Les Socceroos étaient en Norvège pour entamer leur préparation à la Coupe du Monde en Russie. Après le départ de leur sélectionneur en qualifications Ange Postecoglou, Bert van Marwijk faisait ses grands débuts sous les couleurs d’une sélection nationale australienne où les interrogations étaient nombreuses. Accompagné de Mark van Bommel, le nouvel homme fort de la sélection a raté le coup d’envoi.

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« Si vous avez de bons joueurs, vous n’avez pas une bonne équipe … si vous avez une bonne équipe, les joueurs seront meilleurs individuellement ». La déclaration, faite quelques jours avant la première rencontre des amicaux australiens par Mark van Bommel, visait à résumer la qualité de l’équipe nationale australienne, et n’a pas manqué de faire réagir. Le moindre geste décrypté, les Socceroos version 2018 ont ensuite travaillé leur jeu de passe et leur exécution, leur jeu d’équipe en quelque sorte. Tout ce qui leur a manqué face à la Norvège.

Crise d’identité

australievsnorLe 25 janvier dernier, à l’annonce du recrutement de Bert van Marwijk pour accompagner les Socceroos à la Coupe du Monde, les questions étaient nombreuses : Qu’est-ce que le technicien néerlandais allait proposer ? Allait-il tout changer en comparaison du style si marqué d’Ange Postecoglou ? Allait-on voir une hiérarchie redistribuée sur les postes clefs ? Le technicien s’était alors expliqué et annoncé reprendre les travaux de son prédécesseur.

Le 14 mars, une liste de 26 joueurs est présentée. Bert van Marwijk montrait qu’il était fidèle à ce qu’il avait annoncé en reprenant les joueurs qui avaient participé à la qualification de l’Australie pour cette Coupe du Monde. Certains choix, comme toujours, posait à questions comme par exemple celle de la non-sélection de Jamie Maclaren ou celle de la convocation d’Aleksandar Susnjar, méconnus pour les non-initiés à la sélection, mais connu et finalement logique pour ceux suivant les U23. Bert van Marwijk se montrait cependant judicieux dans ses choix en prenant l’ancien duo de Newcastle Jets, Andrew Nabbout et Dimitri Petratos, tout en veillant à sélectionner Brad Jones et James Meredith. Le sélectionneur et ses superviseurs ont scruté une centaine de joueurs australiens, il donnait une liste très prometteuse sur le papier et insistait également sur un point : Aucune porte n’était fermée avant juin et beaucoup de joueurs peuvent encore quitter ou entrer dans la liste finale.

La liste validée, l’envol fait, les Vert et Or de BvM se sont donc posés sur le sol norvégien. Une sélection choisie pour sa proximité footballistique avec son voisin danois, futur adversaire de l’Australie à la Coupe du Monde, la Colombie (adversaire du prochain match amical de mardi à Londres) émulant de son côté ce que pourrait être le Pérou. S’il avait annoncé de la continuité, les premiers entraînements sous van Marwijk ont d’abord montré que l’Australie allait abandonner le 3-5-2 si cher à Postecoglou pour un semblant de 4-2-3-1. La patte van Marwijk était posée et logique, son Australie allait jouer de la même manière que l’Arabie Saoudite, sa précédente sélection. Moins d’une heure avant le coup d’envoi, le onze de départ des Socceroos pouvait étonner notamment par ses nouveautés mais montrait cependant une certaine logique au vu du temps de jeu en club des onze joueurs présents.

Placé seul à la pointe de l’attaque, Andrew Nabbout faisait ses très grands débuts et fêtait sa première sélection avec Dimitri Petratos également présent dans le onze de départ. Le reste du corps offensif était assez logique avec Jackson Irvine titulaire. Mathew Leckie fermait la ligne des milieux à trois et Mile Jedinak était accompagné du maitre à jouer, Aaron Mooy, pour la partie défensive des milieux. En défense, Bert van Marwijk décidait de titulariser Bailey Wright sur le côté droit, un poste assez inhabituel pour le joueur de Bristol City (mais pas inconnu). Mark Milligan était également présent, en défense centrale avec Milos Degenek et Aziz Behich en latéral gauche. Défensivement, Bert van Marwijk devait faire sans Trent Sainsbury et Matthew Jurman, trop incertains pour le match. La décision de placer le duo Milligan – Wright sur le côté droit de l’équipe a tué son match.

Nombreux chantiers

Les Norvégiens ont donné du fil à retordre à des Socceroos trop peu investis dans leur match. Les mots de Mark van Bommel n’ont pas porté, l’équipe n’a pas joué en équipe et la sélection a donné une très mauvaise image d’elle-même. Même si l’Equipe de France a chuté elle aussi dans son premier match amical, l’Australie se retrouve à devoir durement travailler tant les chantiers sont importants.

Collectivement, l’équipe a pêché, aucune occasion n’a été créée à partir d’une action collective rondement menée. On connaissait les soucis de cette sélection entrevus lors du dernier tour de qualification pour la Coupe du Monde, à commencer par le liant et la connexion entre joueurs. Rien n’est réglé, loin de là. Andrew Nabbout a essayé tout ce qu’il pouvait, Dimitri Petratos a adressé quelques centres sans effrayer Jarstein sur sa ligne de but. Tout avait pourtant bien commencé pour les Socceroos. Jackson Irvine, un des rares Australiens à avoir rendue une belle copie, inscrivait son second but en sélection sur un corner très bien frappé par Aaron Mooy. Mais derrière cette action, la Norvège a dominé de la tête et des épaules son adversaire. Le duo Kamara – Elyounoussi a provoqué bons nombres d’actions dangereuses côté norvégien. C’est d’ailleurs ce dernier, Elyounoussi, qui montrait à Bert van Marwijk l’erreur d’avoir titularisé Bailey Wright à un poste qui n’était pas le sien. Trop rapide, Elyounoussi faisait ce qu’il voulait sur son côté et Mark Milligan ne pouvait rien faire de plus lorsque le Norvégien s’incrustait dans la surface.

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Statique, les yeux rivés sur le ballon, qu’importe qu’elle soit passée à une ligne de quatre, la défense connait les mêmes problèmes qu’auparavant, une extrême porosité. Et la Norvège a parfaitement exploité ces failles. Le premier but : Bailey Wright dépassé, Kamara démarqué. Le deuxième : Bailey Wright donne un coup-franc à Johansen, Riginiussen démarqué place sa tête. Le troisième : mauvaise passe de Maty Ryan, Kamara conclut. Le quatrième : florilège d’amateurisme de tous les secteurs. Kamara termine. Il faisait froid à Oslo, les Norvégiens ont réchauffé les cœurs de leur supporter. De plus, la star nationale Martin Odegaard n’a pas été titularisée en début de match. L’Australie a tout raté, Bert van Marwijk a tout raté mais pourra s’appuyer sur certaines choses.

Car tout n’est pas négatif. Aziz Behich a, une nouvelle fois, été étincelant, le latéral de Bursaspor a été le meilleur joueur sur le terrain. Jackson Irvine a fait tout son possible et le duo Nabbout – Petratos a été certes timide mais volontaire. C’est au niveau des entrées en jeu que les Socceroos ont brillé. Tom Rogic est rentré directement dans son match en tentant plusieurs frappes, Aleksandar Susnjar a été à la hauteur des attentes placées en lui et Massimo Luongo a ratissé plusieurs ballons et apporté toute sa fraîcheur à la place de Mile Jedinak. De l’autre côté, Bert van Marwijk a promis de faire bouger le poste de gardien de but. Contre la Colombie, il ne serait pas étonnant de voir Brad Jones ou Danny Vukovic débuter sur la ligne de but, pour faire souffler Maty Ryan. Côté défense, on souhaite le retour en forme de Matthew Jurman ou de Trent Sainsbury. Bert van Marwijk saura qu’à présent Bailey Wright ne peut être latéral droit quand Josh Risdon a attendu sans broncher sur le banc des remplaçants. Plus qu’une simple question de positionnement, Bert van Marwijk doit absolument cimenter les joueurs entre eux. Il a été impressionnant de voir la facilité qu’à eu la Norvège à percer les Socceroos dès lors qu’elle a créé du jeu. En plusieurs passes verticales, ils se retrouvaient dans la surface australienne. L’Australie n’en a quant à elle jamais été capable. Avant son premier match à la tête des ‘Roos, Bert van Marwijk avait déclaré : « Mon but est de passer le premier tour, si je pensais que nous n’en sommes pas capables, je n’aurais pas accepté le poste. Je suis réaliste, mais aussi optimiste. Nous devons être sous pression, vous avez besoin de pression pour être performants. » Après ses quatre-vingt-dix premières minutes et la leçon prise face à la Norvège, jamais la pression n’aura été aussi grande. Car mardi, contre une Colombie gonflée à bloc par sa victoire face à l’Equipe de France, un nouvel échec aurait de lourdes conséquences. Et l’Australie n’a pas assez de temps pour se poser de nouvelles questions.

Antoine Blanchet-Quérin
Antoine Blanchet-Quérin
Spécialiste du football australien, néozélandais et océanien pour Lucarne Opposée.