En 2005, l’Athletico Paranaense dispute la première finale de Copa Libertadores de son histoire, avec une fin qui laisse encore des regrets aujourd’hui.

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En 2004, l’Athletico Paranaense se rapproche du titre dans le Brasileirão, le deuxième après celui de 2001. L’entraîneur Levir Culpi parle d’un mode en « pilote automatique » vers le titre, mais à quatre journées de la fin, alors que l’Athletico mène 3-0 sur la pelouse de Grêmio, bon dernier du championnat, le Furacão cède finalement le match nul avec notamment deux buts encaissés dans les dernières minutes. L’Athletico termine la saison par une défaite et un match nul, les trente-quatre buts de Washington, toujours un record dans le Brasileirão, sont insuffisants, l’Athletico doit se contenter d’une deuxième place derrière Santos.

Après sa très bonne saison, l’Athletico doit faire face au départ de quelques-uns de ses joueurs majeurs en 2005, notamment Jádson, qui prend la direction du Shakhtar Donetsk. L’attaque, qui avait déjà perdu Ilan à Sochaux en milieu d’année, est à reconstruire avec le départ de Washington et Alex Mineiro vers le Japon alors que Michel Bastos est à nouveau prêté, à Figueirense. L’Athletico retrouve une attaque compétitive en signant Lima et l’ancien Stéphanois et Parisien Aloísio Chulapa et signe au milieu de terrain Rodrigo Beckham, surnommé ainsi pour sa ressemblance relative avec la star anglaise. Sur le banc, Casemiro Mior succède à Levir Culpi, mais il ne résiste pas à la défaite en finale aller du championnat paranaense contre Coritiba. Il est remplacé par Edinho, qui dispute trois Coupes du Monde avec la Seleção en tant que défenseur central, puis se dirige vers une carrière d’entraîneur, remportant notamment la Série B avec Brasiliense en 2004. Dès ses débuts, Edinho parvient à inverser la tendance en finale du championnat paranaense. Au retour, le Furacão s’impose 1-0 grâce à un but de Dênis Marques et arrache les tirs au but, Lima transformant le dernier. L’Athletico commence la saison 2005 par un titre.

Priorité Libertadores

En Copa Libertadores, l’Athletico hérite du groupe 1 avec Libertad ainsi que les Colombiens de l’América de Cali et Independiente de Medellín. Le Furacão débute sur le terrain de l’Independiente de Medellín et mène 2-0, avec notamment un golaço sur coup franc de Marcão, mais cède finalement le match nul 2-2. L’Athletico décroche son premier succès dans la compétition en battant Libertad sur la plus petite des marges, puis est battu en Colombie, face à l’América de Cali. Le club rubro-negro prend sa revanche sur l’América de Cali à l’Arena da Baixada et décroche un succès historique sur le terrain de Libertard. Réduits à dix dès la première mi-temps, les hommes d’Edinho marquent deux buts en seconde période et se rapprochent des huitièmes de finale. L’Athletico a son destin en main, mais s’écroule complètement à domicile contre l’Independiente de Medellín lors de la dernière journée avec une humiliante défaite 4-0, ne devant sa qualification en huitièmes que grâce à la surprenante victoire de Libertad sur l’América. Déjà fragilisé par trois défaites de suite pour débuter le Brasileirão, Edinho est démis de ses fonctions malgré la qualification, un mois seulement après son arrivée.

Après ce mauvais début de championnat, l’Athletico délaisse le Brasileirão pour se concentrer sur la Copa Libertadores, ne décrochant sa première victoire en championnat qu’à la onzième journée ! En huitième de finale aller, à l’Arena da Baixada, Lima ouvre le score de la tête face au Cerro Porteño. Julio dos Santos égalise dès le retour des vestiaires, mais le Furacão réagit trois minutes plus tard, avec un nouveau but de la tête, inscrit par Cléo, qui fait ses débuts en Libertadores après avoir été prêté à Ferroviária en début d’année. Au retour, le nouvel entraîneur Antônio Lopes, soixante-quatre ans et vainqueur de la Copa Libertadores 1998 avec Vasco, est dans les tribunes pour assister au match avant sa prise de fonctions. Julio dos Santos ouvre le score pour le Cerro dès la sixième minute, mais comme au match aller, l’Athletico ne met que trois minutes pour égaliser, Lima profitant de la mésentente entre Espínola et Danilo Aceval pour marquer. Peu avant la mi-temps, Salcedo marque son neuvième but dans la compétition et remet les deux équipes à parfaite égalité. Aux tirs au but, tous les joueurs marquent, jusqu’à Santiago Salcedo, meilleur buteur à la fin de la compétition, mais qui bute sur Diego. Evandro, entré en cours de jeu, marque et envoie le Furacão en quarts de finale.

Retrouvailles avec Santos

L’Athletico retrouve ensuite un club brésilien, Santos, avec qui une rivalité s’est installée la saison précédente lors de la lutte pour le titre du Brasileirão. En partance pour le Real Madrid, Robinho vit son dernier défi avec Santos, imiter Pelé et remporter la Copa Libertadores. Double vainqueur du championnat brésilien en 2002 et 2004, Robinho est défait en finale de la Libertadores 2003 contre Boca Juniors. À l’Arena da Baixada, Aloísio trouve la barre transversale dès la première minute de jeu, mais c’est Santos qui ouvre le score, par l’intermédiaire de son maître à jouer Ricardinho, formé chez le rival de l’Athletico, le Paraná Clube. Le Furacão réagit rapidement et égalise grâce à une tête lobée d’Evandro, mais dans la foulée, Alan Bahia est expulsé pour un carton jaune très sévère. André Rocha, entré en jeu pour reformer la défense, frappe un coup franc en force, repoussé par Juan Carlos Henao. Le capitaine Marcão suit l’action et met le club rubro-negro en tête au tableau d’affichage. Juste avant la mi-temps, Robinho, à la limite du hors-jeu, contrôle de la poitrine et décale Deivid qui n’a plus qu’à marquer dans le but vide pour le but du 2-2. Le début de seconde période est à l’avantage de Santos, mais l’Athletico laisse passer l’orage et prend peu à peu le contrôle du match. À vingt minutes de la fin, Lima vient conclure un joli mouvement collectif et permet à l’Athletico de repasser devant. Santos pousse, l’Athletico tient et décroche une victoire historique, à dix contre onze. « C’était des matchs historiques, qui restent dans la mémoire des supporters. Pour battre Santos, chacun devait aider l’autre, courir et y croire. Avec le soutien de nos supporters, pour nous battre à l’Arena, c’était très difficile », se souvenait Aloísio pour Globo. Comme en huitièmes de finale, l’avantage du Furacão est maigre et tout reste à faire lors du match retour.

Dans un Vila Belmiro bouillant, où Santos est invaincu depuis sept mois, Aloísio ouvre le score au quart d’heure de jeu et marque son premier but dans la compétition. « Le Vila Belmiro était plein. Ils étaient confiants et pensaient nous éliminer, mais grâce à Dieu, j’ai eu l’opportunité de mettre des buts. À l’époque, Ronaldo Fenômeno mettait son poignet sur le front quand il marquait, en hommage à Daniella Cicarelli, et je l’ai imité sur le premier but. Et puis notre défenseur Danilo est arrivé et a dit que ce n’était pas avec ce bras que Ronaldo faisait sa célébration. J’ai dit que quand j’allais mettre le deuxième, je le ferai du bon côté ». Santos domine sans parvenir à marquer et n’est pas aidé par l’arbitre, qui aurait pu siffler deux penalties pour le Peixe. En début de seconde période, Aloísio marque sur corner et refait la célébration de Ronaldo, avec cette fois le poignet gauche. Santos est KO, Diego repousse les derniers assauts, le Furacão décroche l’une des plus belles victoires de son histoire et file en demi-finale.

Contre les Mexicains de Chivas, Aloísio ouvre une nouvelle fois le score, devançant la sortie du gardien Alfredo Talavera. En fin de première mi-temps, Fernandinho, vingt ans et qui dispute ce soir-là son centième match avec le Furacão, double la mise sur coup franc et l’Athletico s’impose finalement 3-0 grâce à un golaço de Fabrício, qui trouve la lucarne d’une frappe en dehors de la surface. L’avantage avant le match retour est cette fois plus certain, l’Athletico gère le match retour au Mexique, le doublé de Lima permettant au club d’obtenir un 2-2. Pour la première fois de son histoire, l’Athletico Paranaense est en finale de la Copa Libertadores, devançant quelques grands clubs brésiliens, comme Fluminense, Botafogo, le Corinthians ou encore l’Atlético Mineiro, qui n’avaient jamais atteint ce stade de la compétition.

