À peine le MLS Is Back Tournament terminé, la saison régulière de MLS a repris ses droits, sortant ainsi de sa bulle floridienne. On fait le point après plus de quinze jours de compétition.

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Le 11 août dernier, Portland et Orlando City s’affrontaient en finale du MLS Is Back Tournament, la Coupe du Monde sauce MLS. Le lendemain, Dallas et Nashville, deux absents de ce tournoi pour cause de COVID-19 (re)lançait la fin de saison régulière. Le principe est simple : les trois matches de groupes du MLS Is Back Tournament sont pris en compte dans le classement de la saison « normale » de MLS – sauf pour Dallas et Nashville contraints de s’affronter à trois reprises (sic) – et l’on ajoute à ces matchs dix-huit nouvelles journées pour une phase régulière fixée à vingt-trois matchs avant de passer aux play-offs.

MLS Is Back Tournament : nouvelle donne ?

La première question qui vient donc à l’esprit est donc de savoir s’il y a eu un avant et un après MLS Is Back Tournament. À la vue de la finale de ce tournoi, on serait tenté de dire que bien des choses pourraient avoir changé. Mais la réponse se situe un peu entre les deux. D’une part car il semble prématurer de tirer la moindre conclusion définitive d’un tournoi organisé après des semaines d’inactivité, à huis clos, dans une bulle, et auquel tout le monde ne participait pas. D’autre part car finalement, certains clubs en ont profité pour bien travailler quand d’autre ont flanché.

On aura ainsi vu quelques surprises qui finalement n’en furent pas véritablement dès lors que l’on s’est penché sur le contenu. Le premier exemple est bien évidemment Cincinnati. Les petits nouveaux de la saison précédente avaient souffert, l’arrivée de Jaap Stam dans ce contexte si particulier était observée de près. L’intelligence du Néerlandais aura été de savoir jauger rapidement son effectif en modifiant totalement l’approche tactique des siens après la gifle infligée d’entrée de tournoi (0-4 face au Crew). Au point qu’en renforçant son assise défensive et jouant sur les transitions rapides à la perte de balle, Cincy a déjoué les pronostics et surtout renversé deux montagnes annoncées, New York Red Bulls et Atlanta, exposant les failles dans les couloirs de ces derniers. Et ainsi les choses ont changé. Frank de Boer n’a pas résisté au tournoi raté de Five Stripes très décevants (aucun point et surtout aucun but !), Atlanta retrouve la saison régulière avec un nouveau coach (intérimaire ?). Les autres exemples sont à trouver également du côté d’un Philadelphie au sein duquel le gamin Brenden Aaronson a confirmé qu’il était véritablement un diamant, ou du côté des Quakes sauce Almeyda avec leur jeu assez unique en MLS basé sur le un contre un aux quatre coins du terrain, le pressing intensif et l’utilisation de la largeur du terrain pour au final faire d’une franchise à la dérive l’une des plus spectaculaire de l’été (vingt-et-un buts inscrits dans les cinq matchs les concernant). Mais aussi bien évidemment du côté d’Orlando.

Personne n’aurait misé un centime sur les Lions au départ d’un tournoi qu’ils accueillaient, aussi particulier soit ce tournoi. Et pourtant, emmenés par un Nani retrouvé (impliqué dans sept des douze buts de sa formation), Orlando City a déjoué tous les pronostics, en confirmant finalement quelques signes avant-coureur). Pour cela, Óscar Pareja a posé une 4-2-3-1 plus stable défensivement, le duo Oriol Rosell – Jhegson Méndez sécurisant l’axe devant les deux centraux, et mis en place un système dans lequel le milieu de terrain fonctionne par des circuits de passe imposant des séquences de possession. Le tout donc avec un facteur X nommé Nani qui semble enfin retrouvé. Conséquence, les Lions se sont hissés en finale, certes perdue face aux Timbers mais qui va servir à solidifier les nouvelles bases d’une franchise floridienne qui devra désormais être prise au sérieux.

