La Gloire éternelle. Tel est le slogan donné par la CONMEBOL à la plus belle de ses compétitions. L’heure est donc venue de se tourner vers Lima, pour voir Flamengo qui attendait ce moment depuis près de quatre décennies, et River Plate, nouvel ogre continental, aller tenter de la décrocher. Présentation du match.

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Flamengo : pour un deuxième titre

Par Marcelin Chamoin

Flamengo va disputer la deuxième finale de Copa Libertadores de son histoire et pourrait réaliser un doublé inédit au Brésil en remportant la Copa Libertadores et le Brasileirão la même année.

Parcours en Copa Libertadores : débuts dans la douleur et o maior do Brasil

Qualifié pour sa troisième Copa Libertadores de suite, Flamengo espérait faire bien mieux qu’en 2017 (élimination au premier tour) et 2018 (élimination en huitièmes de finale contre Cruzeiro). La Copa Libertadores 2019 commençait de façon idéale avec une victoire en altitude sur le terrain de San José puis un succès à domicile face à LDU Quito. Mais Flamengo va se faire surprendre au Maracanã par le Peñarol qui l’emporte 1-0 sur un but en fin de match de Lucas Viatri. Flamengo se reprend en écrasant San José sur le score de 6-1, mais le second déplacement en altitude est moins bien géré avec une défaite 2-1 contre LDU Quito. Flamengo était donc sous pression avant le dernier match de la phase de poules sur le terrain de Peñarol. Les supporters les plus pessimistes rappelaient les éliminations au premier tour en 2012 et 2017 avec des buts concédés en fin de match, ainsi que celle de 2014 au Maracanã. Au Campeón del Siglo, les hommes d’Abel Braga dominent, mais ratent des buts faciles et le scénario catastrophe se profile lorsque Pará laisse ses partenaires à dix au même moment où la LDU ouvre le score dans l’autre match. Un but encaissé et Flamengo serait alors éliminé, mais le club rubro-negro va finalement conserver le 0-0. Trois équipes (Flamengo, LDU Quito, Peñarol) terminent la phase avec dix points, mais c’est bien Flamengo qui finit en tête du groupe.

En huitièmes de finale, Flamengo hérite d’un adversaire abordable, Emelec, qui l’avait cependant éliminé de la Copa Libertadores 2012. Les deux clubs s’étaient également affrontés au premier tour en 2018 avec l’une des plus grandes prestations en carrière de Vinicíus Jr sous le maillot flamenguista. Entré en cours de jeu alors que Fla était mené 1-0, le gamin de dix-sept ans s’était alors fendu d’un doublé pour offrir au Flamengo un précieux succès. En 2019, avec désormais le Portugais Jorge Jesus comme entraîneur et qui fête ce jour-là son 65e anniversaire, Flamengo encaisse un but face à Emelec dès la dixième minute. Même en supériorité numérique pendant plus de trente minutes, Flamengo ne parvient à revenir au score et concède un second but en fin de rencontre. Défaite 2-0, Flamengo est condamné à l’exploit au Maracanã. Une semaine plus tard, il commence idéalement le match, Gabigol plante deux buts en vingt minutes, mais Flamengo va ensuite inexplicablement baisser de rythme, se mettant même en danger en seconde période. Le troisième but n’arrive jamais, le ticket se jouera donc aux tirs au but. Le Maracanã, plein comme un œuf, peut trembler. Diego Alves, sifflé par ses supporters trois jours plus tôt pour une faute de main lors de la victoire contre Botafogo, entre en scène. Le spécialiste des penalties arrête la tentative de Dixon Arroyo. Côté Flamengo, De Arrascaeta, Bruno Henrique, Renê et Rafinha réussissent tous leur tir au but et lorsque la frappe de Queiróz s’écrase sur la barre transversale, le Maracanã peut exulter, Flamengo est en quarts de finale de la Copa Libertadores, une première depuis 2010.

