Après avoir fait de sa dernière franchise le représentant asiatique à la Coupe du Monde des Clubs, l’Australie accueille la seizième édition de la Coupe d’Asie des Nations, et espère définitivement sceller sa place dans une Confédération dont elle est l’un des grands.

Pour la première fois de l’histoire, la Coupe d’Asie des Nations se pose en Australie, nouveau géant local, et met aux prises des formations qui auront besoin de faire pardonner leur médiocre campagne mondiale de l’été dernier (aucune victoire, quatre formations groupées entre la 27e et la 30e place du classement général à l’issue de l’épreuve). Elles seront ainsi 16, réparties en quatre groupes de quatre, qui chercheront à succéder au Japon au palmarès de l’épreuve. Présentation des groupes.

Groupe A : Australie, Corée du Sud, Oman, Koweït

Le moment que toute une nation attend est enfin arrivé. Avec les légendes Tim Cahill et Mark Bresciano comme seuls rescapés de la génération dorée de 2006, le pays hôte porte l’espoir de tout un peu mais manque d’expérience au plus haut niveau. Néanmoins avec le génial Ange Postecoglou à sa tête et les nouvelles promesses Ryan, Leckie, Juric, Kruze, Luongo et autres Oar, les Socceroos ont tout du favori de l’épreuve (ils sont le nôtre).

Reste qu’il faudra déjà sortir indemne d’un groupe plus délicat qu’annoncé. Car si la Corée du Sud, tellement décevante pendant la Coupe du Monde, fait office d’outsider, Oman ne doit pas être négligé. Car depuis l’arrivée de Paul Le Guen, les Guerriers Rouges, ont acquis une véritable réputation d’équipe dangereuse. Oman a produit de belles séquences lors de la dernière campagne de qualification à la Coupe du Monde, l’Australie doit se souvenir du nul inespéré (voir Coupe du Monde 2014 : la révolte des petits) qui, quelques semaines plus tard, conduisait à l’élimination d’Oman suite à un hold-up jordanien (voir Coupe du Monde 2014 : l'Iran historique) et a modernisé son football au point de professionnaliser son élite en 2013. Une dynamique qui fait d’Oman un parfait épouvantail dans le groupe.

La Corée du Sud devra donc montrer autre chose qu’au Brésil. Les Guerriers Taeguk, rentrés au pays sous la bronca de leurs supporters, ont beaucoup à se faire pardonner. « L’heure du changement », devise de l’équipe pour cette compétition symbolise parfaitement l’état d’esprit des hommes d’Uli Stielike mais les interrogations sont tellement nombreuses que pour bien des fans, cette compétition arrive bien trop tôt, ces derniers espérant même ne pas être la mauvaise surprise du premier tour.

Quelle place reste-t-il pour le Koweït. En pleine crise de confiance, avec un sélectionneur tunisien Nail Maaloul nommé il y a quelques semaines, il semble que les bleus partent condamnés d’avance à la dernière place du groupe.

Pronostic : 1- Australie, 2- Corée du Sud, 3- Oman, 4- Koweït

Groupe B : Ouzbékistan, Arabie Saoudite, Chine, Corée du Nord

Humilié en demi-finale de la dernière édition par l’Australie, sorti sur le fil de la course à la Coupe du Monde brésilienne par la Jordanie, l’Ouzbékistan arrive à cette seizième édition avide de revanche. Emmenés par leurs stars Server Djeparov et Odil Ahmedov, les Loups Blancs de Mijalol Qosimov sont grands favoris d’un groupe qui semble à leur portée. Reste qu’outre l’inconnue habituelle qu’est la Corée du Nord et sa nouvelle pépite Jong Il-gwan, l’Ouzbékistan aura fort à faire face à l’Arabie Saoudite et la Chine.

Les Faucons Verts ont obtenu leur billet pour l’Australie en survolant leur groupe de qualification devant la Chine, l’Irak et l’Indonésie (5 victoires, 1 nul). Si l’habitude des autres nations de la région semble être l’éternel recommencement, l’Arabie Saoudite reste le plus grand spécialiste de l’instabilité avec près de 10 sélectionneurs sur son banc ces dernières années. Mais pour autant, cette grande valse des sélectionneurs ne semble pas perturber les joueurs qui peuvent s’appuyer sur leur expérience pour mieux rebondir. Emmenés par Cosmin Olaroiu qui s’est taillé une solide réputation dans le Golfe, l’Arabie Saoudite peut compter sur une colonne vertébrale stable et efficace qui en fait l’un des grands outsiders, l’une des meilleures chances de l’Ouest dans cette 16e édition.

Attention pourtant à une puissance montante de l’Est : la Chine. Dans la foulée d’une Chinese Super League qui, si elle a perdu en puissance financière à l’échelle mondiale, reste un des nouveaux géants de la Confédération, la sélection entraînée par Alain Perrin a depuis compensé ses lacunes en terme de qualité individuelles (même si Zheng Zhi ou le « Maradona chinois » Wu Lei sont quelques-unes des vraies stars potentielles de l’édition 2015) par une forte progression tactique qui en fait un concurrent à la qualification pour le second tour. Ses récents résultats (invaincue depuis 10 matchs avec notamment une victoire face au Paraguay) plaident en sa faveur et permettent de mesurer l’excellent travail entrepris par le technicien français.

Pronostic : 1- Ouzbékistan, 2- Chine, 3- Arabie Saoudite, 4- Corée du Nord

Groupe C : Bahreïn, Iran, Qatar, Emirats Arabes Unis

Entre le favori iranien et l’attendu Qatar, quelle place pour Bahreïn et Emirats ? C’est la principale question d’un groupe C aux forts accents de l’Ouest. Seule véritable satisfaction asiatique au Brésil, l’Iran de Carlos Queiroz est non seulement favori de son groupe mais l’un des grands favoris pour le titre final. Les Princes de Perse de Jawad  Nekouman n’ont pas connu une préparation des plus tranquilles, Queiroz pointant à de nombreuses reprises le manque de professionnalisme de la Fédération, mais leur discipline tactique a tout pour les faire aller loin. « Nous ne sommes par le Brésil ou l’Argentine. Alors nous devons rester compacts quitte à tous se replier en défense. » Les mots du buteur Reza Ghoochannejhad annoncent la couleur mais rendez l’Iran extrêmement dangereux dès lors qu’il aura franchi le premier tour.

Au milieu des affaires, de la tourmente d’une future organisation de la Coupe du Monde, le Qatar se prépare à vivre sa neuvième Coupe d’Asie avec tous les regards braqués sur sa sélection. L’occasion pour les hommes de Djamel Belmadi de montrer aux yeux de monde qu’ils ont tout de l’outsider. Invaincus depuis mai 2014, les Marrons ont depuis battu toutes les grandes nations de la confédération (Australie, Arabie Saoudite et Ouzbékistan) et décroché leur troisième Coupe du Golfe de l’histoire, la première depuis 10 ans. Entre la politique de développement symbolisée par la fameuse Aspire Academy et malgré la polémique des naturalisations de joueurs comme Sebastian Soria (ironie de l’histoire, finalement absent du groupe des 23), le Qatar, et ses 23 joueurs évoluant au pays, jouera donc une partie de son image mais peut largement envisager une présence au second tour, profitant d’un groupe largement à sa portée.

Car excepté l’Iran, Bahreïn et Emirats Arabes Unis ne semblent pas hors de portée des qataris. Les bahreïnis restent une formidable machine à défendre mais ont connus de tels remous ces derniers mois que leur situation si brillante lors des qualifications est désormais un lointain souvenir. De leur côté, les émiratis sont quant à eux au début d’un nouveau cycle. Qualifiés pour les JO de Londres en 2012, les Blancs ont depuis énormément travaillé avec Mahdi Ali à leur tête pour se reconstruire. Cette stabilité en fait finalement l’adversaire direct du Qatar dans la course à la qualification.

Pronostic : 1- Iran, 2- Qatar, 3- Emirats Arabes Unis, 4- Bahreïn

Groupe D : Japon, Iran, Jordanie, Palestine

En début de semaine, nous vous avons présenté l’histoire de la sélection de Palestine, nouveau participant à une Coupe d’Asie (voir Quand le football libère la Palestine). La mission confiée aux hommes de Saeb Jendeya s’annonce délicate mais pas impossible malgré la présence dans leur groupe des deux derniers vainqueurs de l’épreuve et d’une Jordanie, révélation de fin 2013.

Grand favori du groupe et de l’épreuve, le tenant du titre japonais doit lui aussi se faire pardonner une désastreuse Coupe du Monde et prouver que contrairement à ce que la plupart des suiveurs pense, sa domination sur la Confédération tend à se réduire. Sous la houlette de Javier Aguirre, le groupe a peu changé et reste l’un des plus impressionnants de l’épreuve avec sa constellation de stars internationales. Malgré l’absence de véritable tueur en attaque, capable de conclure les nombreuses séquences collectives qui font la tradition des Samurais Blue (même si Okazaki et autres Muto restent de talentueux attaquants), le Japon devrait logiquement dominer son groupe tant son groupe est supérieur en qualité aux trois autres.

Quart de finaliste de la dernière édition, éliminé de la Coupe du Monde après un barrage face à l’Uruguay (voir Coupe du Monde 2014 : Uruguay et Mexique seront au Brésil), la Jordanie a surpris son monde en nommant l’anglais Ray Wilkins à sa tête début septembre. Et depuis les résultats ne sont pas véritablement au rendez-vous (2 nuls et 7 défaites), au point que la sélection, relativement jeune, semble loin de celle qui fut si difficile à manœuvrer lors des qualifications de la zone pour la Coupe du Monde. De son côté, l’Irak, vainqueur surprise de 2007, est toujours confronté à un contexte politique instable dans un pays toujours ravagé par les combats. Pire, à ce contexte sont venues s’ajouter les rumeurs de corruption au sein même de la fédération et une Coupe du Golfe désastreuse en novembre dernier (élimination dès le premier tour). La grande question est donc de savoir si Radhi Shenaishel, nommé le mois dernier, pourra ramener un semblant de confiance au sein d’un groupe de qualité sur le papier à l’image du petit Humam Tariq, 18 ans, grand espoir au pays, l’un des joueurs du groupe quatrième de la dernière Coupe du Monde des moins de 20 ans. Si Shenaishel y parvient, l’Irak a tout pour venir perturber le Japon, son adversaire lors du match d’ouverture. Reste que devant tant d’incertitudes pesant sur les outsiders du groupe, la Palestine a toute ses chances pour se mêler à la lutte. Il faudra pour cela ne pas manquer son entrée dans la compétition.

Pronostic : 1- Japon, 2- Irak, 3- Palestine, 4- Jordanie

La Coupe d’Asie débute ainsi ce vendredi. Si nombreux s’attendent à une finale Australie – Japon, revanche de l’édition 2011 (voir AFC Asian Cup : l'heure du bilan), les prétendants ne manquent pas. De la Corée du Sud à l’Iran, en passant par les ambitieux Chine et Qatar et les potentiels invités surprise Oman, Irak voire Palestine, ils seront nombreux à lutter contre les pronostics et ainsi nous offrir une 16e édition riche en suspense. 

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.