Au-delà du résultat brut (victoires contre l’Iran et le Costa Rica sur le même score de 1-0), les deux premières rencontres préparatoires à la Coupe du Monde des Aigles de Carthage ont dessiné les contours d’une dynamique positive sur laquelle les hommes de Maaloul vont s’appuyer, même si tout n’est pas parfait ou pleinement cerné. À un mois du défi contre le Portugal, détail des coups de cœur, des interrogations et des accès de fureur de ces cinq jours d’Equipe Nationale.

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Coups de coeur

Khazri et Sliti taille patron

A l’origine du CSC concédé par la défense iranienne et buteur face au Costa Rica, en ayant enrhumé un vis-à-vis sur chaque action, Wahbi Khazri a tenu à merveille son rôle de leader offensif en l’absence de Youssef Msakni. Sa position de faux 9 l’a amené à beaucoup bouger : dézonage puis appels incisifs de plus loin, des solutions apportées dans les couloirs, l’homme à l’origine du printemps ambitieux du Stade Rennais a prouvé que ce positionnement théorique lui sied. À condition qu’il y ait du mouvement autour de lui et que les autres milieux soient précis dans les passes; sur cet aspect, le feu follet de Dijon Naïm Sliti est sorti du lot, en se déplaçant sur tout le front de l’attaque. Une liberté qui lui a permis soit d’alerter ses compères lancés soit de multiplier l’élimination d’adversaires directs à la première touche de balle. Un duo indispensable au onze-type de la Tunisie.

Skhiri et Khaoui, débuts convaincants

Que ce soit dans le rendement ou dans l’implication, ces deux nouveaux venus ont séduit. Le milieu de Montpellier a fait son taf dans l’entrejeu en alliant efficacité et sobriété, le tonique animateur du jeu de l’ESTAC (prêté par l’OM) a lui fait montre d’une belle capacité à s’adapter : milieu offensif axial/ailier contre l’Iran, axial dans une position plus reculée contre le Costa Rica pour faciliter les remontées de balle. Et une attitude très volontaire, puisqu’on l’a vu au second match profiter de son placement pour inciter constamment ses coéquipiers à faire circuler le ballon plus vite, renverser le jeu pour trouver des espaces. En somme, une paire sur la voie royale pour prétendre à une titularisation en Russie.

Mention spéciale à Moez Hassen, titularisé dans les cages à l’Allianz Riviera contre le Costa Rica, qui a proprement fait le peu qu’il a eu à faire : deux arrêts sur les offensives des Ticos et des sorties autoritaires sur coup de pied arrêté, Un travail sérieux pour le retour du niçois dans son jardin.

Badri, le douzième homme ?

Six mois magnifiques en 2017 qui l’ont vu intégrer la sélection après avoir survolé la C1 Arabe et la phase de poules de C1 Africaine, et un logique contrecoup physique qui l’a vu plonger à partir de septembre : Anice Badri ne s’embarrasse pas des trajectoires linéaires. A présent qu’il a retrouvé l’intégralité de ses moyens, la flèche de l’Espérance de Tunis a gagné des points grâce à son enthousiasme et les prémices d’une belle polyvalence : d’une part, sa seconde mi-temps contre l’Iran ou il a apporté du liant au milieu, une première mi-temps tout feu tout flamme à l’aile quatre jours plus tard. De l’énergie insufflée rapidement sur une période précise, pas nécessairement au même poste : ne serait-ce pas là une étiquette de supersub, celle qu’il a déjà portée à Kinshasa en qualifications au Mondial, et qui lui semble promise ?

On ne sait pas : la défense : quel comportement face aux grosses cylindrées ?

Le sélectionneur Nabil Maaloul a évoqué la possibilité de jouer contre les deux favoris du groupe G (Angleterre et Belgique) avec trois défenseurs centraux et les deux latéraux offensifs un cran plus haut. Pour schématiser, un 3-4-3 quand la Tunisie a le ballon modulable en 5-4-1 en position de repli. Une configuration qui implique que les deux centraux qui « glisseront » latéralement pour combler les espaces dans le dos des latéraux puissent coulisser le plus rapidement possible. Sinon, gare aux boulevards. Et relancer proprement. Sinon, gare aux boulevards.