Flamengo se retrouve alors dans la partie basse du tableau final, une partie 100 % brésilienne avec Grêmio – Palmeiras et Flamengo – Internacional. Paolo Guerrero, qui effectue son retour au Maracanã, sera complètement dominé par Rodrigo Caio et la différence se fera des pieds de Bruno Henrique, convoqué une semaine plutôt avec la Seleção. L’ancien joueur de Santos ouvre le score à un quart d’heure de la fin du match puis récidive quatre minutes plus tard, offrant un bon avantage à Flamengo pour le match retour à Beira-Rio. Rodrigo Lindoso ouvre le score à l’heure de jeu pour l’Internacional, mais Gabriel Barbosa assure au Flamengo la qualification dans les dernières minutes du match. Flamengo file en demi-finale, une première depuis 1983 ! Le club rubro-negro retrouve le rival de l’Internacional, Grêmio. À l’aller, Flamengo domine un Grêmio impuissant sur sa pelouse, mais les deux équipes se quittent sur un match nul 1-1, avec notamment trois buts de Flamengo annulés par le VAR. Le match retour, devant près de 70 000 spectateurs au Maracanã, échappera à toute polémique : une victoire 5-0 avec un doublé de Gabigol et des buts de Bruno Henrique, Pablo Marí et Rodrigo Caio. Flamengo impressionne l’Amérique du Sud et se qualifie pour la deuxième finale de Copa Libertadores de son histoire, cette fois face au tenant du titre, River Plate.

Schéma tactique : 4-2-3-1

Il est difficile de définir un schéma tactique, même si Flamengo joue avec deux milieux axiaux : Willian Arão et Gerson. Optons donc pour un 4-2-3-1, mais les joueurs ont une grande liberté de déplacements, ainsi on peut retrouver sur le côté gauche Filipe Luís, Arão, Gerson, Arrascaeta ou encore Bruno Henrique. Jorge Jesus aligne une défense à quatre, avec un apport offensif des latéraux, Filipe Luís et Rafinha. Au milieu, on retrouve Willian Arão et Gerson, avec un profil plus défensif pour Arão alors que Gerson peut prêter main forte aux joueurs offensifs et n’hésite pas à prendre sa chance longue distance. Flamengo impressionne aussi par sa puissance offensive avec le meilleur buteur de la Copa Libertadores, Gabigol (7 buts), suivi de près par Bruno Henrique, auteur de cinq buts et cinq passes décisives. L’Uruguayen De Arrascaeta est le maître à jouer de l’équipe et il ne faut pas oublier non plus Everton Ribeiro, aligné sur le côté droit mais qui a l’habitude de rentrer dans l’axe pour jouer sur son pied gauche. On retrouve donc une équipe équilibrée, où chaque joueur peut apporter offensivement.

Compo : 1-Diego Alves; 13-Rafinha, 3-Rodrigo Caio, 4-Pablo Marí, 16-Filipe Luís; 5-Willian Arão, 8-Gerson; 7-Everton Ribeiro, 14-Giorgian De Arrascaeta, 27-Bruno Henrique; 9-Gabriel Barbosa.

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Ne croyez pas la CONMEBOL, Bruno Henrique sera plutôt placé couloir gauche avec De Arrasceta dans l'axe, le tout derrière Gabigol.

Point fort : la polyvalence

Sur les onze titulaires qui devraient être alignés samedi, seulement trois étaient au club la saison dernière : Diego Alves, Willian Arão et Everton Ribeiro. L’équipe s’est donc renforcée en deux temps, d’abord au début de l’année avec les arrivées de Rodrigo Caio, De Arrascaeta, Bruno Henrique et Gabigol. Flamengo a ensuite profité de la fin de saison européenne pour recruter sur le Vieux continent : Filipe Luís, Rafinha, Pablo Marí et Gerson. Mais la meilleure recrue du club est sans doute portugaise et âgé de soixante-cinq ans, l’ancien entraîneur de Benfica, Jorge Jesus. Adulé par la torcida flamenguista, Jorge Jesus a rapidement redressé une équipe décevante sous Abel Braga. Flamengo a alors impressionné, aussi bien dans le Brasileirão qu’en Copa Libertadores et n’a connu que deux défaites sur les trente-trois matchs dirigés par Jorge Jesus !

