Cela faisait onze matchs, sur trois ans, que Peñarol n'avait pas vaincu Nacional. 90 minutes plus tard, ce passage à vide, ce désert des tartares, s'est effacé, Peñarol a repris la main, a effacé les affres du temps, cette création humaine. Compte-rendu du clásico de la cinquième journée du tournoi de clôture 2017.

Nacional 0 – 2 Peñarol

On le voyait venir, les courbes s'étaient inversées. Pendant un an, Lasarte a donné un style, une organisation à son équipe qui lui a permis de remporter le tournoi dit de transition, de passer la phase de poule de la Libertadores, de se battre pour l'Apertura jusqu'à l'avant dernière journée. Mais les vents ont tourné et depuis le début de ce Clausura, l'esprit n'y est plus. Ce n'est pas tant que les joueurs ont changé, ce sont presque intégralement les mêmes qui ont gagné le tournoi de transition il y a un an, c'est que beaucoup ont perdu leur niveau (Ramirez, Silveira...), et qu'il y a simplement moins d'envie, à l'image d'un Polenta toujours aussi fébrile mais sans ce brin de chance que vous donne l'envie. Comme il y a deux ans face au Peñarol de Forlán, le clásico du Nacional s'est aussi joué lors de la journée précédente, voir lors de celle d'avant encore, contre Plaza Colonia. Lors de ce match, trois joueurs ont pris volontairement un cinquième jaune pour être suspendu contre River Plate et être certain de jouer contre l’ennemi manya. Sauf que, à cause notamment de ces suspensions (Aguirre, Espino et Rodriguez, trois titulaires), Nacional a perdu 2-1 ce match contre River et a gravement compromis ses chances au classement annuel et pour le Clausura, laissant la tête au Defensor. C'est donc après une défaite que Nacional joue le clásico, avec malgré tout la force de l'habitude et une organisation bien en place. Côté Peñarol, c'est tout l'inverse. L'équipe sort d'une année de vide absolu, de violences, de débats stériles, de matchs nuls. Lors du dernier mercato, l'équipe a pris 3 à 4 cadres supplémentaires dans l'équipe, et est depuis invincible. L'arrivée de Maxi Rodriguez et de Walter Gargano principalement ont donné un squelette à cette équipe, une armature.

C'est dans ces conditions que se jouait le clásico d'hier soir.

Pour aller plus loin : L'histoire du clásico

Mais ce clásico n'est pas un clásico pour rien, et la qualité des joueurs sur le terrain n'a pas empêché la première mi-temps d'être une purge, assez violente, ou chaque coup est rendu. Nacional attaque le premier avec deux ballons récupérés haut. Viudez centre bien mais Aguirre est trop court. Dans la foulée, Espino contre un ballon de la main dans sa surface mais l'arbitre ne le voit pas. Dans le jeu, tout se joue sur les côtés, avec Estoyanoff d'un côté et Viudez de l'autre, joueurs les plus dangereux jusqu'à la 30ème. A ce moment, dans un ultime duel, Estoyanoff et Polenta s'insulte vertement sur le terrain. Ferreyra ne se fait pas prier, double carton rouge. On peut entendre à la télé ce qu'il dit aux joueurs « nous sommes ici pour jouer au football, pas vous apparemment ». L'arbitre a pris sa décision, en accord avec les règlements. La double expulsion handicape plus Nacional que Peñarol, le Bolso devant sortir un joueur pour faire entrer un autre défenseur central. C'est Sebastian Fernandez qui s'y colle, remplacé par Rolin. Vient la mi-temps, rien d'autre à signaler, match fermé pour le moment.