Le forfait de l’un des latéraux volants Nagguez contre le Costa Rica a dissuadé Maaloul de tester la défense sous cette forme-là, repassant à un back four plus classique comme face à l’Iran. S’il veut effectivement jouer comme ça en Coupe du Monde, son idée de départ semble être un trio Ben Youssef-Meriah-Benalouane, avec le premier nommé comme tour de contrôle et les deux autres en voltigeurs. Le bilan des trois larrons sur les deux matchs ? Il est simple : dans la piscine de Radès face à l’Iran, la paire Meriah-Benalouane ne peut être jugée sur la relance et a fait du duel à l’épaule sans fioriture. A Nice contre le Costa Rica, la paire Meriah-Ben Youssef a été globalement propre dans son rendement, mais malheureusement chacun des deux a commis une petite bourde : Meriah attiré par le ballon et aspiré de l’axe alors qu’il n’y avait pas besoin, anticipation risquée pour Ben Youssef. Ces deux bourdes ont amené les deux situations dangereuses du Costa Rica.

Le système à trois pourrait peut-être plus convenir à Meriah et Ben Youssef. Mais avec qui ? Benalouane avec le doute sur la résistance physique (vu son faible temps de jeu cette saison) ? Qui de Haddadi, Bronn ou Bedoui pourrait le relayer ? Le flou demeure.

On sait mais il manque un petit truc : Sassi, en dents de scie

Au maximum de sa concentration, Ferjani Sassi est un joueur précieux qui par sa technique met de la fluidité dans le jeu tunisien, peut l’accélérer s’il a envie, inventer des passes qui amènent des occasions. Quand le maximum n’est pas atteint, les pertes de balles se multiplient et le milieu de terrain est grippé. L’ancien joueur du CSS et de l’EST a montré ces deux visages contre le Costa Rica. On ne sait jamais quel visage va prendre le dessus sur l’autre, et pour combien de temps. Les pics (dans le sens positif) rendent le joueur incontournable, mais les fans de foot tunisiens prient pour un brin de constance en plus…

Légère inquiétude : Les gestes qui pourraient coûter cher en match officiel

Le tacle inconsidéré de Benalouane dans la surface contre l’Iran, la session sécateur initiée par Bronn et Ben Amor dans ce même match, des gestes de nervosité de Khazri dans les deux rencontres : autant de petits détails qui passent à l’as en match amical, mais peuvent envoyer un joueur aux vestiaires d’un claquement de doigts en match officiel. Des gestes qu’il faudra gommer en Russie, car ce serait dommage que tant d’efforts pour accéder à la grand-messe du football mondial soient mis à mal par quelques secondes évitables.

Le désespoir : La TV Nationale en roue libre

Les moments de bravoure inexplicables proposés par la première chaîne tunisienne Wataniya 1 sont fréquents pendant les matchs de championnat, suscitant chez les téléspectateurs un sentiment complexe mêlant malaise et hilarité. Pour les matchs de sélection, la TV nationale a décidé de frapper fort. Un spot pub interminable après le JT qui a fait reprendre la retransmission de Tunisie-Iran à la 53ème minute, envoyant ainsi sept minutes de jeu aux oubliettes ; Les hymnes pour Tunisie-Costa Rica purement et simplement zappés ; Un commentateur qui lâche un « Panorama » pour parler de l’équipe du Panama. Trois phases de décontraction qui viennent s’ajouter à un cru 2018 déjà savoureux.

Les résumés

Tunisie-Iran

Tunisie-Costa Rica

 

Farouk Abdou
Farouk Abdou
Actuellement à E-management, passé par Echosciences Grenoble, Le Dauphiné Libéré, Sport Translations et Tunisie foot, Africain volant pour Lucarne Opposee