Après une année 2019 tronquée par un contexte social perturbé au pays, le Chili retrouve son championnat en 2020. Et après avoir attendu près de quatre mois pour certains, la compétition va donc enfin reprendre. Et le paysage pourrait avoir quelque peu changé.
Le football est donc de retour au Chili avec la reprise du championnat. Un championnat rendu particulier par la fin de saison dernière et les différents choix faits par l’ANFP, notamment en ce qui concerne les promotions/relégations. Des relégations, il n’y en aura pas eu en 2019 et si certains y voient un moyen de sauver le soldat U de Chile, tout le monde est donc de retour et peut même accueillir les deux promus. Car au terme d’une longue bataille juridique, les Wanderers ont acquis le droit de revenir dans l’élite, ils seront accompagnés de La Serena qui a gagné son ticket la veille de la reprise du championnat en écartant le Deportes Temuco. Vous l’aurez compris, s’il y a deux promus et aucune relégation, cela signifie que la Primera División 2020 se jouera à dix-huit, on reviendra à seize en 2022 (et on sera à dix-sept l’an prochain). L’autre nouveauté réside dans le mode de détermination des relégués.
Sortez les calculatrices
Trois équipes vont descendre à l’issue de la saison, pour comprendre comment elles le vont, il faut se poser et brancher les cerveaux : premièrement, le mode simple, la table annuelle. Le dernier de celle-ci sera automatiquement relégué en deuxième division, comme d’habitude. Pour l’instant, c’est simple. Ça se complique quand on doit évoquer les deux qui vont l’accompagner. Cette année, le Chili a choisi de faire revenir les promedios, ce mode de calcul sur plusieurs tournois qui fait tant débat de l’autre côté des Andes au motif qu’il protègerait les gros (pensées pour River Plate ou Independiente…). Pour établir cette table, on va donc prendre la moyenne de points pris sur deux tournoi, celui de 2020 et le précédent (les deux promus n’auront que 2020 pour s’en sortir). Mais le Chili étant le Chili, il aime être original. Car cette table, dite ponderada (ou de descenso) a choisi un mode de calcul des plus étrange en se basant sur le fait que la saison 2019 n’a pas été à son terme. Plutôt que de faire la moyenne de points sur les deux années, on va donc additionner les moyennes de points pris en 2019 et en 2020 pondérées à 60% pour 2019 et à 40% pour 2020. Pour faire simple, si vous avez pris 30 points en 2019, vous aurez pris 30/24 soit 1.25 point/match. Pondérée à 60%, votre moyenne 2019 est alors de 0.75. Si à l’issue de 2020, vous prenez 30 points, votre moyenne sera de 30/34 soit 0.88. Pondérée à 40%, vous obtiendrez 0.35. On additionne alors 0.75 et 0.35, cela donne votre promedio. On vous avait prévenus, le Chili n’aime pas faire simple. Bref, qu’importe le calcul, à l’issue de la saison, le dernier de cette table ponderada sera relégué, l’avant-dernier disputera un barrage face à l’avant-dernier du classement annuel dont le vainqueur sera sauvé.
Dernières nouveautés du règlement, chaque équipe devra désormais posséder chaque week-end deux U21 (nés après 1999 donc) qui devront avoir totalisé 70% du temps de jeu à l’issue de la saison (soit 2142 minutes). Parallèlement à cela, le quota de joueurs étrangers reste le même, chaque club ne peut en compter que cinq.
On prend les mêmes ?
Changements en coulisse, changements sur le terrain ? Pas sûr. Car si quelques effectifs ont été bousculés, on devrait retrouver les mêmes acteurs pour venir lutter pour le titre et les accessits. À commencer par le duo Universidad Católica – Colo-Colo. Le champion sortant a perdu du monde, notamment des joueurs comme César Fuentes, Sacha Sáez ou Jeisson Vargas, qui ont su s’avérer précieux pour les deux premiers, a perdu aussi et surtout son coach, Gustavo Quinteros, parti tout au Nord du côté de Tijuana. Mais le champion sortant a réussi quelques jolis coups. D’abord en s’attachant les services d’Ariel Holan, dont la philosophie de jeu intéressante n’est plus à démontrer (son passage à Independiente plaide pour lui, même si l’affaire s’est mal terminée), a conservé Edson Puch et s’offre deux attaquants très intéressants, Gastón Lezcano, qui va connaître ainsi son quatrième club chilien, et surtout Fernando Zampedri, souvent précieux du côté de Tucumán et de Central.