Au retour des vestiaires, les choses s’accélèrent. Peñarol obtient sa meilleure occasion par Maxi Rodriguez, avant que Nacional obtienne, en contre, deux occasions très franches ouù Ramon Arias arrête un ballon d'Aguirre sur la ligne avant que Viudez touche le poteau sur une frappe lointaine. Peñarol domine désormais le match des mains de Cebolla et Gargano, mais Nacional dispose de joueurs rapides en attaque qui dérange énormément la défense Carbonero. A la 75ème, sur une action venue de la gauche, Maxi Rodriguez hérite du ballon dans la surface et tente une frappe arrêté par Rogel, entre le torse et le bras. L'arbitre estime que c'est une main. Penalty. Cebolla prend le ballon en main et confirme son très bon match d'une frappe pas très bien placée mais trop puissante pour Conde. Lasarte effectue alors des changements offensifs, mais le milieu (Porras, Rodriguez) ne contrôle pas suffisamment les choses pour que cela puisse avoir un impact. Peñarol fait tourner et double la mise sur un centre de Corujo entré en jeu à la place de Rossi. Le centre est contré dans son propre but par Rogel, dont ce n'est vraiment pas la saison. Le jeune aura l'occasion de se refaire, pas le Nacional qui ne montrera plus rien jusqu'à la fin du match. Score final 2 à 0. Victoire belle et logique de Peñarol.

Côté Nacional, l'absence d'Arismendi a pesé. Porras n'a pas eu le même rendement, et Rodriguez n'a pas pu évoluer normalement, bien pressé par le milieu carbonero. En défense, les latéraux ont été bons, Polenta a pris un rouge directement qui a bien handicapé son équipe, Rogel n'a pas été mauvais mais n'a pas eu de chance, comme souvent ces derniers temps. En attaque, Aguirre s'est perdu en conversations stériles, Viudez a apporté le danger seul, Gonzalo Bueno a été transparent en deuxième période. Côté Peñarol, à l'opposé du Bolso, la clef a été au milieu. Énorme match de Cebolla, au four et au moulin. Il a été plus à l'aise en seconde période, légèrement excentré sur le côté gauche, plutôt que dans le double cinco de la première période qui ne lui permet pas de se projeter. En défense, Arias a été partout, arrêtant même un ballon de but sur sa ligne. Varela s'est bien projeté mais a eu plus de mal défensivement. En attaque, Viatri a eu son rôle habituel de pivot, Maxi Rodriguez a eu du mal à se libérer mais a montré sa vraie valeur quand des espaces se sont ouverts. Peñarol continue de dominer le Clausura avec 5 victoires en 5 matchs et un vrai choc à venir contre Defensor dans trois journées. Côté Nacional, les chances de jouer le titre en fin d'année s'éloignent, le Bolso ayant presque perdu toutes chances pour le Clausura (- 8 points sur Peñarol) et perdant pied petit à petit contre Defensor au classement annuel (- 5 points). Le cycle Lasarte se terminera sans doute rapidement si le club était amené à perdre quelques matchs supplémentaires dans les prochaines journées.

Joueur du match : Cebolla Rodriguez

Les autres matchs

Defensor 1 – 0 Danubio : C'est le match dont j'aurais dû parler plus. Grand match de l'équipe du Parque Rodo, dans un stade Franzini magnifique, sous le soleil printanier. Defensor s'impose encore, prend le large au classement annuel et reste deuxième pour ce qui est du Clausura. But sur corner de Maullela.

Rampla Juniors 2 – 0 Plaza Colonia : Avec un premier but MAGNIFIQUE ! On commence, par contre, à compter les journées avant que Colonia ne soit officiellement relégué.

Fénix 0 – 0 River Plate

Wanderers 1 – 1 Racing

Liverpool 1 – 0 Cerro : Liverpool revit enfin, des mains de Rosario Martinez, nommé entraîneur il y a deux journées.

Pour le reste

Torque est leader de la deuxième division, et devrait sans problème monter en première division à la fin de saison. Le club s'est encore renforcé durant le mercato, avec quelques jeunes joueurs vénézuéliens/colombiens/chiliens prêtés, et des joueurs de base du championnat uruguayen comme Pais du Defensor ou Mallo de Liverpool. Un an après le rachat du club par Manchester City, les celestes seront le sujet de conversation lors du prochain exercice. Que se passera-t-il s'ils sont amenés à jouer le titre, alors qu'ils n'ont ni stade, ni public, ni histoire, ni rien. Mon petit doigt me dit que l'on va en reparler.

Les buts

Résulats

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Classement

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Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba