Une campagne de qualification des plus chaotiques, des remous en coulisse à n’en plus finir, trois sélectionneurs en deux ans et au final des critiques et des doutes, l’Argentine aborde la campagne russe sans avoir convaincu les observateurs. Et si c’était finalement la recette idéale ?

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La campagne de qualification n’aura été qu’une longue litanie où match après match l’Argentine aura peiné à convaincre, aura attiré de nombreuses critiques mais d’une part aura fini par être sauvée par un joueur hors norme, Lionel Messi, d’autre part par s’éviter l’humiliation que beaucoup redoutaient. On se disait alors que le plus dur était fait, que la qualification allait permettre à Jorge Sampaoli de prendre le temps de peaufiner son système, d’installer sa philosophie dans le calme avant la grande échéance pour laquelle l’Argentine n’a d’autre choix que celui d’endosser le rôle d’un favori. Il n’en fut rien.

La prépa ? Quelle prépa ?

Onze matchs passés à la tête de la sélection, onze formations différentes pour Jorge Sampaoli. Si nombreuses sont les sélections à avoir acquis des certitudes depuis bien longtemps, l’Argentine n’est pas de ce cas. On pouvait alors imaginer que, comme d’autres, l’Albiceleste allait profiter du stage plus long pour parfaire ses gammes avec plusieurs amicaux. Seulement deux avaient été programmé (sic), face à Haïti et, génie absolu, face à Israël à Jérusalem. Autant dire que la politique est rapidement venue se mêler de l’affaire et les menaces de mort et autres protestations qui ont entouré la possibilité d’un voyage des Argentins en Israël ont rapidement mis fin à ce deuxième amical. En coulisses, les critiques se sont abattues sur une fédération qui semble toujours autant naviguer à vue. Sur le terrain, ce match apporte un manque supplémentaire. Car la conséquence est que l’Argentine ne s’est offert qu’un seul match de préparation, face au modeste Haïti, à la Bombonera pour dire au revoir à ses supporters. Rien de plus. Le reste, des entraînements, des répétitions mais rien grandeur nature, aucun adversaire digne de ce nom, aucune équipe africaine jouée depuis la déroute face au Nigeria (futur adversaire), aucune européen depuis la rouste reçue à Madrid face à l’Espagne. Deux matchs sans Messi. À l’heure où la sélection n’a jamais offert la moindre garantie, où le sélectionneur en place sait qu’il a besoin de temps et de matchs pour mettre en place sa si belle, si ambitieuse mais si demandeuse philosophie de jeu, cela fait tâche. Et le questions demeurent.

Quel système, quels joueurs ?

 Au moment d’annoncer sa liste, Sampaoli avait affiché sa volonté d’aligner un 2-3-3-2 comme « système de base », système que l’Argentine n’avait alors utilisé qu’à une reprise, contre Singapour. Au final, le seul match de préparation aura permis de s’assurer que finalement, l’Argentine utilisera l’un de deux systèmes les plus utilisés sous l’ère du Calsidense (à quatre reprises), le 4-2-3-1, mais malheureusement, les incertitudes demeurent et les blessures et autres galères n’ont pas réussi à les effacer, causant même quelques maux de tête à Sampa. Il y avait d’abord eu l’incroyable conférence de presse de l’annonce de la liste des 23 lorsque le Calsidense remettait en cause le statut de gardien numéro 1 de Sergio Romero, l’un de rares postes où il n’y avait pas débat. L’affaire s’est réglée par la blessures de Chiquito qui le prive d’une troisième Coupe du Monde. Conséquence, Sampa a dû rappeler Nahuel Guzmán dont le papa avait tranquillement insulté l’encadrement de la sélection et qui sur le terrain est loin d’apporter la moindre garantie au vu de sa saison. L’ancien de Newell’s devrait être numéro 3, la place de titulaire semblant promise à Willy Caballero, 36 ans, 3 sélections (trois amicaux), Franco Armani, qui n’a jamais gardé les cages de la sélection devant être destiné au poste de numéro 2. L’autre grande blessure venue plomber l’Albiceleste et les choix de Sampa, c’est celle de Manuel Lanzini. Celui qui devait prendre le rôle de 10 aux côtés de Messi s’est blessé à l’entraînement et laisse donc le sélectionneur face à un autre chantier, celui de l’animation offensive. Sampaoli peut confier ce rôle à Lo Celso, qui l’a endossé à Central à quelques reprises mais aussi face à l’Italie (Lanzini évoluant alors à la place de Messi), ou à Maxi Meza qui s’en charge parfaitement à Independiente. Son choix de ne pas faire appel à un vrai 10 pour remplacer Lanzini mais plutôt d’aller chercher Enzo Pérez, plus polyvalent peut ainsi trouver une certaine logique. Il témoigne aussi que le milieu de terrain est encore indécis. L’Argentine annonce débuter avec un doble cinco Mascherano – Biglia qui fait trembler bien des suiveurs, et la multiplication des profils polyvalents (Ansaldi capable d’évoluer des deux côtés, Mercado et Rojo pouvant jouer dans l’axe ou dans un couloir derrière, Mascherano en cinco ou en défense centrale, Lo Celso / Meza / Banega en huit ou en dix, Acuña et Salvio au milieu ou en défense, etc…) fait dire à nombre d’observateurs de Sampa navigue à vue. Une chose est sûre en tout cas, il n’aura jamais eu le temps nécessaire à parfaire son système, lui qui en a pourtant terriblement besoin et son Albiceleste ne pourra se permettre de perdre du temps et donc des points dans un groupe plus difficile qu’il n’y parait.

La grande question est donc de savoir si on n’est finalement pas trop exigeants avec l’Argentine et donc, conséquence directe à chaque prestation moyenne ou médiocre, pas trop sévère avec elle. Que ce soit le cas ou non, il reste une certitude, celle qu’aucun amoureux du football ne veut imaginer cette sélection n’être qu’un figurant. Si quelques-uns rêvent secrètement de la voir s’écrouler, le véritable amoureux ne peut le tolérer. En 1986, l’Argentine de Bilardo avait éprouvé toutes les peines du monde pour composter son billet pour le Mexique. Quelques mois plus tard, malgré les critiques, l’Albiceleste de Diego soulevait le plus beau des trophées. Trente-deux ans plus tard, celle de Messi n’attend qu’une chose : faire briller le soleil de mai jusqu’à mi-juillet.

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Le onze probable

Caballero – Tagliafico, Otamendi, Rojo, Salvio – Biglia, Mascherano – Di María, Meza, Messi – Higuaín

Le groupe

Gardiens : Franco Armani (River), Wilfredo Caballero (Chelsea), Nahuel Guzmán (Tigres).

Défenseur : Gabriel Mercado (Sevilla), Federico Fazio (Roma), Nicolás Otamendi (Manchester City), Cristian Ansaldi (Torino), Nicolás Tagliafico (Ajax), Marcos Rojo (Manchester United).

Milieux : Ever Banega (Sevilla), Javier Mascherano (Hebei Fortune), Eduardo Salvio (Benfica), Lucas Biglia (Milan), Angel Di María (PSG), Giovani Lo Celso (PSG), Enzo Pérez (River), Maximiliano Meza (Independiente), Marcos Acuña (Sporting).

Attaquants : Leo Messi (FC Barcelona), Sergio Agüero (Manchester City), Gonzalo Higuaín (Juventus), Paulo Dybala (Juventus), Cristian Pavón (Boca).

Nicolas Cougot
Nicolas Cougot
Créateur et rédacteur en chef de Lucarne Opposée.