Les deux matchs face à la France et l'Australie ont donné quelques certitudes à la sélection cafetera. Certains joueurs ont notamment pris une option pour un voyage en Russie cet été. Bilan des amicaux.

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Au-delà du simple bilan comptable, avec une victoire et un match nul, ce dernier est globalement positif, la victoire symbolique à Saint-Denis a marqué les esprits. Le nul contre l'Australie a été plus frustrant qu'autre chose tant les Colombiens ont eu l'occasion de faire sauter le verrou australien. Mais il n'a pas été dénué d'enseignements non plus.

Deux matchs en un ?

La victoire de la Colombie sur la pelouse du Stade de France, contre l'équipe de France, est certainement la plus belle victoire à l'extérieur depuis 2012 et la victoire 3-1 à Santiago contre le Chili de Sampaoli lors des éliminatoires pour la Coupe du monde 2014. Elle lui ressemble même sur le plan du scénario. Pendant la première demi-heure contre les Bleus, les joueurs de Pékerman n'ont tout simplement pas vu le jour. Surpassés, surclassés dans tous les domaines et à tous les niveaux, du gardien jusqu'aux attaquants. Fautif contre le Paraguay et le Pérou, Ospina a encore offert un but dans une défense apathique. Fabra latéral ultra-offensif a oublié que son travail consistait aussi à défendre, sa perte de balle a d'ailleurs entrainé le deuxième but. Falcao et James, les leaders de cette équipe, ont été deux spectateurs aux premières loges pendant ce laps de temps. Mais surtout, le milieu de terrain n'a pas rien pu faire pour endiguer les vagues bleues. La faute notamment à la paire alignée qui a tout simplement pris l'eau, notamment parce qu'Abel Aguilar était complètement dépassé. Laissé à l'abandon, Carlos Sánchez n'a rien pu faire non plus pour que son équipe sorte la tête de l'eau. Le deuxième but encaissé, sur une contre-attaque éclair, est d'ailleurs un symbole. Sans pression Sidibé s'est enfoncé sans opposition dans la défense colombienne après un relai avec Mbappé. Ce deuxième but a concentré toutes les erreurs du début de match : Absence de solution de Fabra, repli défensif aléatoire et coordination défensive inexistante. Tous les symptômes d'une équipe déséquilibrée. Si la réduction de l'écart sur un but, venue d'une non-occasion, a surtout permis à la Colombie de rester dans le match, c'est un réajustement tactique qui a changé la donne. Pas à son meilleur poste, le côté droit, Mateus Uribe est venu se replacer au milieu donnant à James un rôle d'électron libre qui lui va comme un gant. Effet immédiat, la Colombie a progressivement arrêté de recevoir des vagues. Après le deuxième but, la France n'a eu que trois occasions. Une de Griezmann juste avant la pause où il a trouvé Ospina, une de Varane sur corner où sa tête est passée à côté et une frappe lointaine de Pogba. Mieux, ce réajustement a permis de réduire l'écart entre les lignes et surtout faire un pressing efficace pour être bien plus dangereux. Muriel a récupéré un ballon dans les pieds de Varane qui aurait dû amener l'égalisation s'il avait levé la tête pour voir Falcao, puis, l’égalisation est arrivée, suite à une récupération d'Uribe et une action rapide et limpide des trois piliers de la sélection Carlos Sánchez, James et Falcao. D'un bon résultat les choses se sont transformées en excellent résultat avec ce pénalty en fin de match transformé par Juan Fernando Quintero. Ce qui est à retenir et à reproduire surtout en juin, c'est cette capacité à presser haut, à récupérer les ballons dans le camp adverse et donc à être dangereux contre n'importe quelle équipe. Avec Sánchez, Uribe, James, Izquierdo et évidemment Falcao, la Colombie a les moyens de le faire.

Verre à moitié vide ou à moitié plein ?

Après sa victoire à Saint-Denis, les Cafeteros ont pris la direction de la Gare du Nord pour passer sous la Manche et rejoindre la capitale anglaise. Au programme donc un adversaire bien moins impressionnant et surtout en reconstruction, l'Australie, mais beaucoup d'incertitudes avant la rencontre au niveau de la composition, on attendait ainsi de voir quels changements le sélectionneur colombo-argentin allait faire. On s'attendait notamment à voir démarrer Izquierdo, Borja, Mojica, voire Chará. Un seul a débuté : Johan Mojica dans son rôle de latéral gauche. Trois autres changements étaient cependant à noter avec une nouvelle défense centrale composée de Cristián Zapata et Óscar Murillo et Carlos Bacca.

Il y a deux façons d’analyser ce match face aux ‘Roos. Côté verre à moitié vide, plus que le match nul sans but, la Colombie a livré une première période quelconque du côté de Craven Cottage. En cause notamment une association Bacca/Falcao pas du tout complémentaire, ce qui a clairement réduit le potentiel offensif. Bacca et Falcao ont erré comme deux âmes en peine et ont donc été quasiment introuvables pour leurs partenaires. Pendant les quarante-cinq premières minutes, les joueurs de Pékerman se sont créé deux occasions, dont une sur un centre de Mojica dans la surface qui a trouvé James, dans une position où on attendait soit Bacca, soit Falcao. Trop peu et surtout trop frustrant après ce que cette équipe avait montré quelques jours plus tôt. Pire, la sélection aurait pu encaisser un but sur la seule occasion australienne par Jurić. Côté verre à moitié plein, il y a eu la seconde période avec avec notamment l'entrée de Miguel Borja à la place de Falcao qui a changé la donne. Plus mobile, plus dynamique, ce n'est pas moins de six occasions claires de but que la Colombie s’est créé sur les cages australiennes, dont cinq pour l'attaquant de Palmeiras. Son entrée a aussi permis à Bacca de trouver sa place. Plus mobile, plus apte à prendre les espaces, Borja a offert de la profondeur et ainsi mobilisé la défense adverse, ce qui a permis à Bacca d'avoir un plus de liberté, notamment quand il a dézoné à gauche où il a distillé quelques centres vénéneux. Alors même si elle a clairement manqué l'efficacité et la réussite, la Colombie a fait une deuxième période de haut niveau, presque du même niveau que celle du premier match et méritait clairement la victoire sur la pelouse londonienne. L’autre bonne nouvelle est au milieu où Barrios a fait son premier match de haut niveau avec la sélection, ce qui va rassurer un peu le sélectionneur qui sait qu'il a deux joueurs de haut niveau à ce poste clé de sentinelle. La défense centrale, qui n'a pas été franchement sollicitée, a, elle aussi, fait son match, notamment dans le domaine aérien. Enfin, à noter le premier match sans but encaissé pour David Ospina depuis le déplacement au Venezuela pour les qualifications de la zone CONMEBOL en août dernier. Sa seule intervention en deuxième période a été assez propre et cela pourrait lui redonner un peu de confiance. Autant de points positifs qui veulent dire plus que le résultat.

james

La liste se remplit...

Sur le plan individuel, certains joueurs avaient à valider un billet pour la Russie, ils devraient, sauf gros cataclysme, être présents au début de l'été. En défense, Johan Mojica a pris une option solide pour être la doublure de Fabra à gauche. Laissé sur le banc contre la France, il a joué tout le match contre l'Australie et a été un des meilleurs. On n'a pas pu se rendre de ses capacités défensives mais offensivement, il s'est montré à la hauteur et ses centres auraient pu se transformer en passes décisives. S'il continue à ce niveau avec Girona (à deux points d'une place en Europa League), on ne voit pas comment Pekerman pourrait s'en passer, d’autant qu’il bénéficie aussi du manque total de concurrence à ce poste. Plusieurs choix ont été faits pour suppléer Fabra (Tesillo, Balanta, Armero) sans réussite et Farid Díaz semble bien loin de son niveau d'il y a deux ans.

Au milieu, Wilmar Barrios sera la doublure de Carlos Sánchez, on pourra même envisager voir les deux joueurs côte à côte quand il faudra verrouiller le milieu de terrain. Jefferson Lerma semble également avoir validé son billet : s’il n'a eu le droit qu'à des petits bouts de matchs (25 minutes contre la France et la deuxième période contre l'Australie), le milieu de Levante a convaincu. Plus solide, plus rapide qu’Abel Aguilar, qu’il a remplacé lors des deux matchs, il pourrait même passer devant le joueur du Deportivo Cali, d’autant qu’il peut être utilisé comme doublure d'Arias au poste de latéral droit (Pékerman a déjà utilisé cette solution). L'autre milieu qui a un pied en Russie est évidemment Matheus Uribe. Son activité dans l'entrejeu a permis de remettre la Colombie à l'endroit contre la France et, même s'il n'a pas fait le match de sa vie contre l'équipe asiatique, sa prestation au Stade de France le met dans une très bonne position. Il semble aujourd'hui incontournable.

Devant, Miguel Borja devrait lui aussi faire partie des heureux élus. Son entrée en jeu lors du deuxième match a donné un autre visage à son équipe. Il a un profil atypique et unique qui lui assure presque une place dans le groupe. Ses cinq occasions nettes montrent qu'il est un vrai poison pour n'importe quelle équipe. Enfin, une scène n'est pas anodine. Il s'est offert un pénalty après avoir piégé le gardien australien et a immédiatement pris le ballon pour le tirer. Même s'il a manqué sa tentative, il ne s'est pas caché et cette détermination pourrait jouer en sa faveur. À gauche Izquierdo a fait une bonne rentrée contre les Bleus, c'est lui qui a obtenu le pénalty, il devrait se partager le poste côté gauche avec Muriel.

…et se vide aussi

Vous connaissez le proverbe « les absents ont toujours tort », ce pourrait être le cas pour un joueur en particulier : Edwin Cardona. Suspendu cinq matchs par la FIFA pour un geste raciste pendant le match contre la Corée du Sud (il en a purgé trois, si on compte celui contre le Chine juste après celui en Corée), il ne sera donc de nouveau pas éligible pour le dernier match de préparation qui aura lieu en Italie le premier juin contre l'Égypte, ce qui pose des problèmes pour trouver des automatismes. D’autres éléments ne plaident pas en sa faveur. Le fait qu’il a aussi été mêlé à une histoire de séquestration et d'agression physique en Argentine (Wilmar Barrios était lui aussi impliqué) qui se serait réglée à l'amiable, n’arrange pas sa situation quand on connait l'importance du comportement sur et en dehors terrain demandé par Pékerman. Impossible que de tels écarts de conduite restent sans conséquence. Enfin, et plus important, l'équipe n'a pas été perturbée par son absence, car les solutions existent : Même si ce n'est pas son poste naturel, Muriel a donné satisfaction, Izquierdo a aussi offert des garanties à ce poste et, dans le cas où le sélectionneur opterait pour un 4-4-2, ce poste serait évidemment occupé par James (comme au Pérou lors du dernier match qualificatif).

Au milieu celui qui a perdu gros après les deux matchs, est Abel Aguilar. Jugé comme étant l’un des responsables du début de match catastrophique en France, il n'a pas réussi à redresser la barre lors du match à Londres. Ses deux contre-performances ne sont pas passées inaperçues en Colombie et l'ancien joueur de Toulouse pourrait le payer cher. Moins solide dans les duels que Lerma ou Uribe, la porte pourrait bien se refermer juste devant lui. Son seul espoir reste qu’il est régulièrement appelé en sélection depuis 2004, qu’il a déjà vécu un Mondial et peut occuper un poste de patron qui manque cruellement à cette sélection. Reste donc à savoir si cela sera suffisant.

Les deux derniers matchs de préparation ont donc dessiné les contours de ce que devrait être la sélection colombienne en Russie, au point que l’on peut déjà envisager ce que pourrait être la liste des vingt-trois Colombiens pour la prochaine Coupe du monde.

Gardiens : David Ospina, Camilo Vargas, José Fernando Cuadrado

Défenseurs : Franck Fabra, Johan Mojica, Davinson Sánchez, Yerry Mina, Óscar Murillo, Cristián Zapata, Santiago Arias

Milieux : Carlos Sánchez, Wilmar Barrios, Mateus Uribe, Jefferson Lerma, James Rodriguez, Juan Guillermo Cuadrado, Yimmi Chará, José Izquierdo, Juan Fernando Quintero (ou Gio Moreno)

Attaquants : Duvan Zapata, Radamel Falcao, Miguel Borja, Luis Muriel

Pierre Gerbeaud
Pierre Gerbeaud
Rédacteur Colombie pour Lucarne Opposée