Flamengo est craint pour son potentiel offensif, mais dispose également d’une très bonne défense. Diego Alves est toujours l’un des meilleurs gardiens du Brésil et le principal point faible de Flamengo en 2018, le niveau des arrières latéraux, a été plus que gommé avec les arrivées à la mi-saison de Filipe Luís et Rafinha, avec une mention pour Rafinha, incroyable des deux côtés du terrain et qui a notamment éteint Everton Cebolinha en demi-finale. La charnière centrale est également l’une des meilleures du continent, l’Espagnol Pablo Marí s’étant rapidement adapté au club et est très complémentaire de Rodrigo Caio. Les deux sont solides défensivement et peuvent apporter offensivement grâce à leur jeu de tête, à l’image du 5-0 contre Grêmio où ils ont tous les deux été buteurs. Willian Arão était la principale cible des supporters du club sous Abel Braga et il s’est littéralement transformé avec l’arrivée du Mister sur le banc du Mengão. Limité techniquement, Arão s’applique à jouer juste et simple, tout en avalant les kilomètres pour gêner les passes adverses. Précieux à la récupération sur l’homme ou pour lire le jeu des adversaires, Arão peut ensuite transmettre à Gerson ou même apporter un danger offensif avec une bonne frappe de loin. Gerson a de son côté fait complètement oublier le départ du Colombien Cuellar. Par ses courses vers l’avant, il fait le lien entre le milieu de terrain et l’attaque. Les défenses ne peuvent pas non plus l’oublier et il n’hésite pas à prendre sa chance des vingt-cinq mètres. Moins actif que Cuellar à la récupération tout en restant correct dans ce domaine, Gerson peut profiter des efforts de Willian Arão pour amener plus de verticalité dans le jeu du Flamengo.

Flamengo a marqué vingt-deux buts dans cette Copa Libertadores, soit sept de plus que River Plate. Également meilleure attaque du Brasileirão (dix-huit buts de plus que le deuxième !), Flamengo est redoutable offensivement avec un quatuor Arrascaeta-Everton Ribeiro-Bruno Henrique. Car si le duo Bruno Henrique – Gabigol affole les statistiques, il ne faut pas oublier l’apport et la justesse technique d’Arrascaeta et Everton Ribeiro. Avec des joueurs bons techniquement et la science tactique de Jorge Jesus, Flamengo peut s’adapter aux différentes situations, en étant à l’aise dans le jeu de possession mais peut aussi se montrer diabolique en contre-attaque avec des ouvertures précises d’Arrascaeta et Everton Ribeiro qui peuvent exploiter la vitesse de Bruno Henrique Gabigol. Ce samedi, le Mister pourra aligner son équipe-type idéale, ce sera seulement la sixième fois de la saison qu’il pourra le faire, entre les blessures ou suspensions des uns et convocations en équipe nationale des autres. Le bilan est pour l’instant excellent avec trois victoires dans le Brasileirão (3-0 contre Palmeiras, 1-0 contre Santos, 3-1 contre l’Internacional) et un match nul et une victoire en Copa Libertadores (1-1 puis 5-0 contre Grêmio).

Point faible : le banc

Si le onze de départ ne présente pour ainsi dire pas de faiblesses, on ne peut pas en dire autant du banc de touche, notamment offensivement où Vitinho et Berrio peinent à s’imposer. Le jeune Reinier (17 ans) est peut-être encore un peu tendre pour un match d’un tel niveau malgré des statistiques encourageantes dans le Brasileirão (4 buts et 2 passes décisives en 12 matchs), même chose pour Lincoln (18 ans). Diego revient d’une longue blessure et manque encore de rythme. Plus bas au milieu de terrain, Piris da Motta ne convainc pas lorsqu’il est aligné alors que les latéraux Renê et Rodinei, désormais remplaçants, ne peuvent entrer en jeu sans faire souffler de dépit n’importe quel supporter du club. Ainsi, en cas de match serré, on voit mal quel coup pourrait tenter Jorge Jesus et quel remplaçant pourrait être amené à faire la différence. Autre éventuel point faible, le manque d’expérience, que ce soit à ce niveau de la compétition, ou entre les joueurs puisque huit d’entre eux sont arrivés au club cette année. Un manque d’expérience relatif, sept joueurs sont passés par l’Europe, De Arrascaeta est international uruguayen depuis 2014 alors qu’Everton Ribeiro est double champion du Brésil. Rafinha a ainsi joué 77 matchs de Ligue des champions, Filipe Luís Luis pointe lui à 46 matchs pour deux finales de Ligue des champions ainsi que deux Ligues Europa remportées. Cependant, le groupe n’a pas l’expérience acquise par celui de Marcelo Gallardo au cours des dernières compétitions sud-américaines ou lors des nombreuses finales disputées.

