Whitecaps vs Sounders ! Voilà pour l'affiche sauce US. Samedi, les Canadiens recevaient leurs voisins étasuniens pour un derby historique de soccer, décisif dans la course à la coupe des cascades. Entre Djimi Traoré, une maman fun et des records, découverte d'une rivalité et un show très américain.

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« C'est le plus gros match de l'année, qu'est-ce que vous voulez que je rajoute ? ». À quelques heures d'affronter le rival US, le milieu de terrain canadien, Russell Teibert annonce la couleur. « Comme avant chaque derby, l'atmosphère est spéciale, on sent l'excitation monter en ville et dans le vestiaire. Contre Vancouver ? C'est toujours bien plus que trois points » complète Brian Schmetzer, natif de Seattle, ancien joueur et désormais entraîneur des Sounders. Le décor est posé. La rivalité géographique entre les deux voisins revêt aussi une dimension historique. Il s'agit même d'une des plus anciennes de la ligue puisqu'elle remonte aux débuts professionnels du soccer dans la région, durant les seventies. Cette saison, cerise sur la poutine, l'enjeux est aussi sportif. En MLS, les deux franchises sont au coude à coude pour les play-offs et en cas de victoire, Seattle offrirait à ses supporters la Cascadia Cup - du nom de la chaîne de montagne du Nord-Ouest-Pacifique - que se disputent chaque saison Vancouver, Seattle, mais aussi les Timbers de Portland lors de leurs affrontements de saison régulière. Le BC Place Stadium dans sa configuration soccer est sold-out, l'ambiance des grands soirs garantie.

Maillots de hockey, formidable outil, « fun and great time »

Pourtant, à deux heures du coup d'envoi, sur la rue commerçante de Robson Street et aux alentours du stade, c'est le calme plat. Sur le parvis, peu d'animation. Le public familial et très féminin, déambule vers les billetteries retirer sa place. Les casquettes, écharpes et vestes à l'effigie des Whitecaps se mêlent aux maillots de Seattle et cohabitent avec les nombreux maillots de hockey aux couleurs des Canucks, comme un rappel qu'ici, le soccer n'est pas roi. Pour Vicky et Vicky, c'est soir de baptême ballon rond. Les deux amies, passionnées de football canadien ont choisi leur camp : tee-shirt Sounders pour une, sweat Whitecaps pour l'autre. Dans la queue, Ray, 72 ans, et sa fille, Monique, 48 ans, maillots sur le dos, font figure d'exception. Abonnés depuis plus de trente ans, ils vivent leur avant match avec « la pression des grands soirs. À Vancouver, les supporters de soccer ne sont pas nombreux », regrettent-ils. « Nous avons besoin qu'une grande équipe marque l'histoire pour que la passion naisse et que les gens viennent au stade car ensuite, on devient vite accro ».  Leur mot d'ordre : « fun and great time ». Un état d'esprit qui colle parfaitement à celui recherché par les 27 863 fans -  record d'affluence - qui pénètrent en grappe dans les entrailles animées du BC Place, ce formidable outil local : un véritable centre-commercial où restaurants, boutiques, stands de glaces et de boissons s'étalent. Un temple de la consommation qui ferait rougir tous les managers stadium de France.

Emerald City et cantine

Des « you'll never yacht alone » réchauffent enfin l'ambiance. Les centaines de Sounders qui ont fait le court déplacement rentrent au stade tranquillement, escortés par… dix policiers. Les Emerald city supporters, réputé comme étant les plus chauds de la ligue donnent de la voix. Les fans des vice-champions en titre sont confiants. Leur équipe vient d'établir un nouveau record MLS et reste sur huit victoires consécutives. Les effluves d'alcool de cinq excités venus soutenir Seattle depuis l'Alaska, chapeaux de marins sur la tête ne dérangent pas Michael, sa femme et ses deux enfants. « On ne rate pas un match. À Seattle, le soccer est quelque chose d'important. Au Canada, on peut venir en famille car la rivalité est bon enfant, beaucoup plus saine que contre Portland. Et il faut bien que l'on soit là, pour qu'il y ait de l'ambiance », chambre le papa.  Difficile de lui donner tort. À quelques minutes du coup d'envoi, les tribunes sont vides, les couloirs pleins. À l'intérieur du stade couvert, hormis les fans américains qui agitent leurs drapeaux en chantant, les autres spectateurs se restaurent à coup de poutines, buckets et burgers, welcome in Canada ! Sur l'immense écran géant central, les vidéos, publicités et jeux défilent - seul la kiss cam manquera - rythmés par une playlist rap du meilleur goût pour accompagner le repas. Et le soccer dans tout ça ? Il apparaîtrait presque secondaire si le millier de Sounders tassé dans un virage - sans séparation, ni sécurité - n'enchaînait les clappings lancés par un énergique capo. À ses côtés, Ana, une supportrice originale se signale. Pancarte en main, la maman de Cristian et Alex Roldan est en place.

Le frisson Davies, le bonbon Lodeiro

Le stade se remplit enfin pour les hymnes. Les maillots d'Alphonso Davies, la pépite locale, fleurissent, et de timides « Whitecaps » descendent des tribunes pour lancer le match. Si les Southsiders, le groupe de fans de Vancouver reste calme, sur le terrain, les Canadiens attaquent fort. Malgré une nette domination des Whitecaps, en deux occasions Seattle et son duo uruguayo-péruvien Lodeiro – Ruidiaz - double buteur – tuent le match. Pendant que Spike, la mascotte fait le show, les « Seattle » résonnent dans le stade. La réduction du score du chouchou Kei Kamara juste avant la mi-temps redonne un peu d'espoir et de voix aux Vancouvérois. Sur le banc, un certain Djimi Traoré, entraineur adjoint du Sounders hurle les consignes et s'agite tandis que la franchise de Steve Nash pousse pour égaliser. Malgré quelques accélérations de grandes classes du futur munichois Davies et un poteau, les Whitecaps butent sur l'excellent Stefan Frei. Emmené par un Nicolas Lodeiro plein de classe, Seattle soulève pour la cinquième fois la Cascadia Cup. Au rythme des « Ahou », le peuple vert - vous avez bien lu -  célèbre pendant plusieurs minutes une neuvième victoire consécutive historique. « Jingle bells, oh what fun it is to see Seattle win away ». Et malgré les différences culturelles, d'assister à un match de MLS.

Résumé

Ken Fernandez
Ken Fernandez
Journaliste tout terrain, je balade mon carnet et mon stylo au pays de Diego, à la recherche du nouveau Cavenagoal