Un Clásico est toujours un choc, comme les tribunes ont pu le montrer. Surtout quand l’un est premier, l’autre deuxième, que des années lumières les séparent du reste du championnat au classement, que l’un a gagné l’Apertura, que l’autre fait course en tête pour le Clausura, Nacional dominant le classement cumulé…

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La limite de tout cela a pu être vue durant ce match. Chacun jouant son propre classement, on annonce dès lundi (début de la semaine dite « pré-Clásico ») qu’un match nul arrangerait tout le monde. Nacional restant leader au classement annuel, se garantissant un avantage au niveau des finales, Peñarol conservant quatre points d’avance à deux matchs de la fin du Clausura, s’assurant de participer à ces finales… Un bon 0 à 0 des familles ? Pas si simple, parce que les équipes en question ont des attaques très efficaces avec des buteurs de qualité (Bergessio, Fernandez), parce que les milieux sont créatifs et tournent bien (de Cebolla à Chory Castro en passant par Romero, Aguiar…) et que l’on imagine mal tout cela se terminer sans but, au vu de la rivalité des deux équipes. D’autant plus qu’il y a peu d’absents, Gargano est de retour pour Peñarol mais sur le banc, encore trop juste physiquement, tout comme Viatri. Côté Nacional la défense fait un peu peur en l’absence de Rolin, c’est Erramuspe qui reprend son poste au côté de Garcia. Dans tous les cas, les deux équipes sont huilées, ont fait une bonne saison, et sont prêtes pour l’affrontement.

La première mi-temps est plaisante, sans but. Peñarol n’y arrive pas côté gauche avec Canobbio mais déborde souvent côté droit du pied d’un Giovanni Gonzalez très remuant. Le jeu reste dominé par le Bolso, avec Bergessio précieux et précis aussi bien en attaque qu’en remise, mais, surtout au milieu, une domination dans la possession de balle avec Chory Castro, Oliva et Romero. Nacional joue plus bas, se laissant des espaces devant, et le contrôle du match. Ce contrôle est validé à la marque au retour des vestiaires sur un bon ballon de Castro côté gauche. Ce dernier passe dans l’axe à Bergessio, qui élimine facilement Formiliano dans son contrôle, et passe dans l’intervalle à Seba Fernandez. Ce dernier arrive sur le ballon avant Carlos Rodriguez et trompe Dawson sur sa droite. Ouverture du score mérité, même si Peñarol ne démérite pas. Dans la foulée, Bergessio a la meilleure occasion du match sur un centre de Castro. Sa tête est repoussée difficilement par Dawson avant de lui revenir dessus. Sa reprise de demi-volée vient s’écraser sur la transversale. Nacional a laissé passer l’occasion de faire le break, et pourra peut-être le regretter. Car Lopez prend alors les choses en main et fait entrer des joueurs revenant de blessure mais d’un niveau largement supérieur comme Viatri puis Gargano. Le quart d’heure autour de l’heure de jeu voit le jeu s’équilibrer, Nacional reculant dans le jeu, sans doute insciemment, mais de façon évidente. Peñarol n’arrive d’abord pas à construire, même si les Carboneros auraient pu obtenir un penalty sur une faute de main d’Espino. Finalement, avec notamment l’entrée en jeu de Gargano, l’équipe se met en place, et égalise logiquement à sept minutes de la fin. Alors que c’est d’habitude l’inverse, Fernandez effectue ici un magnifique petit centre brossé vers Viatri. Ce dernier met la tête alors que Fucile met le pied. Heureusement, la tête de Viatri vient avant le pied et pique le ballon dans le but du Coco Conde. Peu importe que dans la seconde la semelle de Fuci vienne s’écraser sur la joue de Viatri, peu importe tout le reste, Peñarol a obtenu le plus important, l’égalisation. Finalement, comme c’était prévu en début de semaine de ce Clásico, le score est bien un match nul. Heureusement la partie a été beaucoup plus intéressante que ce que le score laisse présager. Et on peut se pourlécher les babines d’ici à novembre, parce qu’il y aura bien des finales clásicas.

Côté Peñarol, l’équipe reste dépendante de certains joueurs qui devraient revenir en pleine forme pour cette fin d’année. Darwin Nuñez est encore léger dans l’organisation, Cebolla ne peut pas faire tout tout seul, Pereira est toujours un ton en dessous, surtout si Gargano revient pleine bourre. Canobbio a de nouveau été décevant. Côté Nacional, bon match de la doublette Fernandez/Bergessio, Fucile a souffert en défense et n’aurait pas dû finir le match. Le milieu, notamment Oliva et Romero, ont dominé leur adversaire.

Mon analyse personnelle du score est que Nacional va regretter ce match. Ils vont entrer pendant un mois dans un tourbillon incluant la Sudamericana et les finales, jouant tout sur quelques matchs, alors qu’ils avaient la possibilité d’assommer leur adversaire. Peñarol a encore à jouer le Defensor au Franzini, donc pas une partie de plaisir. Le Bolso avait pris acte de sa défaite au Clausura après avoir perdu les trois points contre Boston River. Dont acte. Si Peñarol gagne au moins un des deux matchs restant à jouer (Progreso et Defensor) et que Nacional ne s’effondre pas contre Atenas et Danubio, on aura à minima une finale, pour déterminer un vainqueur entre Apertura et Clausura, Peñarol et Nacional. Si Nacional gagne, il est titré champion, si Peñarol gagne, nous aurons alors une finale en deux matchs, format aller-retour. Que du bonheur, de quoi passer le mois de novembre tranquillement (sachant que l’AUF se fera taper sur les doigts par la FIFA car le championnat devait être terminé pour la Coupe du Monde féminine U17 qui commence le 13 novembre).

Le Clásico s’est encore une fois déroulé dans le calme, et cela ça n’a pas de prix. Le scandale a été sur deux hurluberlus ayant portés dans la tribune Colombes des supporters du Nacional des matelas gonflables reprenant les noms de victimes par balle des dernières années du côté de Peñarol. Ils ont été pris en photo, débusqués, retrouvés ni une ni deux, l’un d’eux à 14 ans, et joue dans les équipes de jeune du Defensor et de l’Uruguay. Il passe un très sale quart d’heure actuellement, mais ce qu’il a fait est suffisamment dérangeant pour être assez fermement condamné. Le fait que ce soit le seul incident notable reste une victoire.

Pour le reste

Defensor et Danubio restent en bonne posture, le Defensor n’ayant pas joué et Danubio ayant pris un bon point à l’Olimpico face à Rampla. Wanderers s’impose 5-0 lors du Clásico du Prado face à River Plate. Wanderers est bien la troisième meilleure équipe de ce Clausura et va terminer au pied de la Libertadores pour pas grand-chose après un très mauvais Apertura. L’inverse de River. L’irrégularité se paie. Fénix sauve les meubles face à Atenas en retournant le match lors du dernier quart d’heure pour s’imposer 2 à 1. C’est sans doute fini pour Atenas, qui perd encore des points dans les dernières minutes.

Les buts

Résultats

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Classement

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Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba