Personne ne l'avait vu venir. Le Deportes Tolima a remporté le deuxième titre de champion de son histoire grâce à sa victoire aux tirs-au-but. Sur la pelouse de l'Atlético Nacional et après avoir perdu le match aller.

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Parler d'un exploit serait un euphémisme. À l'entrée du temps additionnel de la deuxième période, le titre était encore entre les mains de l'équipe verdolaga qui sans être géniale avait fait le job dans cette finale comme le veut l'expression consacrée. Mais cette équipe de Tolima a d'abord arraché le droit de rêver et de jouer sa vie depuis le point de pénalty. Puis les deux arrêts d'Álvaro Montero ont fait le reste. Et ont enflammé toute la ville d'Ibagué. Retour sur ces 180 minutes de suspense.

Mercredi soir au Murillo Toro d'Ibagué personne n'imaginait l'Atlético Nacional perdre le dix-septième titre de son histoire. Après un match globalement maitrisé, la tête de Dayro Moreno lui a permis de repartir avec un but d'avance. Un but qu'on pensait insurmontable. Trop fortes et trop nombreuses les individualités du club de Medellin. Pire pour l'équipe vinotinto, Ángelo Rodríguez, le buteur maison, est sorti blessé après quarante-cinq minutes. La plus belle occasion, un coup-franc de Yohandry Orozco aurait terminé au fond sans une parade venue d'ailleurs de Monetti.

C'est donc décimé et avec un but de retard que Tolima s'est lancé dans cette opération sur la pelouse de l'Atanasio Girardot. Décimé pendant la première période surtout puisque le Deportes Tolima a tenté une « Diego Costa en finale de la Ligue des champions 2014 » pour aligner Rodríguez. Échec. Pendant la première période Tolima a joué à dix, incapable de trouver son attaquant de pointe. Sa seule situation d'ailleurs est venue d'un côté où excentré, Sebastián Villa n'a eu d'autre choix que tenter la frappe croisée. Logiquement il n'est pas revenu après la pause. Et tout s'est accéléré. Moins d'une minute après la reprise, une parade de Montero face à Dayro Moreno a laissé le club d'Ibagué en vie. Dans la foulée Sebastián Villa, le futur joueur de Boca Juniors, s'est arraché pour aller récupérer un ballon dans les pieds d'Henríquez. Son centre contré par Campuzano a trompé Monetti. Égalité sur l'ensemble des deux matches. Wilmar Roldán au Mondial, c'est donc à Luis Sánchez que l'arbitrage de cette finale a été confié. L'arbitre de la dernière finale aller aurait pu faire basculer le sort de cette finale. Peu après l'heure de jeu, Rafael Robayo est fauché dans la surface par Felipe Aguilar. Pas de pénalty. Trois minutes plus tard, le centre d'Heliberton Palacios a trouvé Vladimir Hernández. Du haut de son mètre soixante il est venu égaliser de sa tête. La chance de Tolima semblait passée. Dominateur toute la saison, l'Atlético Nacional a progressivement reculé pendant la dernière demi-heure. Jusqu'à ce corner, trois minutes après le début du temps additionnel. La passivité défensive a permis à Danovis Banguero de placer sa tête, seul dans les six mètres. Deux partout sur l'ensemble des deux matches, sans la règle du but à l'extérieur, direction donc le point de pénalty. Comme sonnés par ce but tardif, les joueurs verdolagas ont progressivement craqué. Reinaldo Leinis, troisième tireur a vu sa tentative repoussée par Montero. Avant l'arrivée de Vladimir Hernández. Son tir d'agneau asthmatique au milieu du but a détruit les derniers espoirs des supporters paisas. Entré à la pause à la place d'Ángelo Rodríguez c'est Marcos Pérez qui a validé définitivement le deuxième titre du Deportes Tolima.

Toujours placé mais jamais gagnant. Un an et demi après sa finale perdu contre Santa Fe, le Deportes Tolima a donc été sacré champion pour la deuxième fois de son histoire. La première fois c'était lors du second semestre de 2003. C'était déjà à l'extérieur, contre le Deportivo Cali, et c'était déjà aux tirs-au-but. Troisième de la saison « régulière » mais à huit points du leader, le club d'Ibagué a avancé masqué toute cette saison. Rangé dans la catégorie des outsiders, notamment après un début de saison poussif, trois défaites en cinq matches, il était difficile de viser plus haut qu'une qualification dans le dernier carré. Notamment parce que cette équipe n'a aucune individualité capable de faire la différence sur un geste venu d'ailleurs. Ángelo Rodríguez, le meilleur buteur du club est à six buts. Parmi les quart-de-finalistes, Tolima n'était d'ailleurs que la cinquième attaque (pour la troisième défense). La force de cette équipe est ailleurs. Sur le banc pour être plus précis.

Ancien joueur de Millonarios des années 80 et natif de Santa Marta, Alberto Gamero est la clé de réussite de ce Deportes Tolima. Avant son arrivée au club en 2014, il avait déjà été sacré champion avec le Boyaca Chico en 2008 (face à l'América … aux tirs-au-but), le seul titre de l'histoire du club boyacense. Dès son arrivée à Ibagué il remporte la Coupe de Colombie. Fin 2016 et donc après la finale perdue contre Santa Fe il part à Barranquilla. Avec Junior, l'histoire tourne court et il part après moins d'une demi-saison. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que Gamero est un entraineur qui a besoin de temps sans forcément beaucoup de moyens. Dans ce Tolima on retrouve des joueurs comme Marco Pérez ou Julián Quiñones qui étaient déjà là en 2014. À Junior il n'a pas eu ce luxe-là, mal récurrent de ce club d'ailleurs. Avec la qualification pour la Libertadores 2019, le voilà avec un peu plus de moyens. Ça sera peut-être suffisant pour le convaincre de rester alors qu'il sera sollicité dans les prochaines semaines.

Pierre Gerbeaud
Pierre Gerbeaud
Rédacteur Colombie pour Lucarne Opposée