Du côté du dauphin, si Esteban Paredes est toujours là, on a surtout laissé partir les légendes. Exit Jaime Valdés et Jorge Valdivia qui ne semblaient pas véritablement entrer dans les plans de Mario Salas et dont les performances n’auront été finalement pas assez régulières pour véritablement briller. Leur succession est assurée par un recrutement offensif de très haute volée : Leo Valencia, Matías Fernández pour la création, Nico Blandi pour muscler davantage la finition, et des arrivées telles que César Fuentes au milieu, et le retour du prometteur Brayan Véjar derrière, les munitions ne manqueront pas et Mario Salas va devoir enfin convaincre, le succès en Copa Chile masquant par un premier titre un contenu peu convaincant.
Au royaume des géants locaux, reste le cas de l’Universidad de Chile. Avant-dernière du précédent exercice, la U a été sauvée du pire par l’absence de relégation et a décidé d’un grand ménage. Icone du club, Johnny Herrera a été invité à aller voir ailleurs, ce qui a créé quelques réactions, Marcos Riquelme dont le prêt raté a pris fin a été renvoyé vers la Bolivie, dans sa suite, trois autres attaquants sont partis (Leandro Benegas, Matías Campos López et Sebastián Ubilla). On semble donc partir sur un nouveau cycle, avec le cadeau Copa Libertadores en prime, et si Hernán Caputto poursuit à la tête de l’équipe (avec une mission supplémentaire de parvenir à se mettre les hinchas dans la poche) le recrutement reste intéressant : retour de Pablo Aránguiz au pays, retour de Walter Montillo dix ans plus tard, arrivée de Joaquín Larrivey devant. Reste à savoir si cette U va réussir à gommer ses défauts de l’an passé à savoir se montrer efficace devant et ne pas sombrer derrière. Ce qu’elle a montré en finale de Copa Chile.
Plus dense que jamais
Résumer le championnat chilien aux trois géants serait pourtant commettre une grave erreur. Car la liste des prétendants aux accessits, voire plus, est longue. On va ainsi suivre avec grande attention l’évolution du Palestino d’Ivo Basay qui perd sa machine à marquer Lucas Passerini, parti poursuivre son duel avec Jeraldino au Mexique, mais réussit quelques jolis coups, de Gastón Guruceaga dans les buts à Bryan Carrasco au milieu en passant par le duo de la U Leandro Benegas - Matías Campos López. Des paris certes, des joueurs à relancer, mais un système qui peut fonctionner. À suivre aussi avec attention, l’Audax Italiano sauce Francisco Meneghini. On se doutait que l’ancien espion de Bielsa ne resterait pas longtemps sans travail depuis son départ de La Calera, son arrivée du côté de la Florida s’annonce excitante. Il aura certes à devoir trouver un moyen de compenser le départ de l’essentiel Lucas Passerini devant mais le recrutement focalisé sur les milieux laisse entrevoir aussi que le système va changer (et avec Meneghini, il est certain qu’on ne cherche pas vraiment à allonger sur un pivot). Autre formation à suivre avec attention, l’ancien club de Meneghini, Unión La Calera, qui s’offre un effectif plus qu’intéressant : le trio de la Católica Sacha Sáez, Diego Rojas, Jeisson Vargas, l’expérience de Santiago García (sept ans en Europe, deux au Mexique), de Felipe Corder et de Felipe Seymour, à ranger dans les arrivées. De quoi offrir une matière première de haute qualité à Juan Pablo Vojvoda et permettre aux Cementeros d’ambitionner jouer les trouble-fêtes bien plus longtemps que la saison dernière (il suffira d’éviter un trou d’air).
