Dans l’ombre des géants de Lima, l’Alianza, Universitario ou le Sporting Cristal, il est un club à la tradition historique. Ancien géant local, Sport Boys retrouvera l’élite péruvienne en 2018. L’occasion de lui consacrer un Histoire d’un nom spécial et de plonger là où le football a fait ses premiers pas au Pérou.

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La porte d’entrée du Pérou

Sport Boys est l’équipe qui représente le plus la ville portuaire du Callao, limitrophe avec la capitale Lima. Avant de parler football, arrêtons-nous dans la ville emblématique du Callao. Emblématique car absorbée par la mégapole tentaculaire qu’est Lima, elle veut se distinguer et ses habitants, les « chalacos », font vivre leur ville au rythme de la salsa. Historiquement, lors de l’époque coloniale, c’est le port le plus important du continent sud-américain. C’est de la que partaient toutes les richesses vers l’Europe. C’est aussi là que le football fera ses premiers pas (lire Des élites aux masses : les premiers pas du football au Pérou), Callao restant dans l’histoire ensuite car il donnera son nom à un geste technique bien connu (lire L'autre bataille du Pacifique).

Aujourd’hui c’est la porte du Pérou, celle par laquelle entrent les touristes qui atterrissent à l’aéroport Jorge Chavez. L’ambiance est particulière au Callao et souvent festive. Il faut dire que c’est une place importante et reconnue dans le monde de la Salsa ou les plus grands artistes y ont donnés des concerts. Le groupe salsero Zaperoko le plus représentant de la ville y chante même l’hymne du club.

En se baladant dans les rues on peut tomber sur des fresques représentant les plus grands chanteurs de salsa comme Hector Lavoe, Frankie Ruiz ou encore Celia Cruz peint sur des murs roses mélangés aux emblèmes et aux couleurs de la ville et du club Sport Boys. Malheureusement tout n’est pas rose au Callao qui compte aussi beaucoup de quartiers sensibles contrôlés par les cartels de drogues.

Sport Boys, le fleuron de la ville

Pour vivre le football aujourd’hui à Callao, il faut donc se diriger vers le stade Miguel Grau, l’antre du club Sport Boys ou le football reprend ses droits chaque dimanche dans cette ville tumultueuse.

Fondé le 27 juillet 1927 par des étudiants du Callao, le nom « Sport Boys » est un dérivé de leur club de natation « Old Boys ». Reconnu comme « el primer campeón », le premier champion de l’ère professionnelle du championnat péruvien en 1951, les Boys ont ensuite glané 6 titres de première division. Considéré comme le 4e grand du Pérou, le club dispute 76 saisons dans l’élite du championnat péruvien et participe à 6 Libertadores. Le club tout juste couronné en 1935, la fédération envoie à Berlin les 11 joueurs titulaires de Sport Boys afin de défendre la sélection péruvienne pour les JO de 1936. Jamais dans l’histoire une équipe péruvienne n’a été prise comme base pour former l’équipe nationale et représenter le pays. Sport Boys connait alors un soutien populaire sans précèdent. En 1937, le club est à nouveau champion mais cette fois de manière invaincue et s’installe dans le cœur des supporter aux côtés des grands de Lima : Alianza Lima, Universitario et Sporting Cristal. Mais le club de la petite ville voisine dérange et les joutes contre les gros de Lima deviennent enflammées. Cela donnera naissance aux fameux Clásicos Lima-Callao dont le plus important restera contre l’Alianza Lima. Le Clásico de 1972 marquera une autre page glorieuse de l’histoire du Sport Boys puisque les rosados écrasent les aliancistas 8 buts à 1. La hinchada rosada est aussi reconnue dans le pays notamment la « Barra Vamos Boys » qui est l’une des plus anciennes et la première à suivre son équipe pour les déplacements en province.

stade

Suite à des problèmes économiques, le club descend en deuxième division en 1987 puis remonte deux ans plus tard en 1989. Vient ensuite une longue période d’irrégularités sportives où le club lutte pour le titre en 1998, joue la prestigieuse Copa libertadores en 2001 avant de redescendre en 2008 puis accéder de nouveau à la première division en 2009. En 2012 le club redescend et restera en deuxième division pour une période interminable de 5 ans. En 2017, Le club fête ses 90 ans avec comme invité le grand Jorge Sampaoli alors sélectionneur de l’Argentine et qui fut aussi brièvement entraineur de l’équipe rose (pour plus de détails et notamment revivre la campagne 2001, lire L'histoire sud-américaine de Jorge Sampaoli). Comme un clin d’œil, cette année sera l’année de la renaissance puisque le club lutte pour la montée jusqu'à la dernière journée et fini premier exæquo avec le club UCV de Trujillo. La fédération décide de jouer une finale en terrain neutre à Cusco pour l’ascension en première division. Le desempate est alors gagné aux tirs au but par les Boys qui retrouvent enfin l’élite et espèrent désormais des jours meilleurs. Et permet aussi le retour du football là où tout avait commencé. Cette renaissance avait commencé en 2016 alors que le club traversait une saison horrible et était proche de la relégation en 3e division. Un changement de direction et d’entraineur sauve les rosados. Grâce à deux renforts de poids très expérimenté, Johan Fano (ancien international péruvien) et le colombien Johnnier Montaño, le club a surpassé ses objectifs en décrochant le titre de champion de Segunda.

Atlético Chalaco et Clásico Porteño

Nous ne pouvons pas quitter le Callao sans parler de l’Atlético Chalaco, l’autre grand club historique du Callao et l’un des plus anciens du pays. Fondée en 1902 par des étudiants, le León Porteño, (traduisez «le lion du port»), est le principal rival des Sport Boys depuis leur première rencontre en 1937 soldée par un match nul 3 buts partout. La rivalité sera à son paroxysme lors du championnat de 1958 quand les deux équipes s’affrontent alors pour le compte de la dernière journée avec chacun une chance de remporter le titre. Ce sont les Boys qui avec un but a la dernière minute remporteront leur 5e titre de champion. Malheureusement le lion ne rugit plus depuis longtemps en Primera, malgré y avoir joué plus de 45 saisons. Depuis 1987 et la descente en Segunda, le club lutte pour sa survie en 3e division puis en district. En 2009 le président démissionne et laisse un club englué en ligue amateur du Callao. Le 9 juin 2017, l’Atlético Chalaco fête ses 115 ans mais son présent récent marque une forme d’agonie et passe toute l’année sans aucune affiliation à aucune ligue. Il existe cependant une volonté des socios et hinchas pour relancer le club et le maintenir à flots. Histoire que Callao puisse enfin retrouver son Clásico.

Romain Lambert
Romain Lambert
Parisien expatrié sur les terres Inca, père d’une petite franco-péruvienne, je me passionne pour le football de Lima à Arequipa en passant par Cusco. Ma plus forte expérience footballistique a été de vivre le retour de la Blanquirroja à une coupe du monde après 36 ans d’absence.