Le jeune avant-centre de l'Inter Milan est actuellement au centre des attentions en Argentine où l'incompréhension concernant sa non-convocation en sélection anime bien des débats. Sa dernière saillie ne devrait pas laisser sans réponse.

L’histoire d’Icardi et de la sélection argentine débute quand le jeune argentin est à la Masia. Convoqué avec les u17, il dispute deux matches amicaux de la sélection. C’est au cours de sa préparation du Sudamericano 2013 qu’il va rejoindre la Sampdoria. Sa carrière débute alors en Italie, ses bonnes performances attirent les regards des sélectionneurs locaux. Mais des u19 aux A, Icardi ne va cesser de laisser ces appels sans réponse. Argentin, Mauro n’a qu’une envie, être albiceleste. Il le sera une fois, lors d'une rencontre disputée en Uruguay, entrant à huit minutes de la fin.

Reste que cette histoire est chaotique, attise un feu constant. Pour preuve, déjà absent de la liste pour la Copa América Centenario, alors qu’il pourrait intégrer la sélection qui participera aux prochains Jeux Olympiques, Icardi ne sait pas encore ce que Martino fera de lui, le sélectionneur argentin soufflant le chaud et le froid à son sujet, expliquant qu’il mérite sa place avant d’annoncer qu’il n’y aura aucune surprise.

Pourtant, depuis que Tata a pris les rênes de la sélection, l’avant-centre de l’Inter a inscrit 43 buts, il est le quatrième meilleur buteur argentin sur cette période derrière Higuan (63), Agüero (60) et Tevez (47) mais devant Dybala (33). Icardi divise ainsi l’Argentine du foot et deux camps, ceux qui souhaitent son intégration, ceux qui ne veulent pas l’entendre. Le bouillant attaquant interiste, à qui Martino reproche notamment ses débordements extra-sportifs, reste donc pour l’instant à quai malgré ses bonnes stats et cherche, attend l’explication. Illustration avec sa dernière sortie sur La Nacion qui ne devrait pourtant pas calmer les choses. La traduction qui suit devrait vous permettre d’en juger.

Tu n'as jamais rien regretté ?

Je ne regrette rien. Ni dans le football, ni dans ma vie personnelle. Je suis bien argentin et j'ai toujours voulu jouer pour mon pays.

Tu ne crains pas que l’extra-sportif éclipse le footballeur ?

L’extra-sportif, en réalité uniquement ma relation avec Wanda, n’est un sujet qu’en Argentine. Ici, c’est terminé, ça a été une tornade ok, mais c’est terminé. En Italie, il y a déjà trois ans que si on parle de moi, c’est pour ce que je fais sur le terrain. En Argentine, ils cherchent la merde… ici ils me jugent sur mes performances sportives. Martino dit que je ne dois être que dans les journaux sportifs ? Et bien ici, tous les lundis, je sors dans ces journaux pour mes buts, pas pour mon histoire avec Wanda. Ici, tout le monde se demande pourquoi je ne suis pas en sélection. Même mes coéquipiers se le demandent. Je suis peut-être un bon joueur, un mauvais ou un médiocre, comme tu veux, mais je marque des buts, c’est ce qui compte en football. Ici, les dirigeants, la presse, me disent « Ils vont t’appeler ? Tu y vas quand ? Tu n’y es pas ? Comment ne peuvent-ils pas t’appeler ? »

Et tu réponds quoi ?

Rien. « On verra quand ils m’appelleront ». Que veux-tu que je réponde ? S’ils insistent : « comment ne peuvent-ils pas t’appeler si tu marques beaucoup ? » Et bien je ne sais pas…

Pourquoi penses-tu qu’on en est là ?

Ici en Italie, dans chaque papier auquel je participe, je parle football, on ne me demande rien sur ma vie. En Argentine, c'est tout à l'opposé, ils ne disent pas : « Regarde ce jeune qui met tant de buts ! », ils disent « Regarde, c'est celui qui est avec Wanda Nara...celui qui a foutu la merde en volant la fiancée à son ami. » Et je n'ai volé la fiancée de personne. Nous étions coéquipiers, comme j'ai 25 coéquipiers actuellement et comme j'aurai 25 autres coéquipiers l'année prochaine. Et voilà. Nous étions à un asado ensemble. Après...je ne sais pas, s’il négligeait sa femme et que ça a été la cause du fait que sa femme me choisisse...voilà ce qu'il se passe en Argentine, ils cherchent le pire pour toujours parler des mauvaises choses.

Ils t’apprécient plus en Italie ?

Oui, évidemment... 100 à 0 (rires)... en Italie, ils parlent bien de moi et s’intéressent à mes performances sportives : il a bien joué, a inscrit tant de buts, a mûri, progressé dans l'équipe, se complète bien avec untel ou untel, lit le jeu, il tourne bien... pour cela je dis 100 à 0. Mais en Argentine, jamais. Ils n'ont jamais rien de bon à dire, d'abord par ce qu'ils ne me connaissent pas ensuite parce qu’ils cherchent à remuer la merde.

Ce ne serait pas simplement par ce qu'il y a de très bons avants-centres et que Martino préfère les autres ?

De toute évidence il y a de grands joueurs...mais il y en a un, ou deux maximum qui occupent mon poste : El Pipa et el Kun. Après, oui vous avez Messi, Dybala, Lavezzi, Carlos...Di María...mais ils jouent tous neuf et demi. Des joueurs de pointe, il n'y a que Higuain et Agüero.  Nous avons les meilleurs attaquants au monde, je le sais. La génération d'attaquants qu'il y a aujourd'hui en Argentine, je ne crois pas qu'il y en aura à nouveau une aussi forte.

Et si tu jouais sur le côté...que penses-tu qu'il se passerait ?

C'est au-delà du poste...avec mes performances à l'Inter, je devrais avoir au moins une opportunité. Comme je l'ai eue quand j'étais à la Sampdoria...ce n'est donc pas pour cette raison, c’est pour d'autres raisons, comme je te disais avant... Martino est le seul à avoir l'explication. Martino dit qu'on ne parle de moi uniquement pour des faits extra-sportifs, mais dans les derniers papiers que je vois, la seule chose qu’ils demandent c’est pourquoi Icardi n’est pas en sélection avec tous les buts qu’il met. Il n’y a que lui qui parle des affaires extra-sportives, pas les journalistes. Je le répète, ici, cela fait trois ans qu’on n’en parle plus.

Une discussion avec Martino servirait-elle ?

Evidemment. Je suis disponible. Quand j'étais à la Sampdoria, et j'étais plus jeune, Sabella est venu, a regardé un match et est venu boire un coup avec moi. Nous avons parlé. Il m’a expliqué sa position et je lui ai donné mon point de vue. Je suis toujours disponible pour parler. Si Martino veut venir, il est le bienvenu. L'autre jour, Dunga était là, il est venu parler à ses joueurs...j'aimerais avoir une discussion pour connaître les motifs réels, non les motifs qui sortent à gauche et à droite. 

Avec qui t'entends-tu le mieux en sélection ?

Evidemment j'aimerais jouer avec Leo qui est le meilleur au monde. Regardez Suarez...il n'a rien d'autre à faire que courir, Leo met le ballon où il veut. Et après, un joueur qui me plaît beaucoup et que je vois comme un crack c'est Di María. Il me plaît pour sa vitesse, comment il porte la balle, on dirait qu'il l'a comme aimantée. C'est un grand joueur. Et de Rosario !  Bon, il est de Central...mais gamin, il a été élevé là, tout près de Sarratea, d'où je suis, à deux ou trois maisons. Ce serait un plaisir de jouer avec tous ces joueurs.

Tu dis que les affaires extra-football appartiennent au passé, mais tu as une vie intense sur les réseaux sociaux, tu aimes t'exposer, te montrer. Ne dépasses-tu pas les bornes ?

J'utilise les réseaux sociaux, Instagram et Twitter, comme des outils de travail. Je les vois comme partie de mon travail, parce que nous savons que l'utilisation de l'image influe sur la publicité et d'autres campagnes. Je crois aussi à autre chose : les gens me connaissent pour ce que je fais sur le terrain, rien de plus, alors je sens qu'en mettant quelques photos avec ma fille, avec les petits et avec Wanda, je montre qu'en dehors du terrain, je suis une personne normale, comme n'importe quel être humain. Personne ne connaît le Mauro Icardi du côté privé.

Si tu ne vas pas en Russie, te consoleras-tu en pensant que tu auras une chance en 2022 au Qatar quand tu auras 30 ans ?

Mon travail est de donner le maximum à l'Inter, la sélection est une récompense pour le travail effectué au quotidien. Quand arrivera 2018, si le sélectionneur veut m'appeler, évidemment que je vais être content par ce que je veux jouer et gagner quelque chose avec la sélection. Représenter ton pays te remplit de fierté et d'émotion.

Un pays qui n'a pas gagné de titre depuis longtemps

Oui, et c'est une peine. J'étais content quand l'Argentine est arrivée en finale du Mondial et en finale de la Copa América... après, on ne peut pas expliquer ces choses qui se passent dans le football, mais en le voyant depuis l'extérieur je me disais : « Comment j'aimerais être là pour au moins essayer de donner un coup de main, de contribuer d'une manière... »

Tu guettes les convocations ?

Non, je ne les regarde pas et ne les attends pas. Le jour où ils m’appelleront, ils viendront m’en avertir. Et si cela n'arrive jamais, j'ai déjà débuté, j'ai joué quelques minutes, et au moins un jour, j'ai pu revêtir le maillot de ma sélection.  

Traduction JC Abeddou pour Lucarne Opposée

Photo : Valerio Pennicino/Getty Images

JC Abeddou