Si Flamengo a commencé cette Copa Libertadores 2019 dans la difficulté, les recrues lors du mois de juillet ont permis de considérablement renforcer l’équipe qui s’est transformée en machine à gagner, écrasant notamment le vainqueur de la Copa Libertadores 2017, Grêmio. Pour la première finale en match unique de la Copa Libertadores, les supporters du football sont donc gâtés avec ce duel au sommet entre River Plate et Flamengo, deux des plus belles formations du continent et où il est bien difficile de pronostiquer un vainqueur.

La check-list de la finale

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Un River Plate cinq étoiles

Par Nicolas Cougot

Trois finales en quatre ans, deux gagnées, une à jouer. En cinq saisons passées sur le banc de River Plate, Marcelo Gallardo n’a pas seulement révolutionné un géant d’Argentine, il en a fait une machine à triomphes continentaux, à commencer par la Libertadores. Après 2015 et 2018, el Muñeco peut désormais aller chercher un triplé, un doublé consécutif, performance qui n’a plus été réalisées depuis le Boca du début des années 2000.

Parcours en Libertadores

Après avoir décroché la gloire éternelle, Marcelo Gallardo se retrouve à la tête d’un River à reconstruire. Comme toujours. Maidana et Pity Martínez ont migré vers le nord, el Muñeco a donc débuté l’année par une vaste opération de remodelage de son équipe, avec quelques incertitudes mais aussi quelques absences qui vont venir émailler le début d’année (Palacios perd deux mois en février, touché par une fracture du péroné, Casco suit quelques jours plus tard avec une fracture de la clavicule qui l’éloigne alors pour une durée de deux à trois mois, Quintero se fait les croisés en mars, Armani et Scocco prennent trois semaines en avril). Et pourtant, malgré tout, River parvient à parfaitement gérer sa phase de groupes de la Libertadores. Deux nuls face à l’Inter, deux autres nuls en ouverture face à l’Alianza Lima et à Palestino, malgré trois matchs disputés dans un Monumental vide car subissant la sanction du caillaissage du car des joueurs de Boca en décembre 2018, les Millonarios s’extirpent sans trop de mal du groupe pour rejoindre les huitièmes en sortant solide deuxième du groupe à quatre longueurs des rouges brésiliens.

Le huitième de finale sera accroché. Face aux Millionarios de Buenos Aires se dresse Cruzeiro, un souvenir heureux d’une campagne victorieuse. Comme en 2015, River ne parvient à s’imposer chez lui. Les hommes de Gallardo écrasent la première période, souffrent en deuxième, sauvés par le VAR qui annulera le but de Marquinhos Gabriel pour hors-jeu avant de lui donner un penalty de fin de match pour un maillot de Pratto tiré par Henrique sur corner. Mais Suárez envoyait le ballon dans le ciel du Monumental et tout allait se jouer à Belo Horizonte, comme en 2015. Mais si quatre ans plus tôt, River avait écrasé la Raposa, le retour en 2019 fut bien plus difficile. River a gâché, plombé par l’imprécision constante de Nacho Fernández ou les tout aussi constants mauvais choix de Santos Borré, a soufflé sur la frappe de Pedro Rocha venue écraser la barre d’Armani, et s’en est sorti sur une séance de tirs au but au cours de laquelle Armani a brillé. En quarts, l’adversaire se nomme Cerro Porteño qui se présente ainsi au Monumental après avoir sorti San Lorenzo. Le Ciclón est calmé d’entrée, River frappant sur un penalty accordé au VAR et contrôlant ainsi le premier acte et pouvant alors regretter de ne pas avoir déjà tué le match. D’autant qu’en seconde période, le Cerro Porteño commence par bousculer les Argentins, Haedo Valdez passant à un rien de ramener les siens, mais River va ensuite reprendre le contrôle de la partie et véritablement tuer le match grâce à Nacho Fernández. 2-0, l’affaire semble pliée avant le retour. En déplacement au Paraguay, River va d’abord énormément souffrir dans une Nueva Olla surchauffée. La faute à un Cerro Porteño plus cohérent, plus entreprenant, plus agressif, la faute aussi à une volonté systématique de vouloir jouer long en première période, rendant ainsi régulièrement la balle aux Paraguayens. River le paiera rapidement sur une merveille de tête plongeante de Nelson Haedo Valdez, s’en remettra parfois à Armani pour éviter le pire, et va attendre le deuxième acte pour respirer. D’abord car le pressing du Cerro se relâche, ensuite parce que les hommes de Marcelo Gallardo posent le ballon. Alors Nico de la Cruz libèrera les siens en égalisant, River passera en mode gestion et s’offre une demi-finale qui sent la poudre face à Boca Juniors pour le Superclásico de la revanche.

De revanche, il n’y aura pas pour Boca. À peine deux minutes de jeu, alors que la fumée des fumigènes ne s’était pas encore totalement évaporée dans le ciel du Monumental, un ballon relâché par Andrada est convoité par Rafael Santos Borré qui s’écroule. Sur l’arrêt de jeu suivant, l’arbitre brésilien de la rencontre, Raphael Claus s’en va observer sur l’écran l’intervention de Más sur le Colombien de River et accorde un penalty logique aux Millonarios. Borré transforme, le match est lancé, Boca doit se découvrir et ainsi oublier la stratégie du bus qui avait fait temps parlé quelques semaines auparavant (et un 0-0 ramené en championnat). Mais Boca ne sait pas comment faire. Lex Xeneizes passent leur temps à envoyer de longs ballons vers un Wanchope réduit à un rôle ingrat de pivot alors que le bloc restait bien trop loin de lui pour que ce rôle soit efficace, mais se crée de belles situations, la plus belle restant un improbable raté de Capaldo. Mais River contrôle, s’adapte à tout et domine. River cherche à jouer, Boca cherche le duel, n’a jamais l’intention de faire quoi que ce soit du ballon si ce n’est arroser, et se repose sur un Esteban Andrada quasiment infranchissable et qui va finalement éviter une goleada aux siens. Car les occasions millonaria ont été nombreuses : Borré dans la surface, De La Cruz sur coup franc en fin de premier acte, Montiel trouvant le poteau, un centre de De La Cruz filant devant la ligne, une frappe lobée de Suárez claquée par le portier xeneize, une tête de Scocco, un face à face Scocco-Andrada, une frappe à bout portant de Suárez. Ainsi, si Andrada ne peut rien faire sur le deuxième but signé Nacho Fernández, la victoire 2-0 de River sur son plus grand rival semble finalement presque une victoire pour les Xeneizes. Car elle laisse alors la possibilité d’un espoir pour le retour à la Bombonera. Mais El Muñeco et River peuvent s’adapter à tout. Boca propose du cœur et de la sueur, River se rend rapidement compte qu’il ne pourra pas poser le jeu, il va enfiler le bleu de chauffe. Boca n’est dangereux que sur coups de pied arrêtés, se voit un but refusé pour une main de Mas, passe à un rien de provoquer un csc de Pérez, et va envoyer toutes ses forces dans le sprint final, Alfaro accumulant les offensifs notamment après les entrées de Zárate et Hurtado. Et Boca a espéré, Hurtado faisant exploser la Bombonera à une grosse dizaine de minutes de la fin. L’équilibre semblait fragile, mais River Plate résistera à tout et se qualifie pour la finale. Marcelo Gallardo décroche sa quatrième finale continentale en six années passées sur le banc du Millo, il a déjà remporté les trois premières, et a sorti un nouveau River, moins flamboyant, moins sûr de lui, parfois fragile, mais toujours aussi redoutable.

Schéma tactique : 4-1-3-2

Il est un fait avéré, le River Plate de Gallardo ne possède pas de plan de jeu fixe, prévisible à l’avance. Il repose toujours sur une étude minutieuse de l’adversaire à la recherche du meilleur moyen de le contrer ou le mettre à mal. Pour la finale, face à un Flamengo aussi puissant devant qu’il est parfois fragile derrière, on devrait s’orienter vers un 4-1-3-2 qui ressemble beaucoup à celui des Brésiliens en phase offensive alors que l’on avait longtemps cru à une défense à trois centraux, Paulo Díaz s’intercalant dans l’axe, faisant glisser Montiel et Casco pour mieux verrouiller les couloirs, souvent dangereux côté adverse. Mais l’idée semble autre. Placer Enzo Pérez en sentinelle, Palacios en box-to-box pour aller chercher Arão et contraindre Gerson à reculer, et surtout coller Nacho Fernández et De La Cruz sur les ailes et utiliser la profondeur et l’amour des espaces pris dans le dos des défenses adverses de Santos Borré et Suárez. Mais évidemment, rien ne dit que ce schéma sera fixe sur la durée de la rencontre, tant les possibilités d’alternatives sont importantes sur le banc.