MLS is Black

Mais s’il y a un avant et un après vis-à-vis du tournoi estival, il n’est pas sur le terrain. Comme l’ensemble de la société américaine, la MLS a évidemment été (et est toujours) remuée par une nouvelle ère qui semble vouloir se dessiner au pays, celle du changement porté par le mouvement Black Lives Matter. Après l’effroyable assassinat de Georges Floyd en mai dernier, plus de soixante-dix joueurs noirs de la MLS ont créé la Black Players Coalition, une association de lutte contre le racisme dont l’objectif est de « se battre contre les inégalités raciales dans notre championnat, soutenir tous ceux qui combattent le racisme dans le monde du foot et faire du bien aux communautés noires aux États-Unis et au Canada » et ont choisi la date symbolique du 19 juin (Juneteenth qui commémore la fin de l’esclavage aux États-Unis). Le combat pour l’égalité passe ainsi par des prises de position des joueurs et de certains clubs mais aussi des messages éducatifs envers les suiveurs de la MLS avec l’idée d’avoir un réel impact sur les mentalités.

Le mouvement, depuis renommé Black Players for Change, a reçu le soutien des instances et ne cesse d’agir depuis, dépassant le simple cadre des gestes symboliques pour y adjoindre de réels actes visant à faire évoluer la société. Un mouvement depuis secoué par l’affaire Jacob Blake qui a elle aussi eu bien des conséquences sur la MLS qui dépassent le simple cadre du sport. Comme en NBA, en MLB et en WNBA, les joueurs ont ainsi décidé de boycotter les rencontres prévues quelques jours plus tard, notamment après le drame de Kenosha, ce qui a poussé la ligue à entériner le report de cinq rencontres. Une décision qui a irrité Dell Loy Hansen, propriétaire du Real Salt Lake coupable de propos racistes en guise de commentaire au boycott et qui a menacé de retirer ses billes de la franchise. Des propos rapidement repris au pied de la lettre par Jozy Altidore, puis condamnés par les associations de joueur et la ligue. Une ligue qui a ouvert une enquête contre Hansen et a publié un communiqué dans lequel elle annonce qu’elle « travaillera avec M. Hansen pour soutenir les efforts de vente de l’entreprise et travaillera en étroite collaboration avec les dirigeants du club pour soutenir l’équipe pendant la période de transition ». Un premier pas certes, mais un pas dans la voie du changement, plus aucun débordement ne sera désormais toléré, grâce à la véritable prise de position collective des joueurs. Preuve s’il en fallait que si l’analyse de la « géopolitique du football » tend à souvent surestimer son impact, son rôle dans la construction et le développement des sociétés demeure quant à lui indéniable, surtout quand les instances s’impliquent véritablement.

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Seattle et Toronto enchaînent

Reste donc le terrain. Deux équipes sont parfaitement sorties de leur bulle : le Toronto FC et les Sounders. Pour les premiers, les esprits chagrins diront que le calendrier et les conditions sanitaires y contribuent : les équipes canadiennes vont passer leur temps à s’affronter entre elles jusqu’à mi-septembre en raison des restrictions de voyage vers le Sud et surtout la nécessité pour tout voyageur arrivant au Canada d’observer une quarantaine de deux semaines. Alors le TgFC a battu à deux reprises des Whitecaps bien pâles et s’est offert l’Impact pour prendre les commandes de la conférence devant un Crew quelque peu à l’arrêt (une défaite face aux NCFC et un nul à Cincinatti) et le duo relancé par le tournoi d’été, Philadelphia Union – Orlando City.

À l’Ouest, l’équipe de la reprise est sans aucun doute Seattle. Pour le retour de la phase régulière, les Sounders sont allés donner une leçon d’efficacité au grand rival Portland qui a globalement dominé la rencontre mais faute de justesse ou tombant sur un Stefan Frei infranchissable a fini par céder à cause du facteur X des Sounders, Raúl Ruidíaz. Le Péruvien s’est offert un doublé et délivré une passe décisive sur le troisième but et ainsi permis aux siens de rappeler que malgré un MLS Is Back Tournament loin d’être réussi (une seule victoire en quatre matchs et une élimination sous forme de gifle face au LAFC), il faudra bien compter sur eux. Preuve (définitive ?) justement face au LAFC avec, la même recette. Un golazo de Ruidíaz d’entrée de partie, un doublé en 59 secondes dès le retour des vestiaires signé Jordan Morris (record du club) et l’affaire était pliée, Seattle a appuyé sur les mêmes faiblesses que le LAFC avait déjà exposé face au Galaxy quelques jours plus tôt : une défense qui ne sait plus s’aligner, peine au marquage et surtout qui est systématiquement prise dans son dos à la perte de balle. Un problème que Bob Bradley va devoir rapidement corriger s’il veut que l’un des grands prétendants au titre, actuellement englué à la septième place de la conférence, sous la menace directe des Quakes et du Galaxy.

Classement

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Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.