Polémique en finale

Comme lors des trois tours précédents, l’Athletico reçoit au match aller, mais l’Arena da Baixada ne dispose pas des 40 000 places assises demandées par la CONMEBOL pour accueillir une finale de Copa Libertadores. Le club court après le temps et met en place une tribune provisoire de 16 000 places. Les billets pour le match commencent à être vendus à l’Arena da Baixada, mais la CONMEBOL refuse la demande de l’Athletico et programme le match au Beira-Rio, à Porto Alegre. Pour beaucoup, São Paulo a utilisé son influence au sein de la CONMEBOL pour ne pas jouer à l’Arena. « Ce qu’il s’est passé a été une manœuvre politique de São Paulo », juge pour Terra Borba Filho, alors superviseur du club. « Jouer à l’Arena était totalement différent que de jouer à Porto Alegre. On aurait pu perdre le titre oui, mais à la maison la situation n’était pas la même. Sans aucun doute on aurait été plus confiants avec le soutien du public, on était imbattables à l’Arena », complète Aloísio pour Gazeta do Povo. São Paulo est le grand favori de la finale, avec un 3-5-2 monté par Paulo Autuori : Rogério Ceni dans les buts, Lugano en patron de la défense, les internationaux Cicinho et Júnior sur les côtés, Josué et Mineiro au milieu et le duo d’attaque Grafite – Luizão alimenté par le fabuleux Danilo. Une nouvelle fois dans cette Libertadores, Aloísio ouvre le score dans un match, trompant de la tête Rogério Ceni avant d’imiter la célébration mythique de Bebeto lors de la Coupe du Monde 1994, où il avait célébré la naissance de son fils. Contrairement aux matchs allers des tours précédents, l’Athletico Paranaense ne s’impose pas, puisque le club rubro-negro concède le nul en début de seconde période avec un but contre son camp de Durval. L’Athletico est condamné à l’exploit au Morumbi.

Entre les deux matchs de la finale, les remplaçants de l’Athletico Paranaense décrochent enfin une victoire dans le Brasileirão, en battant le rival Coritiba sur la plus petite des marges. Quatre jours plus tard, 71 986 spectateurs assistent au Morumbi à la finale retour de la Copa Libertadores après le 1-1 du match aller. Au quart d’heure de jeu, Luizão trouve Danilo dans la surface d’une talonnade, la frappe de Danilo est repoussée par le gardien Diego Silva, mais Amoroso suit l’action et ouvre le score. São Paulo se procure de nombreuses occasions sans parvenir à aggraver le score et juste avant la mi-temps, Aloísio obtient un penalty sifflé par le futur arbitre de la finale de la Coupe du Monde 2006, l’Argentin Horacio Elizondo. Fabrício s’élance, mais bute sur le poteau droit de Rogério Ceni. « C’est une chose avec laquelle je dois vivre tous les jours de ma vie », regrettait encore en 2020 pour Lance Fabrício. Le Furacão ne s’en remet pas et encaisse trois nouveaux buts en seconde période pour un 4-0 final, première goleada en finale de la Libertadores depuis celle de… São Paulo en 1993, lorsque l’Universidad Católica avait été battue 5-1 au match aller.

L’Athletico rate donc sa première chance de remporter la Libertadores, mais, malgré l’écart de niveau entre l’Athletico et São Paulo, le Furacão regrette surtout de ne pas avoir pu jouer le match aller à la maison, à l’Arena da Baixada, où le club rubro-negro réussit de grands matchs pour terminer l’année 2005 : 7-2 contre Vasco, 5-4 contre Cruzeiro, 4-0 contre Palmeiras et 4-2 contre… São Paulo, un mois après la finale de la Libertadores. Aloísio, l’un des grands noms de la campagne du Furacão, prend la direction de São Paulo et remporte en fin d’année le Mondial des clubs.

Dix-sept ans après ce premier échec, l’Athletico a une nouvelle chance de remporter la Copa Libertadores, avec à nouveau un entraîneur vétéran vainqueur de la Libertadores, en 1995 avec Grêmio et en 1999 avec Palmeiras, Luiz Felipe Scolari. Autre point commun, la présence dans l’effectif de Fernandinho. En 2005, Fernandinho dispute son dernier match avec le club justement lors de la finale retour de la Libertadores, avant de prendre la direction du Shakhtar. En juin 2022, après dix-sept saisons en Europe entre le Shakhtar Donetsk et Manchester City, le joueur de trente-sept ans revient à l’Athletico, déclarant lors de sa présentation : « Sans aucun doute je réalise un rêve, un souhait personnel de porter à nouveau le maillot de l’Athletico Paranaense, établir une marque à la fin de ma carrière en jouant pour seulement trois clubs : deux en Europe et un au Brésil. […] J’ai eu de très nombreuses propositions, de plusieurs clubs au Brésil et à l’étranger, mais la décision la plus sensée a été de revenir à la maison et d’essayer de donner le meilleur de moi-même pour l’Athletico ». Auteur de deux matchs solides face à Palmeiras en demi-finale, le pari est pour l’instant réussi.

Photo : ORLANDO KISSNER/AFP via Getty Images

Marcelin Chamoin
Marcelin Chamoin
Passionné par le foot brésilien depuis mes six ans. Mon cœur est rouge et noir, ma raison est jaune et verte.