On a longtemps cru à la possibilité de voir le géant Guangzhou Evergrande enfin détrôné. Au terme d’une saison qui a rapidement viré au duel, les ambitions des concurrents n’auront pas suffi. Les Evergrande restent intouchable au pays.

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Le sprint final : Hebei ruine sa saison

La dernière journée de CSL n’avait qu’un véritable point chaud, la lutte à distance pour la troisième place disputée entre Tianjin Quanjian et le propriétaire de celle-ci au coup d’envoi, le Hebei China Fortune. Le déplacement du promu à Guangzhou, face au champion 2017 Evergrande semblait une mission délicate, il n’en fut rien. Car pour la dernière de Scolari sur le banc du septuple champion, ses joueurs paraissaient avoir la tête ailleurs. Dépassés dans l’envie, les Evergrande concédaient de multiples occasions en début de match avant de céder sur un nouveau ballon perdu dans leurs 30 mètres et conclu par Anthony Modeste. Les hommes de Cannavaro dominaient de la tête et des épaules et étaient récompensés à l’heure de jeu sur une percée de Wang Yongpo qui offrait un but FIFA à Sun Ke. L’affaire était pliée, si Hebei voulait conserver sa place en ACL 2018, il lui fallait s’imposer à Shandong.

Sauf que les hommes de Pellegrini ont totalement raté leur première période, à l’image du gardien Yang Cheng très peu inspiré devant Hao Junmin et Papiss Cissé. Conséquence, Hebei abordait le second acte avec deux buts de retard. Ezequiel Lavezzi allait alors prendre les choses en main. Il s’offrait un doublé en sept minutes pour ramener les siens au score (de la tête et sur un penalty qu’il avait lui-même provoqué), déposait un corner sur la tête de Kim Joo-Young au premier qui déviait pour Dong Xuesheng pour le 3e but des siens et s’offrait un triplé sur penalty dans les arrêts de jeu. Seul souci, tous ces buts n’étaient que des égalisations pour Hebei. Car entre temps, Diego Tardelli avait inscrit un doublé (un coup franc petit filet et une frappe croisée une fois encore mal jugée par Yang Cheng). Conséquence, Hebei ne pouvait espérer s’imposer, pire, les hommes de Manuel Pellegrini se sont même inclinés sur un penalty concédé dès la remise en jeu suivant leur égalisation à 4-4 (oui, c’est possible). Et voilà comment après avoir été sur le podium 14 journées sur 30, Hebei a ruiné sa saison.

Guangzhou Evergrande sans concurrence

À l’heure du bilan de la saison 2017, une seule et traditionnelle question revient : quand sera-t-il possible de mettre fin à la domination totale des Evergrande sur le football chinois. Tout n’a pas été si rose cette saison pour les hommes de Scolari mais le fait est que leur régularité leur permet de gérer les temps faibles et de finalement continuer de dominer la CSL.

Pourtant les prétendants ne manquent pas pour venir jouer le rôle du principal concurrent. Le Shanghai SIPG peut se targuer du fait d’avoir sorti les Evergrande en FA Cup et en ACL, en signant deux énormes cartons (4-0 en ACL, 4-1 à Guangzhou en FA Cup). Seul souci, les hommes de Villas-Boas n’ont jamais réussi à convertir ces occasions. Deuxièmes en championnat, éliminés en demi-finale de l’ACL par le futur vainqueur Urawa, tombés en finale de FA Cup au terme d’un fou derby de Shanghai. De là à y voir un parallèle avec le Jiangsu Suning 2016, il n’y a qu’un pas. Il faut dire que la grande question reste de savoir si Guangzhou Evergrande ne s’impose finalement pas au pays faute d’une réelle concurrence, entendre par cela une concurrence capable par sa gestion, son organisation, de venir lutter sérieusement non seulement sur la durée d’une saison mais aussi sur le long terme plutôt que sporadiquement. Nombreux sont les prétendants à manquer de constance (SIPG et Hebei en sont les meilleurs exemples) quand d’autres, aussi ambitieux soient-ils, manquent tout simplement de cohérence.

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C’est le cas par exemple du Shanghai Shenhua qui a traversé la saison entre mauvais choix, comme celui de faire venir Carlos Tevez, de se séparer de Demba Ba et Óscar Romero, partis en prêt en Europe ou d’installer Gus Poyet sur le banc, virant au passage un Gregorio Manzano qui avait fait de l’excellent travail la saison passée (et surtout rempli les objectifs fixés en début de saison). Au final, le Shenhua a erré en championnat (modeste onzième) et sauve son année 2017 par une victoire inespérée en FA Cup qui lui ouvre les portes de l’ACL après notamment un match retour assez fou face au voisin de la ville, le SIPG. Une finale disputée sans Tevez, qui va rentrer en Argentine, mais avec Obafemi Martins et son duo colombien Gio Moreno – Fredy Guarín. C’est le cas aussi du Jiangsu Suning aux ambitions peu évidentes à cerner depuis que le propriétaire s’est aussi tourné vers Milan. Entre les désirs de départ (et les blessures) des Roger Martínez et autres Alex Teixeira, la nomination sans succès d’un Fabio Capello qui n’aura guère apporté à un groupe jamais renforcé en comparaison de ses concurrents, Jiangsu a passé l’essentiel de sa saison à errer en queue de classement avant de terminer à une incroyable 12e place, sa meilleure performance de la saison.

Les espoirs

Pourtant, la CSL possède en son sein quelques bons élèves qui mériteraient d’être largement au tableau d’honneur. Premier d’entre tous, celui qui repart bredouille alors qu’il est probablement le plus cohérent de tous : Guangzhou R&F. Quand les autres cassent leur tirelire pour aller chercher quelques stars évoluant en Europe, l’autre club de Guangzhou sait dénicher les bonnes affaires. La meilleure de toutes ? Eran Zahavi. Arrivé au club en juin 2016, l’Israélien avait été l’un des jolis coups de la saison dernière, il s’est transformé cette saison en meilleure recrue de l’historie de la CSL au ratio qualité/prix. Avec 27 buts en 30 matchs, il est passé à une marche du record de la CSL et a porté son équipe dans le wagon de tête de la CSL (dans le top 6 pendant 27 des 30 journées, cinquième à deux points d’une place en ACL au final, payant probablement le trou d’air de 11 journées alors que le club avait remporté 5 de ses 6 premiers matchs de la saison). Il a manqué un rien à la bande à Dragan Stojković, un rien parfois brutal comme le 2-7 en cinquième tour retour de la FA Cup dans le derby de Guangzhou alors que les Blue Lions avaient remporté le match aller (4-2). Mais le R&F est probablement l’une des belles satisfactions et confirmation de la saison en Chine. L’association offensive parfaite entre vitesse de Renatinho, impact physique de Junior Urso et réalisme de Zahavi et l’assise défensive symbolisée par la pépite locale Huang Zhengyu sont autant de points forts sur lesquels s’appuyer pour 2018, Guangzhou R&F, qui vient de signer un partenariat avec l’Ajax, a tout du club cohérent capable à terme de venir lutter pour le titre.

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À ses côtés, le Shandong Luneng de Félix Magath a réussi une belle saison même s’il n’a finalement que trop peu fait parler de lui. Sixième au final après avoir passé 28 des 30 journées dans le top 5, le Luneng a également payé une mauvaise passe en septembre (cinq nuls, une défaite en six matchs) qui lui coûte probablement une place sur le podium en fin de saison alors qu’il a souvent fait preuve d’un bel équilibre entre solidité défensive (meilleure défense du championnat) et danger offensif (sixième meilleure attaque) symbolisé par la présence dans ses rangs du trio Graziano Pellé – Papiss Cissé – Diego Tardelli (32 buts sur les 49 inscrits). Impossible aussi de ne pas évoquer l’incroyable saison du promu Tianjin Quanjian. Sous la conduite de Fabio Cannavaro, l’autre club de Tianjin a bousculé la hiérarchie au point de terminer la phase retour en tête (8 victoires, 5 nuls, 2 défaites, soit 29 points quand le futur champion en prenait 27). Là encore, la recette est quasi-identique : meilleure défense de la ligue et une attaque plutôt efficace qui s’est renforcée en cours de saison par l’arrivée du Français Anthony Modeste (sept buts en huit matchs) dont l’association avec Alexandre Pato (s’il venait à rester) a tout pour faire trembler des défenses. Seule inconnue pour 2018, la succession du coach italien parti chercher un nouveau tremplin vers l’Europe en signant chez le géant Guangzhou Evergrande. Autre preuve de la surpuissance du septuple champion local.

Impossible enfin de ne pas évoquer les cas du Changchun Yatai et de Guizhou depuis l’arrivée de Gregorio Manzano. Avant-dernier après neuf journées, le Yatai a vécu une folle deuxième partie de saison sous la direction de Chen Jingang (nommé au soir de la cinquième journée (le club était alors lanterne rouge)). Tellement folle que Changchun termine deuxième meilleure équipe de la phase retour, à un point de Tianjin Quanjian, et septième au final, son meilleur résultat depuis 2012 en s’appuyant notamment sur les qualités de buteur d’Odion Ighalo (15 buts dont la moitié sur les neuf dernières journées). Même trajectoire du côté de Guizhou suite à l’arrivée du magicien de la CSL, Gregorio Manzano. Arrivé sur le banc du promu au soir de la huitième journée et une quatorzième place sur seize, l’Espagnol a redonné vie à son équipe glanant ainsi 1.64 point par match de moyenne (soit la même que Shandong sur toute la saison) tout en relâchant violemment en fin de saison (4 défaites sur les cinq derniers matchs). Guizhou termine ainsi avec le même nombre de points pris sur la phase retour que le champion Guangzhou Evergrande et doit désormais s’attacher à bien gérer l’intersaison pour grimper au classement, le parcours du Tianjin de Cannavaro cette saison montrant qu’il y a finalement de la place pour d’autres équipes pour venir jouer le rôle des empêcheurs de tourner en rond. Ils sont en tout cas la preuve que d’année en année, la CSL resserre les rangs et gagne en compétitivité. À 2018 de suivre la tendance.

Les plus beaux buts de la saison

Classement final

csl2017

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.