Deuxième journée de la zone Afrique et déjà certaines grosses cylindrées se retrouvent en grand danger, quand d’autre reviennent sur le devant de la scène. Des buts, des polémiques, le bilan du week-end africain.

Les Pharaons en pole position

Pugnace, solide et réaliste : l’Egypte d’Hector Cuper a arraché contre des Blacks Stars peu inspirés trois points qui pèseront lourd dans la course au ticket magique pour la Russie. Mohamed Salah et ses coéquipiers reprennent la tête du Groupe E à l’Ouganda avec 6 points. Plombés par une ligne offensive à court d’idées et orpheline de Gyan Asamoah, les ghanéens devront faire le plein contre le Congo et espérer que Pharaons et Cranes s’écharperont au maximum pour garder un espoir de qualification pour le mondial.

Trois revanchards vont savourer la victoire de l’Egypte contre le Ghana plus que les autres. Ils sont 14 à avoir vécu le naufrage de Kumasi (6-1) 35 mois plus tôt lors du barrage éliminatoire pour la Coupe du Monde 2014. Seuls trois d’entre eux étaient là hier : Ahmed Fathi, Mohamed Salah et Mohamed El Nenny. La vieille garde s’est retirée (Gomaa, Aboutrika) la très vieille garde fait de la résistance (El Hadary titulaire dans les cages à 43 ans !) et la nouvelle génération, menée par Trezeguet, pointe le bout de son nez, mais c’est Salah et ses deux compères, survivants de la débâcle, qui doivent porter le flambeau sur le long chemin qui mènera peut-être l’Egypte à son premier Mondial depuis 1990. Les prémices d’une maturité tactique retrouvée avec Hector Cuper et la victoire très importante glanée au Congo demandaient confirmation. Au vu de l’empoignade gagnée contre le Ghana, ces prémices ne sont plus très loin de devenir des certitudes, à condition que la double confrontation contre l’Ouganda soit bien négociée.

Pourtant, la première demi-heure inaugurale ne laissait pas présager de fin heureuse pour les locaux, dans un stade d’Alexandrie inquiet de voir ses protégés courir après le ballon et subir la pression ghanéenne. Deux occasions, nées de la même combinaison (balle piquée d’Abdallah Saïd pour Salah) et beaucoup d’énergie dans le vide pour dissiper la crainte d’un Ghana musculeux mais qui ne sait pas exploiter ses forces vives. Sans Asamoah, le 4-2-3-1 des Blacks Stars s’est contenté d’être une accumulation de joueurs avec une forte explosivité et une belle faculté d’élimination. Sans liant, sans relation technique entre les éléments offensifs, sans dernière passe. Atsu et Badu ont permuté sans arriver à créer de différence. Hormis le coup-franc de Wakaso et un décalage gâché par Jordan Ayew qui a multiplié les crochets intérieur, l’équipe d’Avram Grant n’a pas montré grand-chose même en monopolisant le ballon. Au fil des minutes, l’Egypte est passée d’une équipe asphyxiée qui défend comme elle peut à une équipe qui défend à l’aise et soigne mieux ses sorties de balle.

L’ouverture du score de l’Egypte est une illustration du manque d’idées côté visiteurs. Sur un coup-franc égyptien, Jonathan Mensah prend la balle dans sa surface et fonce bille en tête droit devant lui, sans prêter attention à ses coéquipiers. Il est repris à 40 mètres de ses buts, sur le côté. La balle arrive à Trezeguet, qui fait un grand pont sur Afful et obtient le pénalty transformé par Salah (43’). Les Pharaons ont été attentistes, n’ont planté que trois banderilles, mais mènent au score.

Le scénario leur étant favorable, il ne restait plus aux hommes de Cuper qu’à montrer le savoir-faire local dans une configuration ou le score leur sourit : Plus aucune brèche dans l’axe, les côtés doublés, une ou deux « blessures » d’El Hadary pour casser le rythme, et recherche de l’espace vide dans le camp adverse à la récupération. L’entrée en jeu de Ramadan Sobhi dans une position plus reculée que celle de Morsi a permis d’utiliser au maximum cette notion d’espace. Le passage d’un système à deux pointes à un système sans numéro 9 dans lequel Salah se déplace dans plusieurs zones a déstabilisé l’arrière-garde ghanéenne. Sur le contre qui amène le second but, Salah revient réclamer la balle dans l’axe au lieu de prendre la profondeur. Amartey, moins rapide que l’attaquant de la Roma, renonce à aller le chercher. Faute de repli, Salah est seul et a tout le temps de renverser le jeu pour Sobhi à gauche, dans l’espace. Sobhi provoque, rejoue avec Salah qui s’est projeté dans la surface, et Saïd qui a bien suivi finit l’action.Avec 6 points, l’Egypte a maintenant un joker d’avance sur le Ghana dans l’optique du match retour. Mais gare aux Ougandais et à Farouk Miya. Les Cranes ont bonifié le point ramené d’Accra en s’imposant contre le Congo, et pourraient bien brouiller les cartes de ce Groupe E. L’Egypte a retrouvé quelques-unes des vertus qui ont fait sa gloire dans les années 2000, mais le chemin qui mène à la Russie est encore long.