Il ne faudra cependant pas oublier bien d’autres équipes que l’on devrait retrouver à la lutte pour les accessits. Citons : Unión Española, qui va revenir avec le couteau entre les dents après sa bataille juridique perdue face à la U, qui réussit à attirer l’ancien de Peñarol Cristian Palacios. L’Everton de Javier Torrente qui a procédé à un grand ménage avec des recrutements alliant qualité et expérience (citons notamment Johnny Herrera (ex-Universidad de Chile), Marco Sebastián Pol (ex-O'Higgins), Patricio Rubio (ex-Universidad de Concepción), ou encore Carlos Lobos (ex-Universidad Católica). L’école Huachipato du talentueux Gustavo Florentín, qui s’appuie toujours des recrutements jeunes et intelligents, O’Higgins du Pájaro Gutiérrez et d’Augusto Batalla, ou encore le nouveau Universidad de Concepción version Eduardo Acevedo qui arrive porter la bonne parole et méthode du Defensor Sporting et qui justement recrute fort en lorgnant du côté de l’Uruguay et du côté d’anciens de la Violeta (citons l’immortel et amateur de poésie Nicolás Correa, Guillermo Reyes, Matias Cabrera, l’ancien grand espoir du foot celeste Gonzalo Bueno, Cecilio Waterman…).
Restera de la place pour les surprises, qui peuvent venir des Pumas d’Antofagasta de Juan Manuel Azconzábal, que l’on attend à un niveau supérieur à celui montré l’an passé, de Coquimbo Unido, auteur d’un remarquable tournoi 2019 même si le club change tout, avec un nouvel entraîneur Germán Corengia – auteur d’un excellent travail avec Unión San Felipe l’an passé – et une liste des départs/arrivées donnerait même le tournis à l’AS Monaco, les Dragones d’Iquique, qui pour entrer dans leur nouveau stade, rapatrient le duo Rafael Caroca – Álvaro Ramos et leur adjoint l’expérience et le talent de Gustavo Lorenzetti, tout en réalisant quelques coups intéressants sur le marché (Aveldaño en défense, Sebastián Zúñiga au milieu pour en citer quelques-uns) ou encore le Curicó Unido de Nicolás Larcamón. Enfin, on suivra avec attention les deux promus, les Santiago Wanderers version Miguel Ramírez et le Deportes La Serena désormais dirigé par Francisco Bozán, même si leur lutte semble se destiner à d’abord assurer le maintien, comme pour Cobresal même si el Cobre réussit quelques coups intéressants sur le marché, comme l’arrivée du buteur paraguayen Rodolfo Gamarra désireux de se relancer après une année 2019 passée notamment sur les bancs de touche brésiliens.
Première journée : le champion et son dauphin frappent fort
Au terme des quatre-vingt-dix premières minutes, il est évidemment imprudent de tirer des conclusions définitives même si certaines choses semblent ne pas avoir changées. La Católica a parfois été sérieusement bousculée par d’excellents Wanderers mais a montré un potentiel offensif assez impressionnant, s’imposant largement tout en faisant de Mauricio Viana, portier du Decano, l’homme du match. Colo-Colo a aussi parfois souffert face à un Palestino trop maladroit qui a fini par le payer cash (0-3, doublé de Leo Valencia alors que le troisième géant a repris 2020 comme il avait terminé 2019, par un début de crise après une défaite concédée face aux Acereros de Huachipato avec encore et toujours les mêmes soucis : inefficacité offensive, largesses défensives. La perf’ du week-end est pour Audax Italiano qui atomise Cobresal à La Florida (avec notamment le golazo du week-end pour Lavandeira) et pour La Calera qui rentre de Rancagua avec les trois points. À noter enfin l’arrivée en force du VAR qui est intervenu quasiment partout et n’a évidemment pas mis fin à bien des discussions.
Les résumés