Compo probable : 1-Franco Armani; 29-Gonzalo Montiel, 28-Lucas Martínez Quarta, 22-Javier Pinola, 20-Milton Casco; 24-Enzo Pérez; 26-Ignacio Fernández, 15-Exequiel Palacios, 11-Nicolás De La Cruz; 19-Rafael Santos Borré, 7-Matías Suárez.

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Là encore, on s'oriente plus vers un losange au milieu, Palacios jouant plus haut que Pérez, placé en sentinelle.

Point fort : adaptabilité

On aura de cesse de le répéter, la grande qualité du champion sortant reste et restera son incroyable capacité à s’adapter à toutes les situations. Les exemples sont nombreux, la demi-finale face à Boca l’illustre encore. À l’aller Boca était venu avec l’idée de réduire les espaces ? Alors River n’a cherché qu’une chose, en créer. Oublié ainsi le vertige, le pressing tout terrain et notamment dans le camp adverse, à la récupération, River n’a cherché qu’à élargir le jeu, jouer sur les côtés et jouer dans le dos d'une défense réputée assez lente, en un mot, à étirer Boca. Palacios n’est pas allé perforer en mode box-to-box, fuyant ainsi la densité de l’axe, les montées de Montiel et Casco, aidés par un De La Cruz et un Nacho Fernández collés aux lignes de touche, le tout organisé par un Enzo Pérez libre de tout mouvement au cœur du jeu. Au retour, dans une Bombonera surchauffée, il a rapidement été compris par le Millo qu’il n’allait pas pouvoir poser ni imposer son jeu, qu’il allait falloir chercher à résister à l’impact physique proposé par l’adversaire. Alors River a longtemps « renvoyé » le ballon, a enfilé le bleu de chauffe et a lutté, droit dans les yeux, en utilisant les mêmes armes que son rival. Il n’existe donc pas un River, mais des River. Cela est évidemment permis par l’incroyable capacité d’adaptation des joueurs à la disposition de Gallardo et la richesse des profils se trouvant sur le banc. Pour la finale, Gallardo pourra utiliser Paulo Díaz dans l’axe ou sur un côté en défense, ajouter des créateurs dans le jeu, comme Juanfer Quintero l’a été lors de la finale victorieuse l’an passé, poser un pivot plein axe devant avec Lucas Pratto. Là est donc la grande force de River Plate, qui joue ainsi sa quatrième finale continentale en cinq ans : à l’expérience, il y ajoute une grande intelligence.

Point faible : prise de risque et coups de pied arrêtés

Dans ce tableau idyllique, il subsiste tout de même quelques points noirs. Le premier est le plus sérieux problème du River du Muñeco : la gestion des coups de pied arrêtés. Boca l’a souligné en demi-finale où les situations de danger ont été nombreuses. Il faudra aussi être capable de gérer les nombreux un contre un qui se présenteront inévitablement à la défense millonaria. Les montées incessantes de Casco et Montiel ont tendance à ouvrir des espaces dans le dos et les situations de contres seront nombreuses, d’autant qu’avec la vitesse de Bruno Henrique, les montées de Raphinha et la vista du duo Everton Ribeiro – De Arrascaeta, Flamengo dispose d’armes capable de faire mal. Ces armes dans le dos de la défense que Boca avait su utiliser un soir de finale perdue quand Pavón et Villa restaient encore haut et quand Nández cherchait à casser les lignes en intégrant jeu direct et grande verticalité. Car qu’importe les schémas ou l’effectif à disposition, River n’aime pas quand l’adversaire fait le choix de la verticalité et dispose d’armes dans les couloirs. Typiquement le couple qui fait la force de Flamengo. Autant dire que cette finale s’annonce encore plus ouvert que prévue.

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.