 

L'Algérie coule, le Sénégal résiste

Trois autres affiches dominaient le week-end africain. A Polokwane, le Sénégal entendait bien poursuivre sur sa belle série de sept victoires consécutives pour conserver la tête du groupe D et marquer psychologiquement l’un de ses rivaux pour la qualification, l’Afrique du Sud. Certes les Lions ont donné une belle impression de maîtrise, à l’image par exemple de ce terrible constat : la première frappe sud-africaine du premier acte intervenait à la 39e minute. Mais le Sénégal a aussi affiché quelques lacunes qui lui ont coûté cher sur ce duel et pourrait être davantage lourdes de conséquences dans l’avenir. Première d’entre elle, la friabilité de son côté gauche, objet de toutes les offensives adverses, côté qui amenait au centre de Makola générateur du controversé car inexistant penalty pour l’Afrique du Sud. C’est aussi de ce côté que venait le deuxième but, un centre de Dolly remis par Makola pour le plat du pied de Serero. Deuxième lacune, cette faiblesse mentale qui voyait le Sénégal couler après le penalty totalement inexistant et se faire ainsi piéger par manque d’attention à peine trois minutes plus tard car encore préoccupé par l’objet du scandale. Dernière enfin, la plus grave, cette apparente nonchalance, cette incapacité à agir ou à accélérer quand le match était entre ses mains. Certes, les Lions ont réagi, l’entrée de Cheikh N’Doye a fait un bien fou en ce sens, mais à trop vouloir être « bien en place » et ne jamais parvenir à apporter vitesse, créativité et folie à son jeu, le Sénégal s’est retrouvé finalement incapable d’aller chercher un résultat. Et voilà désormais les Lions dépassés par les Bafana Bafana et par le Burkina Faso, rentré victorieux de son déplacement au Cap-Vert. Rien n’est encore préoccupant pour le Sénégal mais il faudra pallier ces lacunes pour s’éviter toute mauvaise surprise lors de la réception du leader burkinabais. Fort heureusement pour Aliou Cissé, le troisième tour est prévu en août 2017, ce qui laissera du temps pour travailler.

La situation devient en revanche très préoccupante pour l’Algérie. Après le nul concédé face au Cameroun en ouverture, les Fennecs se savaient en danger. Rajevac parti, la délicate mission Russie 2018 était confiée à Georges Leekens qui se voyait offert en guise de cadeau de bienvenue, un périlleux déplacement au Nigeria. Il l’aura été davantage que l’Algérie a exposé ses faiblesses défensives. Sachant qu’une victoire lui permettrait de prendre le large sur un concurrent direct, le Nigeria débutait la partie tambours battants et s’offrait une première occasion par Obi Mikel avant d’ouvrir logiquement le score grâce à un déboulé plein axe de Victor Moses après un une-deux avec le défenseur des Fennecs Hichem Belkaroui. Les hommes de Leekens allaient bien avoir quelques situations pour revenir, Bentaleb manquant un but tout fait, mais se faisait une nouvelle fois punir avant de rentrer aux vestiaires suite à un alignement des plus aléatoire de sa défense. Obi Mikel prenait ainsi le temps de regarder l’assistant pour s’assurer de l’absence de hors-jeu et après avoir pris un café, ajustait M’Bolhi et permettait donc au Nigeria de gérer la suite de la rencontre. Car si les Fennecs ont quelque peu réagi, portés par des raids souvent un peu trop solitaires, ils allaient entretenir l’espoir sur un missile de Bentaleb, rien n’y faisait. Le Nigeria était véritablement collectivement supérieur et nettement plus serein, Victor Moses s’offrait un doublé en toute fin de partie et plongeait l’Algérie dans une situation des plus compliquée, à peine sauvée par le nul entre Zambie et Cameroun. Reste qu’avec cinq points de retard sur le leader nigérian, la course à la Russie semble déjà compromise.

Dernière grosse affiche, l’attendu Maroc – Côté d’Ivoire, retrouvailles d’Hervé Renard avec ses Eléphants. Si le Maroc s’est donné les moyens de bousculer les Ivoiriens, poussé par un Stade de Marrakech plein comme un œuf, rien n’y aura fait. La faute à une solidité défensive adverse impressionnante, symbolisée notamment par les parades de Sangaré sur les situations les plus chaudes comme la tête à bout portant de Youssef En Nesyri à dix minutes de la pause. En seconde période, le scénario restait le même, le Maroc mettait la pression, s’offrait quelques situations chaudes mais la défense ivoirienne tenait un 0-0 qui lui assure de conserver les commandes du groupe bien aidé par le nul sans but venu clore un Mali – Gabon des plus ennuyeux.

Résultats et classements

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee