score à l’heure de jeu, mais Flamengo se heurte ensuite aux exploits du gardien colombien Faryd Mondragón. Independiente tient le résultat et devient le premier club non-brésilien à remporter un titre au Maracanã. Malgré 7 victoires en 8 matchs, Flamengo passe à côté d’un nouveau titre. L’année du centenaire restera blanche.
2017, le quatrième remake
Les deux équipes, qui ne s’étaient plus affrontées depuis 1970 (avec notamment un 6x5 pour Independiente en 1941 puis un match nul 5x5 au Maracanã en 1951) vont se retrouver à de nombreuses reprises jusqu’au début des années 2000. En septembre 1996, quelques mois après que l’Independiente a perdu 4x1 en Recopa Sudamericana contre Grêmio, Flamengo et l’Independiente s’affrontent à nouveau, dès le premier tour de la Supercopa Libertadores. Après un match nul 0x0 en Argentine, Fábio Baiano marque le seul but de la rencontre et qualifie Flamengo, qui sera cependant éliminé dès le tour suivant, contre Colo-Colo. En 1997, la Supercopa Libertadores cède sa place à une nouvelle compétition : la Copa Mercosul. Flamengo et l’Independiente de Gabriel Milito et Esteban Cambiasso s’affrontent dès l’édition 1999, en quart de finale. Fábio Baiano marque au match aller lors du 1x1 et marque également au retour, tout comme Romário pour une victoire 4x0. Flamengo élimine ensuite Peñarol et bat en finale Palmeiras. La Copa Mercosul 1999 est le dernier titre international du Flamengo à ce jour.
En 2001, Flamengo et Independiente se retrouvent une nouvelle fois, dernier affrontement entre les deux équipes avant 2017. Toujours en Copa Mercosul, toujours en quart de finale. Toujours un match nul à l’aller, toujours une victoire 4x0 pour Flamengo au retour, qui sera défait en finale par San Lorenzo. Lors du match retour contre l’Independiente, l’idole rubro-negro Dejan Petkovic délivre trois passes décisives et deux joueurs s’illustrent par un doublé : l’attaquant Edílson et le défenseur Juan. L’ancien joueur de la Roma a été formé au Flamengo, club où il a évolué de 1996 à 2002, remportant notamment quatre championnats carioca et la Copa Mercosul 1999. Juan est revenu au Flamengo en 2016 et à 38 ans, il vient de prolonger son contrat d’un an au Flamengo. Déjà vainqueur du championnat carioca 2017, Juan a l’occasion ce soir d’écrire une nouvelle ligne à son palmarès et une nouvelle page à sa légende.