Une année de Copa América, les clubs brésiliens qui ont réussi à conserver leurs talents se retrouvent devant un souci de gestion des effectifs. Quand les compétitions internationales se multiplient, c’est tout un championnat qui peut s’en retrouver faussé.

L’épineux souci des compétitions internationales

Si avoir des joueurs de son effectif convoqués en sélection nationale est bénéfique au prestige d’un club, on ne peut pas en dire autant de l’effet produit sur sa compétitivité. A ce titre, les choix opérés par Dunga en vue de la Copa America Centenario ne fait pas que des heureux au sein du Brasileirão

Cette année, ce sont cinq favoris à la victoire finale qui se voient lésés d’une pièce maitresse : São Paulo perd son solide défenseur Rodrigo Caio, l’Atlético Mineiro le latéral Douglas Santos, l’Internacional se passera d’Alisson, gardien et bellâtre des gauchos en partance pour l’Europe, et le Corinthians évolueront sans Elias, ultime pilier du sacre de 2015 encore au club avant son probable départ pour la Chine. Compliqué. Mais pas autant que la situation de Santos, le cinquième de ces clubs fournisseurs de talent, dont c’est le système offensif entier qui partira endosser la liquette auriverde au states : Les deux prodiges Lucas Lima et Gabriel devant accompagner un Ricardo Oliveira symbole de la détresse brésilienne au poste d’avant-centre, détresse accrue par sa blessure qui l’a conduit au forfait.

Le calendrier du Brasileirão, calé sur l’hiver austral, et avec des mois de juin-juillet-août souvent riches en compétitions internationales, est très critiqué par les techniciens brésiliens et leurs staffs, dont le travail est parfois sabordé par cette cohabitation. Sans ces trois joueurs, le Santos de Dorival Junior risque de perdre par exemple quelques points cruciaux pour son objectif final, la première place. En plus du calendrier international, le mercato européen biaise également le championnat brésilien, pillant les équipes en bonne forme, alors au cœur du tournoi. Encore une fois Santos peut en être une belle victime, au regard de l’intérêt que suscitent Gabriel et Lucas Lima outre-Atlantique qui tous deux pourraient finalement ne jamais revenir à Villa Belmiro après la Copa Centenario.

L’Europe problème et solution ?

Si elle tend la plupart du temps à vider le Brasileirão de ses talents, l’Europe peut aussi en être l’origine de la solution au problème brésilien. L’association Bom Senso FC, initiée et soutenue par de nombreux anciens joueurs tel que Dida, Cris, Alex ou Juan, demande une réforme du football brésilien et propose par exemple, par la voix de son consultant Luis Filipe Chateaubriand, de caler le Brasileirão sur le calendrier européen. C’est bête comme chou, mais cela aurait le mérite d’augmenter la compétitivité et l’attractivité du championnat et de stabiliser les effectifs. Le seul hic de cette proposition concernerait les grosses chaleurs de l’été brésilien, sévissant de novembre à mars, qui feraient à coup sûr souffrir les organismes.

L’idée se répand également sur le continent sud-américain. L’Argentine avait ainsi lancé sa nouvelle formule avec une élite à 30 avec comme objectif de mettre en place un championnat long et d’harmoniser le calendrier sur le calendrier européen. Si la première mouture d’une saison argentine à l’européenne devrait voir le jour à la fin de l’été prochain, on n’en connait pas encore la forme exacte mais le processus est lancé. Ailleurs, alors qu’au Chili l’idée d’un tournoi long a également émergée ces dernières semaines, avant d’être retoquée par la Fédération, certains résistent encore à la tentation européenne. C’est le cas de l’Uruguay, pourtant déjà aligné sur les saisons européenne mais qui cherche désormais à s’en éloigner, invoquant ainsi la météo. A partir de 2017, une saison uruguayenne s’écoulera sur une année civile, débutant en février, se terminant en décembre. Comme au Brésil aujourd’hui.

Quoi qu’il en soit, au Brésil, la réflexion est lancée, nul doute désormais qu’elle fera réfléchir la CBF et les instances dirigeantes des clubs. Santos les premiers… 

Photo : Pedro Vilela/Getty Images

Simon Balacheff
Simon Balacheff
Médiateur culturel, travailleur humanitaire et bloggeur du ballon rond tourné vers l'Amérique Latine. Correspondant au Brésil pour Lucarne Opposée