Si le match du week-end était le clásico, le bon football était ailleurs comme cela a souvent été le cas cette année. Nacional a perdu presque tout espoir, alors que Peñarol sent dans sa nuque le souffle de Liverpool qui régale à chaque match. De quoi avoir une fin d’année à suspense et pleine de football en Uruguay.

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Par expérience, le clásico se joue souvent la journée précédente. Et tout avait mal commencé dans ce cas pour Peñarol avec une défaite contre Liverpool (0-1), défaite logique sur un but de Thiago Vecino sur un centre du paraguayen Miguel Samudio. Liverpool a dominé le match de la tête et des épaules, et aurait pu inscrire d’autres buts durant le cours du match si ses attaquants avaient été un peu plus en verve. Mais l’important étant les trois points, lors de ce match, Peñarol a perdu la tête du Clausura. Rien de de dramatique, car les carboneros ont gagné l’Apertura et ont toujours trois points d’avance sur Liverpool à l’annuel. De son côté, la victoire de Nacional contre River (3-0) laissait une mince chance au bolso en cas de sans faute en fin de saison. C’est dans ce contexte de peur sur les deux grands que s’est joué le clásico. Nacional jouait ses derniers espoirs, Peñarol sa place de leader du classement annuel en cas de défaite.

Le Gran Parque Central est à la fête pour ce match avec des tribunes bien garnies aidées en cela par l’absence de supporter de Peñarol comme cela avait été le cas dans l’autre sens à l’aller. Certains supporters bolsos balancent sur la pelouse des faux billets à Leo Coelho et à Sebastian Rodríguez, deux anciens du club. Sur le terrain, Nacional le rend bien en dominant le début du match, notamment grâce à un très remuant Gonzalo Carneiro, qui met au supplice la défense. En appui de Juan Ignacio Ramírez, il joue à droite, à gauche, apportant partout sa puissance et sa vitesse. Une première tête de sa part est repoussée par De Amores, avant qu’ils ne remettent de la tête un centre de Lozano en amortissant le ballon vers le Colo Ramírez qui n’a plus qu’à marquer l’ouverture du score. Logique. Cela se passe à la demi-heure de jeu et il n’y aura plus de football pendant vingt minutes. Franco González commet une faute rapidement derrière, les deux équipes se regroupent pour se tenir le col, les entraîneurs adjoints aussi… Cela termine avec deux expulsés sur le terrain (qui n’ont, à la vue des images, pas grand-chose à se reprocher) : Coelho et Fagúndez, ainsi que les deux gardiens remplaçants. Tout cela joue contre Nacional, qui perd le fil du match, mais qui peut retourner aux vestiaires avec l’avantage au score. Sauf que Dario Rodríguez fait entrer Neris en lieu et place de González et qu’il fait du bien. Peñarol se met plus rapidement dans la situation d’une équipe à dix et dès le retour des vestiaires, Arezo trouve José Neris dans la profondeur. Ce dernier trompe Ichazo avant le plongeon de ce dernier. Égalisation sur ce qui est la première occasion du match de Peñarol. Nacional change alors aussi et reprend sa marche en avant. Zabala remplace Ginella et sur l’une de ses premières actions, transperce la défense sur son côté droit entre deux défenseurs. Il centre au deuxième poteau pour Bàez qui trompe De Amores de prés. Pas grand-chose à dire tant la domination de Nacional sur le match est grande. Pourtant, on sent rapidement que Nacional a peur. Dès qu’elle mène, l’équipe se replie. Peñarol n’en profite pas et continue de balancer des ballons devant mais l’on sent que, un but n’est pas un avantage suffisant quand se rapproche la fin du match. Et ce qui devait arriver, arriva. Alors que Peñarol n’avait pas su se procurer d’occasion, alors qu’Arezo avait été transparent sauf sur une ou deux actions, Peñarol obtient un bon coup-franc en toute fin de match. Sebastian Rodríguez effectue sa course en deux temps, trompe un défenseur qui couvre le hors-jeu et Lucas Hernández se retrouve tout seul, à placer une tête piquée à dix mètres du but. Ichazo ne peut rien faire, Peñarol peut célébrer le match nul qui lui permet, malgré un deuxième très mauvais match de rang, de conserver un point d’avance au classement annuel.

Le silence dans le stade à la fin du match démontre bien la signification du résultat pour Nacional : avec neuf points de retard sur Liverpool au classement du clausura et neuf également sur Peñarol au classement annuel, à six journées de la fin, le club bolso a presque perdu toute chance de jouer le titre. Álvaro Recoba dispose de suffisamment de crédit pour pouvoir construire et ne se soucier que de la saison prochaine. C’est sans doute pour cela que le stade n’a pas fait de scandale à la fin du match. Côté Peñarol, le calendrier est désormais composé d’équipes qu jouent le maintien. C’est plutôt bon signe car le club a basé sa domination au classement annuel sur une série de victoire contre des équipes faibles. Mais tout cela fait peur et le bilan cette année contre Liverpool (deux défaites) peut tout autant faire peur en cas de finales.

Car Liverpool est en feu en ce moment et a enchaîné après sa victoire contre Peñarol par une victoire facile, tonitruante, contre Cerro Largo. Le score final est de 3-0, c’était le même à la mi-temps, et il aurait pu être plus lourd sans quelques arrêts du gardien israélien de Cerro Largo, Tomer Haran, à la fois très bon sur certains arrêts et coupable sur le premier but de Luciano Rodríguez, qui tire d’un angle trop fermé pour que le gardien soit innocent. Après dix minutes de jeu, Federico Pereira double la mise sur une belle combinaison sur coup-franc où la défense est prise. Côté droit et côté gauche, Alan Medina et Luciano Rodríguez torture la défense. Avant la mi-temps, Thiago Vecino se joue de Mauro Brasil (qui a le toupet d’enguirlander ses collègues) pour le troisième. Sous une pluie diluvienne et après quelques remplacements, Liverpool domine le reste du match sans marquer de but. Liverpool a une excellente équipe, avec de bons joueurs à chaque ligne, et serait sans doute devant au classement sans les points perdus durant le premier semestre avec la première participation du club en phase de groupes de Libertadores. Cela donne un certain rang à l’équipe, et aussi l’expérience de ne pas reproduire la saison 2020, terminée en 2021, où Liverpool avait survolé la fin de saison (notamment un mémorable 4-0 au Gran Parque Central) avant de ne pas pouvoir marquer contre Rentistas en finale vainqueurs Apertura-Clausura.

Résultats et classement

Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba