Première journée du Clausura et trois équipes se détachent au classement annuel, deux équipes plus ou moins connues (Peñarol et Nacional) et une maison bleue de l'intérieur, adossée à la colline, Cerro Largo. Le championnat va désormais s'emballer avec des journées en milieu de semaine, le final se rapproche.

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Rien n'est tout blanc, ou tout noir, surtout dans le football, surtout dans le football uruguayen. Tout n'est que nuances. C'était le cas, il y a une semaine, du surprenant champion de l'Intermedio, Liverpool. Un entraîneur plein d'avenir, un jeu léché, mais aussi une équipe qui dispose de très bons jeunes grâce à son président Palma et à ses liens très étroit avec un certain Paco Casal, plus grand agent/représentant/collectionneur de footballeur du pays (possédant aussi les droits télés), qui préfère désormais placer ses joueurs dans des clubs comme Liverpool, plus facilement contrôlable qu'un Peñarol par exemple. Mais voilà, si l'on ne regarde que les turpitudes financières derrière chaque club, on ne s'en sort plus, surtout dans un pays comme l'Uruguay qui a autant laissé aller ce business de l'achat/vente de footballeur par d'autres entités que les clubs. Alors il faut admirer la montagne, sans vraiment tenter de savoir ce qu'elle renferme.

La meilleure cote cette année se trouve en tout cas au Cerro Largo FC, club de l'intérieur, qui domine toujours le classement annuel à seulement quatorze journées de la fin. Même si le club n'est pas champion, cette place veut dire maintien assuré cette année et aussi, sans doute, l'année prochaine, et participation à une coupe continentale, avec dix-huit points d'avance sur Danubio, neuvième et premier non-qualifié pour la Sudamericana. L'équipe est composée cette année d'un savant mélange de bons joueurs du championnat uruguayen (Yefferson Quintana, Washington Aguerre (ex-Peñarol), Jonathan Dos Santos (ex-Danubio)) et quelques bons joueurs provenant de Boca Juniors (Mauro Luna, Tomas Fernández, Lucas Arzamendia). Pourquoi Boca ? Car les deux clubs ont mis en place un « partenariat » en début d'année, le club argentin envoyant à Melo ses jeunes joueurs ne s'étant pas imposés dans son équipe première. Objectif : donner du temps de jeu. Et ça marche, puisque des joueurs comme Mauro Luna Diale ont montré lors des six derniers mois de très bonnes choses. Il faudra voir sur le long terme si cela fonctionne, avec la rotation des joueurs que cela implique.

Il existe un troisième type de joueurs à Cerro Largo, ne venant ni du championnat, ni de Boca. Bruno Téliz par exemple, le capitaine, courant partout au milieu de terrain pour équilibrer l'équipe dans le système de Danielo Nuñez. Il a été formé par Wanderers, avant de faire quelques clubs de seconde division et d'arrêter le football professionnel pour devenir éducateur auprès du ministère des affaires sociales. Il travaillait alors à Montevideo, mais retournait le week-end jouer en coupe OFI (clubs de l'intérieur) pour la sélection de Treinta y Tres, son département au nord-est du pays, retrouvant ainsi le plaisir de jouer au football. Un jour de clásico, entre la sélection de Treinta y Tres et celle de Cerro Largo (mais OFI, donc n'étant pas celle du club professionnel), il est repéré par le président de Cerro Largo FC et signe donc un nouveau contrat professionnel, en deuxième division. En deux saisons, il s'impose, au point de prendre le capitanat quand Carlos Bueno se blesse à mi-saison l'année dernière. Le club termine champion de la B, et monte donc au plus haut niveau. Téliz continue d'y être capitaine, et de dominer le milieu de terrain, avec son maillot floqué du numéro de son ancienne équipe amateur, 33, Treinta y Tres.

Voilà pour la présentation de la majorité des joueurs du club. Cerro Largo se déplaçait hier sur le terrain de Danubio, un Danubio en pleine crise avec de mauvais résultats depuis le début de saison, le départ de Tomas Chacón aux USA, et hier l'absence de Carlos Grossmüller suspendu. Danubio a montré toutes ses carences hier en dominant la possession mais en étant incapable de construire quoi que ce soit avec la balle, dans les quarante derniers mètres adverses. Au contraire, Cerro Largo a été létal, avec un premier but en contre d'Adolfo Lima, avant d'être imité en seconde période par un deuxième but en profondeur de Jonathan Dos Santos. À chaque fois, la différence vient de la passe au milieu, qui décale parfaitement l'attaquant entre les défenseurs de Danubio. Au final, sans prendre trop de risque derrière, Cerro Largo a dominé le match, malgré la réduction de l’écart en toute fin de match de Santiago Mederos. Trois nouveaux points qui rapprochent de quelque chose que l'on ne peut pas encore imaginer.

Nacional a pulvérisé un Liverpool qui a perdu beaucoup avec le premier but dès la troisième minute d'Armando Méndez. Par la suite, le bolso a pu contrôler le match, et le style de jeu ouvert de Liverpool. À noter, le retour en pleine forme de Santiago Rodríguez, qui sera central si Nacional veut gagner le championnat. Peñarol a battu un bien faible Defensor grâce à un but sur corner, après rebond et passe du dos, de Cristian Rodríguez. Comptablement, la victoire fait du bien, mais que de problèmes défensivement encore côté Peñarol, l'équipe jouera les finales, mais sauf à avoir un miracle à la Peñarol, la suite devrait être très compliquée. Même topo côté Defensor, avec un Mariano Pavone pour le moins décevant, un Tata González qui a pris un rouge vraiment con, sur une deuxième faute absolument inutile (l'inconvénient d'être en retard sur chaque action). Plaza Colonia a battu Boston River, et se rapproche simultanément du maintien et de la Sudamericana. River continue son retour avec une victoire nette sur Wanderers et un nouveau but du jeune Arezo. Progreso et Rampla Juniors, et Fénix et Juventud ont fait matchs nuls. Cerro bat le Racing sur un but de Tancredi dans un match primordial pour le maintien. La mission s'annonce dure, mais pas impossible, dans un bas de tableau qui voit trois clubs se distinguer vers le bas : Juventud, Boston River et Rampla Juniors.

Les buts

Résultats

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Jérôme Lecigne
Jérôme Lecigne
Spécialiste du football uruguayen, Suisse de l'Amérique du Sud, Patrie des poètes Jules Supervielle, Juan Carlos Onetti et Alvaro Recoba