Comme chaque année la fédération chinoise (CFA) publie une série de mesures visant à améliorer le niveau de la Super League et réguler les finances des clubs afin que ces derniers soient moins dépendants de leurs investisseurs.

banutip

Quelles sont les grandes mesures prises par la fédération chinois et qui vont réguler la Chinese Super League 2020 ? En voici la liste.

Le quota d’étrangers

On débute avec le changement de quota au niveau des joueurs étrangers qui a été très légèrement modifié. On pouvait espérer un retour du +1 asiatique mais la CFA poursuit sa politique d’isolationnisme vis-à-vis des autres pays de la région, autres pays qui ont tous un quota de joueurs de l’AFC (très récemment la K League a même décidé d’ajouter en plus un quota +1 pour les joueurs de l’ASEAN (fédération de l’Asie du sud-est)). La seule chose que la CFA a fait est d’augmenter d’un slot le quota de joueur étrangers (voir tableau ci-dessous)

 

2019

2020

Nombre d’étrangers sous contrat dans l’effectif

6

7

Nombre d’étrangers enregistrés en même temps

5

6

Nombre d’étrangers sur la feuille de match

4

5

Nombre d’étrangers présents dans le onze de départ

3

4

 

Mais là encore le règlement publié par la CFA est très vague quant à la possibilité de faire jouer ou non le sixième joueur en championnat, car la notion d’être sous contrat avec le club et d’être enregistré pour la compétition est assez floue. On se demande ainsi quel est l’intérêt pour un joueur étranger de venir jouer le sixième larron et de rester en tribune ou de simplement pouvoir jouer avec l’équipe réserve.

Du côté de la China League One (l’étage inférieur), les modifications sont aussi très légères avec une augmentation du nombre de joueurs pouvant être inscrit sur la feuille de match.

 

2019

2020

Nombre d’étrangers sous contrat dans l’effectif

4

4

Nombre d’étrangers enregistrés en même temps

3

4

Nombre d’étrangers sur la feuille de match

2

3

Nombre d’étrangers présents dans le onze de départ

2

2

Les naturalisations

L’autre question que l’on pouvait légitimement se poser, était la possibilité d’encadrer la course au passeport chinois. En effet suite à l’ouverture de la boite de Pandore par la CFA en 2019, le Guangzhou Evergrande a foncé pour signer les meilleurs étrangers éligibles en vue de la saison 2020 et ainsi potentiellement biaiser le championnat. Pour éviter cela la CFA a édité le règlement : Tout joueur naturalisé possédant une ascendance chinoise d’au moins 25% (grands-parents), sera enregistré comme joueur local et pour ce point il n’y aura aucun quota applicable à la différence d’un joueur de Hong Kong, Macao ou Taiwan. C’est le cas des Li Ke (Nico Yennaris), Hou Yongyong (John Hou Sæter), Roberto Siucho, Tyias Browning (attente éligibilité de la FIFA pour jouer en équipe nationale), Qian Jiege (Alexandre N’Doumbo), etc. Tout joueur sans relation de sang avec la Chine qui a été naturalisé (cinq années de présence sur le territoire chinois) et qui est éligible pour jouer en équipe nationale d’ici le 28 février 2020, sera enregistré comme joueur local, dans la limite d’un joueur enregistré par équipe, au-delà de cette limite, tout joueur naturalisé « non chinois » sera alors intégré au quota des joueurs étrangers. Avec cette dernière règle, la CFA tape fort sur le Guangzhou Evergrande puisque pour la saison 2020, il va falloir que le champion de Chine fasse des choix drastiques. La liste des joueurs éligibles au seul emplacement de naturalisé « non chinois » d’Evergrande pour 2020 est Alan, Ricardo Goulart, Ai Kesen (Elkeson) et Aloisio.

pedrodelgado

Toutefois un cas assez particulier est apparu à la suite de l’édition de ces nouvelles règles. Pedro Delgado du Shandong Luneng a été naturalisé sur une base assez opaque en 2019, le club aurait soi-disant trouvé une ascendance avec une partie de la famille chinoise originaire du Guangdong, personne n’a pu vérifier la véracité des informations, mais suite à un fabuleux lobby de la part du club, le joueur a été naturalisé et a joué en tant que joueur local. Sauf qu’en 2020, il sera considéré comme chinois mais utilisera une place d’étranger car inéligible pour l’équipe nationale suite à cinq sélections avec les U21 portugais lors des éliminatoires de l’EURO U21 2019. C’est là que l’on comprend que la CFA a ouvert la porte à la naturalisation avant de réfléchir et d’informer les clubs de l’imbroglio administratif que cela pouvait générer au niveau de la FIFA, de l’AFC et de la CFA.

Le Salary Cap

C’est le paragraphe qui a fait jazzer les médias occidentaux qui ont annoncé un cataclysme, un exode de l’ensemble des joueurs étrangers suite à l’encadrement des salaires. Une fois de plus les médias mainstream font du sensationnel plutôt que de relayer la véritable information.

  • Les joueurs étrangers

Le plafond fixé par la CFA est de trois millions d’euros nets d’impôts par saison. La limite de rémunération prend en considération la prime à la signature, les droits d’images, les stock-options, les véhicules ou tout autre avantage en nature. À cela s’ajoutent les bonus collectifs qui ont été négociés lors de la signature de l’accord financier (2019-2021) entre la CFA et les clubs de Chinese Super League et de China League One. Enfin l’encadrement des salaires ne touche que les nouveaux contrats (joueur transféré ou prolongation de contrat) à compter du 1er janvier 2020. Autant dire que des joueurs comme Cédric Bakambu ou bien Yannick Carrasco qui sont sous contrat jusqu’à fin 2021 et 2022 ne sont absolument pas impactés par le salary cap.

  • Les joueurs locaux

Pour les joueurs chinois ou naturalisés, la donne change aussi au niveau salarial, puisque le plafond est désormais fixé à 10 millions de yuans bruts (environ 1.3M€). Comme pour les joueurs étrangers, la limite de rémunération prend en considération la prime à la signature, les droits d’images, les stock-options, les véhicules ou tout autre avantage en nature. En plus des 10 millions, il y a la possibilité d’obtenir une augmentation de 20% du salaire brut pour les joueurs ayant été appelés pour les matchs de Coupe d’Asie, des éliminatoires de Coupe du Monde 2022 et d’Asie 2023, soit un total de 12M¥ (environ 1.5M€) brut. Ce règlement s’applique à tout nouveau contrat (joueur transféré ou prolongation de contrat) en date du 20 novembre 2019.

Modification de la taxe 100%

La fameuse taxe 100% mise en place en 2017 et qui avait fait réagir beaucoup de monde, a été modifiée. Désormais elle ne s’appliquera que sur le montant dépassant la limitation en vigueur (environ 6M€). Par exemple sur un transfert à 8 millions d’euro, le club sera imposé à hauteur de 2M€ et non plus à hauteur de 8M€, ce qui fait que le devra payer un total de 10M€ et non 16M€ comme par le passé.

Championnat U23

Afin de pouvoir créer un championnat U23, le championnat des réserves de la China League One a été supprimé sans que les clubs de CL1 n’aient pu dire quoique ce soit. Les clubs de CSL, CL1 et CL2 seront regroupés pour former cette nouvelle compétition. Un maximum de trois joueurs de 23 ans et plus seront autorisés à prendre part aux matchs. Chaque équipe aura aussi le droit d’enregistrer jusqu’à cinq joueurs de la tranche d'âge 17-19.

 

Comme chaque année la fédération pense réformer le football en Chine. Comme chaque année des failles vont apparaître, même si cette fois, d’autres organes gouvernementaux vont prendre part aux contrôles des finances et des contrats des joueurs. En plus de tous les règlements que nous vous avons présentés au-dessus, la CFA a mis en place un plafond d’investissement de l’ordre de 141M€ par club avec des dépenses salariales qui ne doivent pas dépasser les 60% du montant total de l’investissement. L’encadrement des finances des clubs va permettre une meilleur stabilité financière, l’augmentation du quota était souhaitable, même si je ne suis pas un grand fan surtout si les nouveaux étrangers sont des attaquants. Un quota +1 pour un joueur de l’AFC aurait été très appréciable, mais je ne pense pas que la CFA fasse marche a rien dans les prochaines années.

La règlementation sur la naturalisation pose un problème philosophique sur la définition même de ce que c’est d’être « chinois ». En effet un joueur comme Nico Yennaris, né en Angleterre, n’ayant jamais pensé un jour venir en Chine, n’ayant jamais joué une seconde en Chine, est considéré comme chinois de souche grâce à sa mère et jouit d’un statut de joueur local. D’un autre côté, un joueur naturalisé sans lien de parenté avec la Chine, qui réside et joue en Chine depuis cinq-dix ans, qui s’est adapté et intégré à la vie locale, mais qui n’est pas éligible à l’équipe nationale car il a joué une rencontre pour son ancien pays, a droit au passeport chinois mais pas à être considéré comme joueur « chinois » dans le championnat dans lequel il évolue depuis de nombreuses années.

Prochaine étape pour les reformes du football chinois courant du premier trimestre ou semestre 2020 avec normalement l’annonce de la création d’un organisme indépendant (oui oui) de la CFA et du Bureau des Sports, pour gérer les championnats professionnels et le développement économique de ces derniers.

Sebastien Lucas
Sebastien Lucas
Rédacteur Asie, spécialisé Chine (CSL, CFA) à suivre sur @seb_perpignan Fan du Shandong Luneng et de l'équipe chinoise depuis 2005,中国加油 !!!