Tout le monde perd en ce moment en Uruguay. Peñarol, leader du classement annuel, n’a pris que trois points sur cinq a changé d’entraîneur ; Liverpool, leader du Clausura, n’avait pris qu’un point en deux matchs avant d’arracher une victoire sur Cerro ; Nacional ne faisant pas mieux, le Defensor se faufile et pourrait créer la surprise.

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Liverpool semblait être en lévitation. Après sa victoire au Campéon del Siglo lors de la huitième journée, le club du Belvedere était en confiance, leader dans les grandes largeurs du Clausura et revenant à quelques encablures d’un Peñarol en perdition au classement annuel. Liverpool, le club qui monte, qui aurait dû être champion en 2020, qui aurait pu montrer plus en 2022 pour jouer le titre. Un club arrivé à maturité. Et voilà qu’en deux matchs, le club tremble sur ses bases et laisse filer cinq points. D’abord contre Plaza Colonia, un match nul à l’extérieur, cela peut arriver. Mais la défaite contre Racing laissera des traces car incontestablement elle est due à une faillite psychologique. Le club mène en effet 2-0 à l’heure de jeu grâce à des buts de Gonzalo Nápoli et de Luciano Rodríguez. Le but de la jeune étoile U20 est une frappe magnifique, sèche, de vingt-cinq mètres, sur lequel le gardien ne peut rien. Sachant que Racing n’est pas passé loin d’être à dix en première période et vu comment Medina et Rodríguez dominent sur les côtés, on se dit que c’est plié. Tout changea à la 77e avec la réduction de l’écart sur un coup-franc anodin, Britos contrôle mal le ballon, le renvoie devant lui, provoque un cafouillage qui profite à Antoni. Les dix minutes suivantes sont un calvaire, dans un stade où les supporters de Racing retrouvent leur voix, un calvaire conclu sur deux autres buts et un rouge pour Izquierdo. Le dernier but, en toute fin de de match, est obtenu en contre, alors que Liverpool se jette sur les cages de Mejia pour obtenir la victoire. Heureusement, Liverpool s’est ressaisi et profite d’un autre calvaire, celui de Peñarol. Une victoire étriquée sur un but de Meli contre Cerro, quelques jours après la défaire contre Racing, permet à Liverpool de se rassurer et de confirmer son leadership en cette fin de saison. Mais l’équipe ne devra pas être reprise d’un épisode de tremblement.

Reste que la concurrence Peñarol / Nacional est pathétique. Peñarol n’a pas gagné depuis six matchs et ses dernières sorties se sont soldées par une défaite 2-1 avec une équipe carboneros qui s’est fait rouler dessus en première mi-temps contre Danubio et un match nul soporifique contre Plaza, dernier du classement. Le deuxième but de Danubio, de Santiago Romero, est assez terrible sur la rigueur tactique de l’équipe. Dario Rodríguez s’en est donc allé. Il devait être remplacé par Marcelo Broli, champion du monde U20, mais les négociations ont trainé et c’est finalement la fiera Diego Aguirre qui est de retour aux affaires douze ans après son précédent passage et une finale de Libertadores. Le club a passé le cap des élections présidentielles (Nacho Ruglio a été réélu), l’entraîneur a des épaules assez larges et de l’autorité… Qui sait, Peñarol pourrait bien malgré tout être champion. Le club reste à un point de Liverpool à la table annuelle à quatre journées de la fin et est déjà assuré de jouer les finales grâce à sa victoire lors de l’Apertura.

Des finales que Nacional ne verra point, le nul contre Fénix, qui suit une défaite contre Danubio, a enterré définitivement les derniers espoirs. La victoire contre Wanderers, la première sortie convaincante depuis longtemps, n’y change rien. Le club a huit à neuf points de retard à trois journées de la fin sur les deux classements. Le crédit de Recoba qui était immense à son arrivée commence déjà à s’amoindrir. Il faudra qu’il redresse la barre et qu’il remette de l’ordre alors que le vestiaire s’est rebellé contre un journaliste qui avait sorti une histoire de bagarre. Tout cela ne respire pas la sérénité et le club devra dans tous les cas se contenter d’une troisième ou quatrième place et donc d’un barrage pour la phase de groupes de Libertadores. On est loin du départ grandiose de Suárez il y a un an.

Résultats et classement

Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba